Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

medicalised transport,medical assistance, plastic surgery

Sédation en réanimation de l’adulte

 

 

 

Sédation en réanimation de l’adulte

 

 

 

hops

 

 

G. Kierzek, J.-L. Pourriat

La sédation en réanimation se définit par l’utilisation de moyens médicamenteux ou non, dans le but de diminuer l’anxiété, d’assurer une analgésie satisfaisante, de calmer la douleur et de faciliter le contrôle des voies aériennes et la ventilation mécanique. Les moyens médicamenteux font le plus souvent appel aux médicaments utilisés en anesthésie, désormais largement administrés également dans le cadre de la médecine d’urgence et de la réanimation extrahospitalière et intrahospitalière.Le maniement de ces médicaments nécessite une parfaite connaissance de leurs avantages et de leurs inconvénients car, en réanimation, leur utilisation s’avère encore plus délicate qu’en anesthésie(patients en défaillance monoou polyviscérale,

retentissement hémodynamique, antécédents médicaux parfois inconnus, etc.).

 

Les objectifs de l’analgésie et de la sédation en réanimation, les indications, les moyens et les modalités d’administration ont été rappelés par une conférence de consensus ou des recommandations de pratique clinique communes aux sociétés savantes (Société Française d’Anesthésie et de Réanimation et Société de Réanimation de Langue Française). Une stratégie institutionnelle et une approche individuelle par patient pour en définir la durée, choisir les médicaments et déterminer la profondeur de la sédation, restent néanmoins indispensables ; l’évaluation pluriquotidienne et l’interruption régulière de l’administration des sédatifs et/ou analgésiques permettent un examen clinique du patient et une adaptation au plus prèsde ses besoins en limitant les effets secondaires. Enfin, toutes les sédations ne sont pas identiques par rapport aux pathologies causales ou associées et au-delà de la simple sédation « adjuvante » des thérapeutiques de réanimation, les nouveaux agents sédatifs semblent jouer un rôle thérapeutique propre, autorisant à parler véritablement de « sédation thérapeutique ».


Mots clés : Sédation en réanimation ; Médecine d’urgence


Introduction

La sédation en réanimation se définit par l’utilisation de moyens médicamenteux ou non, dans le but de diminuer l’anxiété, d’assurer une analgésie satisfaisante, de calmer la douleur (par exemple pour des gestes courts mais douloureux) et de faciliter l’adaptation au respirateur (contrôle des voies aériennes et ventilation mécanique).

Les moyens médicamenteux font le plus souvent appel aux médicaments utilisés en anesthésie.D’abord étendus au cadre de la sédation en réanimation, ces médicaments sont désormais largement administrés dans le cadre de la médecine d’urgence et de la réanimation extrahospitalière.Ces extensions d’utilisation en dehors des blocs opératoires aux conditions de sécurité maximales se justifient par les pathologies rencontrées en réanimation et par les techniques nécessaires à leur état(modalités particulières de ventilation artificielle, analgésie profonde après des chirurgies majeures, etc.).

La présence d’anesthésistes-réanimateurs a largement participé à leur généralisation dans les structures de réanimation.Le maniement de ces médicaments nécessite une parfaite connaissance de leurs avantages et de leurs inconvénients.

Cependant, en réanimation, l’utilisation de médicaments de l’anesthésie est encore plus délicate pour plusieurs raisons : [1]

• les patients peuvent être en défaillance mono- ou polyviscérale et le retentissement, notamment hémodynamique, de ces médicaments peut être extrêmement délétère ;

• les antécédents médicaux ne sont pas forcément connus et l’administration de médicaments de l’anesthésie peut décompenser un état cardiovasculaire fragile.

