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23 décembre 2010 4 23 /12 /décembre /2010 09:34

 

 

Particularités de la chirurgie hépatique chez le cirrhotique

 

 

 

Les résections hépatiques sont désormais fréquemment effectuées chez des patients cirrhotiques, en raison de la fréquence élevée de survenue d’hépatocarcinome sur foie cirrhotique. Cette pathologie impose une évaluation et une prise en charge très spécialisées des différentes pathologies liées à la cirrhose.

Les points particuliers développés ici sont également importants à considérer avant une TH.


 

ANOMALIES HÉMODYNAMIQUES

La cirrhose entraîne une vasodilatation artériolaire, responsable d’une baisse importante des RVS et une augmentation du DC. La baisse des RVS est directement liée à la gravité de la cirrhose . La PAM est normale ou modérément abaissée, mais on observe une inversion du rythme circadien normal, avec une PAM plus basse le jour que la nuit. [66] Ces anomalies vasculaires sont liées à une altération des systèmes de régulation, notamment un déséquilibre entre substances vasodilatatrices et vasoconstrictrices, favorisant un tonus vasodilatateur. Il existe une altération précoce de la fonction endothéliale, dont témoigne une élévation des taux d’endothéline, et une production accrue de NO un peu plus tardive et corrélée à la sévérité de la cirrhose. [77]

L’effet vasodilatateur du NO entraîne à son tour une activation chronique des systèmes sympathique et rénine-angiotensine (SRA). Celle-ci permet de limiter en partie la vasodilatation artériolaire, mais a un retentissement direct sur la vascularisation de certains organescibles et est responsable de différents syndromes associés à la cirrhose, tels que les syndromes hépatorénal et hépatopulmonaire, l’hypertension portopulmonaire, la dysfonction neurovégétative, et certains troubles de l’hémostase. 


Dysfonction neurovégétative

La dysautonomie neurovégétative est définie par une diminution de la réponse réflexe lors de stimulations cardiovasculaires. [83] La réponse à une stimulation nociceptive, à une manoeuvre de Valsalva ou à la vasodilatation réflexe (par exemple lors de tests de calcul mental) est diminuée.


 

Sa prévalence est de 70 % chez le cirrhotique, toutes causes confondues, ce qui justifie une recherche systématique en préopératoire par les tests cliniques simples suivants :

– absence ou faible variation de la fréquence cardiaque lors de la manoeuvre de Valsalva 

– chute de la PA de plus de 15 %, 60 secondes après un lever rapide.


Cependant, ces signes ont une mauvaise sensibilité et des tests plus complexes, difficiles à obtenir en routine, tels que l’analyse de la variabilité de l’espace R-R, sont nécessaires pour confirmer le diagnostic. [68] La dysfonction du SNA paraît liée à des facteurs humoraux, sans atteinte histologique des structures nerveuses. Une interaction entre le système rénine-angiotensine (dont l’activité est augmentée) et le système parasympathique (dont l’activité est inhibée, à un niveau à la fois central direct et périphérique) a été suggérée. Cette hypothèse est renforcée par l’amélioration de la réactivité vasculaire chez les cirrhotiques, sans altération de la PA par l’administration d’un inhibiteur de l’enzyme de conversion. [42]


La dysautonomie expose à une plus grande instabilité hémodynamique peropératoire, à une moins bonne tolérance des variations volémiques, et à une moindre réactivité aux catécholamines. Le traitement est uniquement symptomatique, adapté aux modifications hémodynamiques observées.


Syndrome hépatorénal (SHR)

Définition

Le SHR est défini par l’association de :

– une insuffisance rénale (créatininémie > 150 μmol/l ou clairance de la créatinine < 40 ml/min) ;

– une insuffisance hépatique sévère, secondaire le plus souvent à une cirrhose, mais aussi parfois à une insuffisance hépatique aiguë ;

– l’absence d’arguments clinique, biologique, histologique en faveur d’une autre cause d’insuffisance rénale (choc, sepsis, diurétiques, néphrotoxiques, déshydratation) ;

– et l’absence d’amélioration après correction d’une hypovolémie (suppression des diurétiques administrés pour l’ascite et expansion volémique de 1 500 ml). C’est une affection fréquente, présente chez 20 % des cirrhotiques ascitiques. [8] La survenue d’un SHR est favorisée par une excrétion sodée et une osmolalité plasmatique basses, une PA basse, la présence de VO et une dénutrition.