Les objectifs de l’analgésie et de la sédation en réanimation, les indications, les moyens et les modalités d’administration ont été rappelés par une conférence de consensus ou des recommandations de pratique clinique communes aux sociétés savantes (Société Française d’Anesthésie et de Réanimation et Société de Réanimation de Langue Française). Néanmoins, plusieurs travaux ont clairement montré un décalage entre les recommandations et la pratique. [2-4]


Objectifs de la sédation

Les indications de la sédation regroupent souvent aussi les indications de lutte contre la douleur avec utilisation concomitante d’analgésiques. On parle alors de sédation-analgésie (analgo-sedation des Anglo-Saxons).

Anxiolyse et sédation

La lutte contre le stress et l’anxiété doit être une priorité pour les patients de réanimation présentant un état de stress aigu en rapport avec la pathologie initiale motivant la réanimation (douleur thoracique de l’insuffisance coronarienne aiguë, traumatismes, brûlures, état dyspnéique aigu, etc.).Le stress aigu entraîne des manifestations physiologiques avec décharge de catécholamines, augmentation du catabolisme azoté, de la glycogénolyse hépatique, de la néoglycogenèse, de la lipolyse et rétention hydrosodée. Le stress chronique entraîne une altération du système immunitaire et de la réponse neuroendocrine. [5]

De véritables états d’agitation aiguë ou desbouffées délirantes peuvent en découler, d’autant que l’environnement même de la réanimation et les soins prodigués sont eux aussi générateurs de stress (bruit, lumières agressives, allersretours incessants des personnels, actes invasifs, etc.).

[6] Une récente étude semble mettre en évidence une diminution de la sécrétion de mélatonine chez les patients sédatés et ventilés artificiellement.

[7] Cette carence jouerait un rôle dans les perturbations du sommeil et l’apparition de delirium chez ces patients ; une supplémentation pourrait réduire ces phénomènes.

Les conséquences psychiques d’une sédation insuffisante sont également importantes. Ainsi, une étude menée chez des patients admis en réanimation pour un syndrome de détresse respiratoire de l’adulte (SDRA) a montré que ces patients avaient un souvenir extrêmement désagréable de périodes où ils étaient probablement insuffisamment sédatés mais parfaitement curarisés. [8]

Analgésie

Très fréquente en réanimation, la douleur a un rôle néfaste sur les grandes fonctions vitales :

retentissement ventilatoire (polypnée, troubles de ventilation, risque d’atélectasies, dysfonction diaphragmatique postopératoire, etc.)et cardiovasculaire (stimulation adrénergique avec augmentation de la pression artérielle et de la fréquence cardiaque, inhibition du système vagal, vasoconstriction périphérique, etc.).Comme l’anxiété, elle modifie la réponse au stress en augmentant le tonus sympathique et les catécholamines circulantes, elle entraîne une stimulation hypothalamique avec modification du taux d’endorphines circulantes, augmentation des hormones catabolisantes

(cortisol et glucagon), baisse des hormones anabolisantes (testostérone, insuline) et hypermétabolisme avec une modification de la balance besoins/apports en oxygène et augmentation de la dépense totale en énergie. [9]

Les patients de réanimation sont soumis à des stimuli douloureux multiples et courants ; [10] les uns sont continus et liés à la pathologie causale (polytraumatisme, période postopératoire, etc.), les autres sont occasionnels et déclenchés par les soins, les mobilisations, les gestes invasifs, la mobilisation de zones fracturaires. Les « manipulations » endotrachéales (aspirations, retrait de sonde d’intubation), les cathétérismes, les drainages thoraciques sont les plus fréquemment évoqués par les patients.

Adaptation au respirateur et conditions de ventilation artificielle

Ces conditions peuvent être largement facilitées par une sédation additionnelle.Les buts recherchés sont

alors d’améliorer les échanges gazeux et de diminuer le barotraumatisme. Dans certaines situations, la sédation contribue à la stabilité de la pression intracrânienne (traumatisés crâniens graves) et à la diminution de la consommation d’oxygène.

Par ailleurs, la toux, fréquente chez des patients intubés, peut nuire à l’adaptation au respirateur et à la stratégie ventilatoire.

Sécurité du patient et facilitation des soins

L’objectif est de prévenir la survenue d’événements intercurrents aggravant l’état du patient (chute lors du brancardage, arrachement d’un cathéter ou d’un drain, détérioration des pansements entraînant un défaut d’asepsie, autoextubation, etc.), mais aussi de lutter contre les mouvements intempestifs, volontaires ou non, qui compromettent la réalisation des soins (toilette, pansements, etc.) et en prolongent la durée.

Agitation et delirium

Agitation et delirium, dont les causes sont multiples en réanimation, sont fréquents et atteignent des incidences de 10 à 50 % pour l’agitation en réanimation ; [11, 12] par ailleurs, 40 % des patients ventilés mais répondant aux ordres et non agités présentent un delirium. [13] La maîtrise de ces états est d’autant plus une priorité qu’une étude récente démontre que le delirium est, outre les risques d’autoextubation, un facteur prédictif indépendant d’augmentation de durée de séjour en réanimation et de mortalité à six mois chez les patients intubés. [14] Certains facteurs de risque ont pu être identifiés comme l’âge plus jeune des patients agités,

un pH inférieur, un rapport PaO2/FIO2 < 200 et enfin des doses reçues plus importantes de benzodiazépines, de sédatifs ou de curares. [15]

Caractère limitant de ces objectifs

Les objectifs énumérés plus haut sont essentiels. Cependant, la diminution de mortalité et de morbidité doit être considérée comme l’objectif prioritaire in fine. Plus exactement, la sédation devrait être évaluée par le bénéfice qu’elle apporte sur ces deux paramètres. C’est dire qu’en réanimation ET en médecine d’urgence, la prescription d’une sédation ne devrait se faire qu’après avoir évalué précisément les avantages espérés et les Ninconvénients possibles. [16] En effet, l’utilisation, même sur des durées brèves, de médicaments habituellement destinés à l’anesthésie n’est pas dénuée d’effets secondaires.

Dans ce contexte, ceux-ci sont encore très mal individualisés, notamment pour des patients porteurs de comorbidités et en état de défaillance mono- ou multiviscérale. Ainsi, le retentissement hémodynamique de la sédation sur des patients en état instable est a priori délétère, pouvant conduire à un désamorçage de la pompe cardiaque dans un contexte d’altération de la fonction myocardique et/ou de vasodilatation brutale. Il en est de même de l’administration de certaines classes médicamenteuses chez l’insuffisant hépatique ou chez l’insuffisant respiratoire chronique, responsable alors de l’aggravation de la pathologie chronique ou plus simplement d’un allongement de la durée de séjour en milieu de réanimation.

Enfin, on ne saurait méconnaître le risque allergique, actuellement sous-estimé, car l’intrication des altérations physiopathologiques et leur gravité laissent le rôle propre des médicaments au second plan.


Moyens non médicamenteux

Avant de penser « médicaments sédatifs » qui, nous le verrons, ne sont pas dépourvus d’effets secondaires,

il est fondamental de penser aux moyens non médicamenteux, adjuvants obligatoires de toute sédation.

Ils devraient être systématiquement appliqués au préalable et comprennent avant tout une réflexion sur l’organisation du service (aussi bien en termes d’architecture que d’équipements avec la présence de fenêtres ou d’horloges), la conceptualisation et l’élaboration de protocoles précis sur les soins de base par l’ensemble de l’équipe.La prise en charge psychologique du patient, la communication avec la famille et l’information de l’équipe soignante doivent être menées conjointement.[3]


Moyens médicamenteux 

Objectifs : anxiolyse et sédation

De nombreux agents hypnotiques, barbituriques et non barbituriques, anesthésiques volatils, peuvent être utilisés comme agents de la sédation. Leurs avantages essentiels viennent d’une action spécifique dans un état pathologique particulier ou une situation donnée.