Physiopathologie

Le SHR est dû à une vasoconstriction excessive de la circulation rénale, d’origine humorale. Lors du développement de l’ascite, la vasodilatation splanchnique majeure entraîne une activation des systèmes vasoconstricteurs (SRA, hormone antidiurétique, endothéline), lesquels entraînent à leur tour une production accrue de substances vasodilatatrices (PG, NO), maintenant dans un premier temps la fonction rénale. Le SHR est secondaire à un déséquilibre entre les mécanismes vasodilatateurs et vasoconstricteurs conduisant à une vasoconstriction rénale chronique. Le rôle de l’endothéline paraît important, car la fonction rénale peut être corrigée par les antagonistes des récepteurs à l’endothéline. Le rôle bénéfique des PG vasodilatatrices explique que les AINS soient contre-indiqués chez ces patients.


Symptomatologie clinique

On distingue deux types de SHR, de pronostic très différent. Dans le SHR de type I, la fonction rénale se dégrade de façon rapide, en quelques semaines, avec oligurie, hyponatrémie et hyperkaliémie.


Elle survient dans la moitié des cas après un événement déclenchant (infection du liquide d’ascite, ponction d’ascite non compensée, chirurgie) et le pronostic est très sombre.


Le SHR de type II se traduit par une diminution stable et modérée de la filtration glomérulaire et de la fonction rénale, parallèle à l’évolution de la maladie hépatique. La survenue d’un SHR de type II est un facteur de mauvais pronostic, la survie des patients étant inférieure, à classe de Child égale, à celle de cirrhotiques sans atteinte rénale.


 

Aucun traitement n’a fait la preuve de son efficacité sur la mortalité du SHR, bien que le transjugular intrahepatic porto-systemic stent shunt (TIPSS) soit en cours d’évaluation. La dialyse n’est pas retenue actuellement comme alternative thérapeutique.

Des travaux sont en cours pour évaluer l’efficacité de la correction de l’hypervasodilatation splanchnique. L’ornipressine, un analogue de l’antidiuretic hormone (ADH), associée à un remplissage par albumine guidé par le taux de rénine plasmatique, permet de normaliser la créatinine, mais ce traitement est mal toléré, 50 % des patients ayant dû interrompre le traitement pour des complications ischémiques, myocardiques ou splanchniques. [63]


Le traitement curatif du SHR de type II est la TH, qui permet de normaliser la fonction rénale dans la grande majorité des cas. La TH n’est en revanche pas un traitement du SHR de type I car la dégradation est trop rapide par rapport aux délais d’obtention d’un greffon.


Syndrome hépatopulmonaire (SHP)

Définition

Le SHP est défini par l’association :

– d’une hépatopathie avec HTP (cirrhose, HTP sans cirrhose, hépatite fulminante) ;

– d’une hypoxémie de repos (pression partielle en oxygène dans le sang artériel [PaO2] < 70 mmHg [ou saturation en oxygène dans le sang artériel, SaO2 < 92 %]) avec orthéodoxie et élargissement du gradient alvéolocapillaire (> 20 mmHg) ;

– d’une vasodilatation intrapulmonaire. [25]

L’orthéodoxie est définie par une aggravation de l’hypoxémie de plus de 10 % lorsque le patient passe de la position couchée à la position debout. Un hippocratisme digital et une élévation marquée du DC avec effondrement des RVS sont fréquents, mais ces éléments ne sont pas nécessaires au diagnostic. [75]


Le SHP survient après plusieurs années d’évolution d’HTP et il est présent chez 10 à 15 % des cirrhotiques graves. Il doit être recherché de manière systématique, mais le SHP n’est pas la seule cause d’hypoxémie, présente chez 50 % des cirrhotiques graves (Child C).

Ce syndrome est un signe de gravité important, et la survie moyenne à partir du diagnostic est inférieure à 3 ans. [74]


Physiopathologie

L’hypoxémie est due à une combinaison d’effet shunt et de shunt vrai. [27] L’effet shunt est lié à la vasodilatation pulmonaire capillaire et précapillaire, qui entraîne un trouble de la diffusion d’O2 vers les hématies circulant au centre des vaisseaux dilatés. Cette altération est aggravée par l’augmentation du DC  et par la position debout qui accentue l’accumulation de sang aux bases pulmonaires, siège préférentiel des dilatations vasculaires. Il existe d’autre part une altération de la vasoconstriction hypoxique pulmonaire, qui permet normalement de redistribuer le flux sanguin dans les zones les mieux ventilées. [37]