Benzodiazépines

Très largement utilisées, ce sont les molécules de référence pour le traitement de l’anxiété et de l’angoisse. [17]

Elles augmentent le temps total de sommeil sans cependant augmenter le sommeil paradoxal dans les mêmes proportions. [18]

Elles diminuent le tonus musculaire et entraînent une amnésie à condition que les doses soient adaptées, car la mémorisation d’expériences traumatiques intenses augmente si la sédation est insuffisante. Elles diminuent le métabolisme et le débit sanguin cérébral, et sont donc particulièrement indiquées dans l’hypertension intracrânienne.

Les effets hémodynamiques et respiratoires sont faibles chez le patient jeune sans pathologie préexistante.Ils peuvent être marqués chez le patient âgé atteint d’une pathologie cardiovasculaire,

chez le patient hypovolémique ou insuffisant respiratoire chronique.

Sur le plan hémodynamique, les benzodiazépines peuvent entraîner les effets suivants.

• Une diminution de la pression artérielle chez l’animal, ainsi que chez l’homme sans pathologie cardiovasculaire. L’intensité de la baisse de la pression artérielle dépend de l’état d’anxiété et de l’activité adrénergique. Cette dépression centrale de l’activité adrénergique, responsable d’une vasodilatation périphérique, explique en partie l’hypotension observée. Le flunitrazépam et le diazépam se comportent plutôt comme des vasodilatateurs artériels alors que le midazolam est plutôt vasodilatateur veineux.

• Une augmentation modérée de 8 à 10 % de la fréquence cardiaque. Son niveau avant l’injection est un élément important dans les variations observées.

• Une baisse du débit cardiaque sur des patients hypovolémiques.

• Une diminution des besoins myocardiques en oxygène.

• Une dépression modérée et transitoire du baroréflexe pouvant être à l’origine d’une limitation des capacités d’adaptation circulatoire en cas d’hypovolémie.

Sur le plan respiratoire, les benzodiazépines peuvent entraîner une dépression centrale à l’origine d’une hypoventilation alvéolaire.

Cette hypoventilation alvéolaire génère une hypercapnie modérée avec diminution du pH artériel et hypoxémie de faible importance.

Ces effets respiratoires sont sans conséquence chez le patient sain, mais peuvent être beaucoup plus marqués chezle patient insuffisant respiratoire.

Propofol

Le propofol est un hypnotique intéressant par sa demi-vie brève. Il est utile pour les actes de petite chirurgie ou pour des sédations de courte durée. Il est faiblement anxiolytique et peu analgésique. Ses effets secondaires doivent être connus.

• Sur le plan hémodynamique, le propofol est à l’origine d’une diminution de la pression artérielle chez l’animal et chez le sujet sain non prémédiqué. Cet effet est accentué chez les patients âgés, chez les hypertendus traités par bêtabloquants, chez les insuffisants cardiaques et chez les patients hypovolémiques.

La diminution de la pression artérielle est plus importante si l’injection se fait en bolus par rapport à une administration continue. Le mécanisme de l’hypotension est multifactoriel.

• Sur le plan respiratoire, le propofol entraîne une apnée dans 25 à 30 % des cas. Cette apnée est dépendante de la dose et de la vitesse d’injection. Elle dépend également de la prémédication, et notamment de l’utilisation conjointe de morphiniques.

Elle est précédée d’une diminution du volume courant et d’une tachypnée. Le propofol est à l’origine d’une hypoventilation alvéolaire avec une réponse ventilatoire au CO2 diminuée.

• D’autres effets délétères doivent attirer l’attention du réanimateur.

Le mode d’administration le plus employé est la perfusion continue par seringue autopulsée.

Or, dans le cadre d’une sédation prolongée, l’administration intraveineuse continue est associée à une prolongation de ventilation invasive et de durée de séjour en réanimation. [19] L’administration selon un objectif de concentration plasmatique pour le propofol permet d’adapter la profondeur de la sédation à la situation clinique considérée. Le réanimateur détermine la concentration plasmatique souhaitée. Une seringue autopulsée asservie à un calculateur se charge d’obtenir et maintenir cette concentration dans les plus brefs délais.Le calculateur détermine à chaque instant la vitesse de perfusion en fonction des concentrations prédites par un modèle pharmacocinétique.Par ailleurs, l’excipient lipidique du propofol peut être le vecteur d’infections nosocomiales si une asepsie rigoureuse n’est pas respectée ou si le déconditionnement est prolongé, supérieur à quatre heures. L’apport lipidique n’est pas négligeable à des doses d’entretien (2-4 mg kg–1 h–1) puisque qu’il s’élève en 24 heures à l’équivalent de 500 ml d’Intralipide® à 10 % dont il faudra tenir compte dans les apports caloriques. L’utilisation de la forme de propofol à 2 % doit permettre de réduire le risque de surcharge lipidique pour un même effet. [20]

Dexmedetomidine

La dexmedetomidine est un nouvel agent de la sédation, agoniste sélectif des récepteurs alpha-2 adrénergiques, non disponible en France à l’heure actuelle mais autorisé sur le marché nord-américain. Utilisé en perfusion continue, il semble ne pas avoir d’effets dépresseurs respiratoires ce qui permet la poursuite de son utilisation au-delà de l’extubation. [21] Son utilisation a notamment été évaluée en période postopératoire de chirurgie cardiaque. [22] La dexmedetomidine permet une sédation efficace avec par ailleurs, à niveau de sédation égal, une réduction significative de la consommation de morphiniques.

Dans une autre étude, les besoins en morphiniques sont diminués de moitié par rapport à une sédation utilisant le propofol. [23]

Pour les patients de réanimation médicale ventilés artificiellement, la dexmedetomidine a également montré son efficacité sous réserve d’une augmentation des doses par rapport aux patients en période postopératoire. [24]

Son utilisation au-delà de 24 h n’est pas recommandée et son introduction récente mérite encore d’être évaluée en réanimation.

Étomidate

C’est l’hypnotique actuellement recommandé en réanimation préhospitalière et médecine d’urgence, [25] notamment pour l’intubation en séquence rapide (associé à la succinylcholine).

• Sur le plan hémodynamique, il procure une stabilité chez le sujet normal et chez l’insuffisant cardiaque. Il n’a pas d’effet sur les circulations pulmonaires.

• Sur le plan respiratoire, il est à l’origine d’une dépression ventilatoire minime avec une diminution de la réponse ventilatoire au CO2 et augmentation de la PaCO2 d’environ 10 %.

• L’étomidate bloque la production de cortisol et d’aldostérone entraînant une insuffisance surrénalienne délétère en milieu de réanimation où l’administration prolongée d’étomidate est déconseillée.

Halogénés:Les halogénés sont des agents volatils, intéressants pour leurs propriétés bronchodilatatrices (état de mal asthmatique), mais difficiles à manier dans le contexte de la réanimation. Ils sont à l’origine d’une diminution de la pression artérielle, possèdent tous des effets inotropes négatifs dose-dépendants, dépriment le baroréflexe et, sur le plan respiratoire, sont à l’origine d’une dépression respiratoire avec diminution du volume courant et de la fréquence respiratoire.


L’enflurane, comme le fluothane, est bradycardisant par action parasympathique alors que l’isoflurane est tachycardisant.

Le desflurane a récemment été évalué et comparé dans ce contexte au propofol par Meiser et al. qui démontrent la supériorité du desflurane par rapport au propofol pour la sédation postopératoire de courte durée. [26] Le temps d’extubation était plus court et plus prévisible dans le groupe desflurane que dans le groupe propofol, avec un réveil de meilleure qualité en termes de récupération des fonctions cognitives.

Objectif : analgésie

Morphine et morphinomimétiques

Ce sont les médicaments de référence pour le traitement de la douleur. Ils peuvent être utilisés par voie systémique intraveineuse ou par voie périmédullaire.

Ils abaissent les dépenses énergétiques selon un mode dose-dépendant par diminution de la consommation d’oxygène ; un rôle propre de la morphine au niveau tissulaire a été également évoqué. [27] Ils entraînent une meilleure tolérance de la sonde d’intubation et des aspirations trachéobronchiques.