Le shunt intrapulmonaire, responsable d’une hypoxémie non modifiée par l’inhalation d’O2 pur, est le stade ultime de la vasodilatation capillaire. Il peut aussi être lié à des anastomoses entre la circulation artérielle pulmonaire et les veines pulmonaires (spidernevi des Anglo-Saxons), ou des anastomoses pleuropulmonaires, pleurohilaires, portopulmonaires, voire périoesophagiennes. Il faut noter cependant que le rôle de ces shunts extrapulmonaires dans l’hypoxémie est probablement faible. [74]


Le traitement par bêtabloquant, proposé dans l’HTP, peut aggraver le SHP, en augmentant la PAP, en majorant le shunt et en favorisant l’ouverture d’un foramen ovale perméable. [102] Le SHP représente donc une contre-indication relative à ce traitement.

Le SHP est rattaché à un trouble de métabolisme du NO. [104] Sur un modèle expérimental de cirrhose chez le rat, il existe une augmentation de l’acide ribonucléique messager (ARNm) de la NO synthase. D’autre part, les artères pulmonaires ont une activité NO synthase augmentée et une réactivité aux catécholamines diminuée, mais restaurée après administration de bloqueurs de la NO synthase. Chez l’homme, on a mis en évidence des niveaux de NO expiré supérieurs à la normale chez le cirrhotique sévère avec syndrome hyperkinétique associé ou non à un SHP. [116]


L’administration de bleu de méthylène, inhibiteur de la NO synthase, a pu corriger transitoirement l’hypoxie du SHP. [106] Par ailleurs, l’augmentation des taux expirés de NO et du shunt pulmonaire chez le cirrhotique diminue après TH. [105]


Symptomatologie clinique

Un SHP doit être recherché systématiquement chez tout cirrhotique grave par la mesure des gaz du sang, couché et debout. Dans le SHP de type 1, le mécanisme prédominant est un effet shunt, et un shunt vrai dans le SHP de type 2. La radiographie de thorax ne montre pas d’anomalie spécifique. La quantification du shunt peut être faite par échocardiographie de contraste ou par scintigraphie à l’albumine marquée. Un SHP grave est défini par un shunt supérieur à 40 %. Le pronostic vital est mis en jeu à moyen terme par l’existence d’un SHP symptomatique.


Dans ces formes sévères, une malformation artérioveineuse suffisamment importante pour justifier une embolisation doit être recherchée. Elle peut être suspectée cliniquement en montrant l’absence de remontée de la PaO2 au-delà de 100 mmHg lors de l’inhalation d’oxygène pur et confirmée par angiographie. Le SHP sévère ne peut être corrigé durablement que par la TH. [9]


Prise en charge périopératoire de l’hypoxie du SHP

Le risque d’une aggravation brutale de l’hypoxie lors de la chirurgie hépatique est important lors de la reperfusion du foie (hépatectomie simple mais surtout TH) car les médiateurs vasodilatateurs libérés aggravent l’effet shunt et le shunt.


L’inhalation de NO a été proposée dans certains cas d’hypoxie menaçante. [104] Cependant, son effet peut être délétère ou bénéfique selon que le shunt ou l’effet shunt est prédominant. Dans l’effet shunt, l’hypoxie diminue sous NO car il permet de redistribuer le flux sanguin vers les zones bien ventilées. Dans le cas d’un shunt vrai, non corrigé par une optimisation du rapport Va/Q, le NO en entraînant une vasodilatation globale du réseau pulmonaire, aggrave l’hypoxie. Il faut donc faire un test thérapeutique en administrant le NO à une concentration de 20 à 40 ppm. Il doit être arrêté immédiatement si une aggravation de l’hypoxie est observée. [27]


Hypertension portopulmonaire (HPP)

Définition

L’HPP est définie par l’association d’une cirrhose, d’une PAP moyenne (PAPm) supérieure à 25 mmHg, et de résistances vasculaires pulmonaires élevées (RVP > 120 dyn s–1 cm–5). Elle doit être distinguée de l’élévation plus modérée de la PAPm observée dans le SHP et liée à la simple élévation du DC avec des RVP normales. [81]

On définit trois stades évolutifs dans l’HPP :

– modéré : 25 < PAPm < 35 mmHg ;– moyen : 35 < PAPm < 45 mmHg ;

– sévère : PAPm > 45 mmHg.