Les morphiniques ont des effets cardiovasculaires modérés, mais plus marqués pour la morphine que pour les dérivés morphiniques. Ils sont dépendants de la dose et de la vitesse d’injection. La morphine entraîne une hypotension d’origine multifactorielle :

• réduction du tonus sympathique ;

• augmentation du tonus vagal parasympathique ;

• histaminolibération à l’origine d’une vasodilatation artérielle et veineuse. Cette libération d’histamine est associée à une augmentation de l’index cardiaque et à une diminution de la pression artérielle et des résistances vasculaires. Cette hypotension est moins fréquente avec le fentanyl, l’alfentanil ou le sufentanil, ce dernier étant beaucoup plus puissant et moins histaminolibérateur ;

• bradycardie plus marquée chez le sujet endormi qu’éveillé et dépendante de la dose et de la vitesse d’injection. Cette bradycardie est due à une stimulation vagale centrale. La morphine a un effet direct sur le noeud sino-auriculaire et sur la conduction auriculoventriculaire,

mais elle peut augmenter la fréquence cardiaque par histaminolibération. En revanche, le baroréflexe est conservé.

Les morphiniques entraînent une dépression respiratoire avec diminution de la sensibilité des centres respiratoires aux stimuli hypoxique et hypercapnique. Les molécules utilisées sont des agonistes purs (morphine, fentanyl, sufentanil, alfentanil) dont les demi-vies d’élimination sont très variables d’un produit à l’autre (T1/2 fentanyl : 2 à 4 h, T1/2 sufentanil : 2 à 3 h, T1/2 alfentanil : 1 à 2 h).

Le sufentanil utilisé pour des sédations longues a récemment été évalué dans un contexte de réanimation chirurgicale chez des patients requérant une ventilation mécanique de plus de six jours. [28]

Malgré une augmentation du volume de distribution et de la demi-vie d’élimination, le sufentanil autorise à son arrêt une réversibilité rapide de la sédation (distribution et élimination rapides, même après plusieurs jours de perfusion).Le rémifentanil est un morphinique métabolisé par des estérases plasmatiques aspécifiques et dont la demi-vie n’est que de quelques minutes (utilisation en perfusion continue). Sa durée d’action (30 min) à peine supérieure à l’arrêt de la perfusion continue, sans accumulation, le rend particulièrement maniable en réanimation. Le principal métabolite, à élimination rénale, est très peu actif, le rendant d’un emploi intéressant en cas d’insuffisance rénale. En revanche, un relais analgésique doit lui être associé pour lutter contre l’hyperalgésie induite à l’arrêt de la perfusion. [29]

Kétamine

 La kétamine est

intéressante pour sa durée d’action brève et ses propriétés analgésiantes superficielles. Néanmoins, elle présente des effets secondaires qui en limitent l’emploi.

Sur le plan hémodynamique :

• elle est à l’origine d’une augmentation de la pression artérielle, de la pression de l’artère pulmonaire, du débit cardiaque, des résistances vasculaires systémiques et pulmonaires, de la fréquence cardiaque par un effet sympathomimétique direct. Son action sur l’inotropisme est dose-dépendante : à faible dose, la kétamine a un effet inotrope positif avec augmentation du travail cardiaque et de la consommation en oxygène, mais elle a aussi un effet vasodilatateur coronaire préservant le rapport demande/apport d’oxygène ;

• à fortes doses, la kétamine a un effet inotrope négatif par altération de la fonction du réticulum sarcoplasmique.

Elle n’entraîne pas d’altération du baroréflexe. Sur le plan respiratoire, elle entraîne une dépression minime.

Elle possède des propriétés bronchodilatatrices, intéressantes chez l’asthmatique.

Sur le plan neurologique, la kétamine n’augmente pas la pression intracrânienne et maintient une pression de perfusion cérébrale, la rendant utilisable chez le traumatisé crânien. [30]

Protoxyde d’azote

En mélange équimolaire avec l’oxygène (Kalinox®), le protoxyde d’azote est l’agent de choix pour les actes douloureux de durée brève. Il s’administre par inhalation, au masque. Il est contre-indiqué chez les traumatisés crâniens avec perte de connaissance (effet controversé sur la pression intracrânienne) et chez les patients atteints de pneumothorax ou de bulles d’emphysème (augmentation du volume gazeux).

Objectif myorelaxation : les curares

Les curares agissent en bloquant la transmission synaptique neuromusculaire et en entraînant une myorelaxation. Les curares sont des compléments de la sédation et ils ne peuvent être utilisés qu’en association avec des hypnotiques, des benzodiazépines et/ou des morphinomimétiques.Grâce à l’abolition de toute activité musculaire et à l’augmentation de la compliance thoracopulmonaire, ils permettent d’adapter le patient au respirateur et de limiter le risque de « barovolotraumatisme ». L’adjonction de curares à une sédation permet de réduire les doses de sédatifs, mais cet avantage n’est pas suffisant à lui seul pour étendre leur emploi ; les indications des curares sont de plus en plus restreintes, notamment en raison des effets secondaires de la curarisation prolongée (neuromyopathie de réanimation en particulier).

Les curares sont principalement utilisés dans le syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA) et l’état de mal asthmatique.

L’approfondissement de la sédation doit permettre d’éviter le plus souvent possible leur utilisation.

Les curares vont permettre :

• une adaptation complète au respirateur par abolition de toute activité musculaire en augmentant la compliance thoracopulmonaire ;

• une diminution des pressions d’insufflation ;

• une diminution de la consommation d’oxygène par arrêt de l’activité musculaire ;

• une amélioration des échanges gazeux.

Les curares non dépolarisants sont les seuls adaptés à une sédation de longue durée, qu’il s’agisse du pancuronium, du vécuronium, de l’atracurium ou du cisatracurium. Cependant leurs effets cardiovasculaires sont différents :

• le pancuronium est à l’origine d’une augmentation de la fréquence cardiaque, de la pression artérielle et du débit cardiaque sans modification des résistances par effet sympathomimétique indirect et effet vagolytique ;

• le vécuronium a des effets cardiovasculaires minimes. Il peut être à l’origine d’une bradycardie, d’une diminution de la pression artérielle et de l’index cardiaque s’il est associé aux anesthésiques et analgésiques ;

• l’atracurium présente l’avantage de pouvoir être utilisé en cas d’insuffisance rénale et hépatique, mais il peut entraîner une hypotension par histaminolibération ;

• le cisatracurium est un isomère de l’atracurium, métabolisé principalement par la voie de Hoffmann. Il est environ cinq fois plus puissant que l’atracurium et, à dose curarisante équivalente, la production de laudanosine est inférieure à celle induite par l’atracurium. Son utilisation en sédation de réanimation a été validée. [31]

Les curares dépolarisants (succinylcholine) ont une durée d’action brève, de l’ordre de 5 à 10 minutes.

Ils sont dégradés par les cholinestérases plasmatiques.L’injection intraveineuse est rapidement suivie de fasciculations, parfois très importantes, puis d’une béance de la glotte, ce qui facilite l’intubation si l’exposition de la glotte est aisée.

Ils sont actuellement recommandés pour l’intubation en séquence rapide (crash induction).

Les curares sont connus comme susceptibles d’entraîner des réactions allergiques.La fréquence des accidents graves, évaluée à 1/6500 anesthésies, [32]

est vraisemblablement sous-estimée en réanimation et encore plus en médecine d’urgence.

Les mécanismes immunoallergiques sont de type réaction antigèneanticorps et sont responsables de 75 % des réactions allergiques ; [33] les 25 % restants correspondent à une libération non spécifique d’histamine. L’antigène en cause est un ion ammonium quaternaire présent dans tous les curares expliquantla grande majorité des réactions croisées.

 


Retour à l'accueil
Partager cet article
Repost0
Pour être informé des derniers articles, inscrivez vous :
Commenter cet article