C’est une complication tardive et grave de la cirrhose, qui concerne 5 à 10 % des patients en attente de TH. Les lésions histologiques artérielles pulmonaires sont non spécifiques et irréversibles. Des signes d’insuffisance cardiaque droite (septum paradoxal puis chute de l’index cardiaque) apparaissent au cours de l’évolution de la maladie, et le pronostic est alors très péjoratif, proche de celui de l’HTAP primitive.


Symptomatologie clinique

L’HPP doit être recherchée systématiquement dans la cirrhose grave (notamment les cirrhoses biliaires primitives) car 60 % des patients sont asymptomatiques. Les patients symptomatiques présentent une dyspnée d’effort, puis de repos, et parfois des douleurs thoraciques.

La survenue de syncopes est évocatrice de la forme grave des HPP.

L’auscultation peut retrouver un dédoublement du B2 au foyer pulmonaire. L’échocardiographie transthoracique permet d’évaluer la PAP de façon indirecte et de rechercher l’existence des signes de gravité, tels que le septum paradoxal. Elle permet également d’éliminer une autre valvulopathie responsable d’HTAP secondaire.

Une confirmation du diagnostic par un cathétérisme cardiaque droit est indispensable, afin de mesurer la PAPm et les RVP. La réversibilité de l’HTAP par l’inhalation de NO (20 ppm) dans un masque facial à haute concentration doit être recherchée pendant le cathétérisme ; en effet, elle refléterait la réponse aux vasodilatateurs au long cours. L’action du NO est immédiate et la dose peut être augmentée jusqu’à 40 ppm. [84] Lors de l’aggravation de l’HTAP, il existe un risque d’ouverture d’un foramen ovale persistant qui peut être détectée par une épreuve aux bulles à l’ETO.


Traitement

Le traitement repose sur l’administration de vasodilatateurs au long cours et requiert une prise en charge par une équipe spécialisée dans l’HTAP primitive. Les inhibiteurs calciques, les PG de type PGI2 (Iloprostt) par voie intraveineuse ou inhalée, sont efficaces dans l’HTAP primitive sur l’oxygénation, la dyspnée, la qualité de vie, et la survie et sont en cours d’évaluation dans l’HPP. [67] Les PG au long cours peuvent faire régresser en partie l’HTAP, mais ces traitements n’ont qu’un effet symptomatique et ne stoppent pas l’évolutivité de la maladie. [98] De plus, 15 à 30 % des patients sont non répondeurs, les effets secondaires (essentiellement l’hypotension artérielle par action vasodilatatrice périphérique) imposent parfois d’arrêter le traitement.


Contrairement au SHP, la TH ne guérit pas l’HPP sévère, probablement parce que l’HTAP y est alors fixée. [101] Aujourd’hui encore, l’HTAP sévère reste donc une contre-indication à la greffe, en raison du risque de poussée d’HTAP à la reperfusion avec inefficacité circulatoire, et de l’évolutivité de la maladie pulmonaire avec une espérance de vie postgreffe courte. [26, 57, 76] Le contrôle peropératoire de l’HTAP repose sur le NO, la PGI2 par voie veineuse (Iloprostt, 2 à 10 ng.kg.min-1) ou inhalée. [51, 85] Parallèlement, l’objectif est de maintenir une PAM supérieure à la PAPm avec des agonistes adrénergiques, afin de préserver la perfusion coronaire droite et d’éviter l’ischémie du ventricule droit. En peropératoire, une surveillance par cathéter de Swan-Ganz ou ETO permet de détecter les signes d’insuffisance ventriculaire droite aiguë.


Il faut noter que SHP et HPP ne sont pas mutuellement exclusifs mais pourraient correspondre à deux états possibles de la maladie pulmonaire du cirrhotique liée aux dysrégulations de sécrétion de médiateurs vasotoniques. Il a été suggéré que selon la balance globale plutôt vasodilatatrice ou plutôt vasoconstrictrice des médiateurs non épurés du fait de la cirrhose, le tonus évoluerait plutôt vers le SHP ou l’HPP.


ANOMALIES DE L’HÉMOSTASE

L’altération de l’hémostase chez le cirrhotique est un facteur de gravité de la maladie, (la baisse du taux de prothrombine [TP] étant un des paramètres du score de Child et Pugh) (Tableau 4) et favorise le saignement. La baisse des facteurs de coagulation ne résume pas les anomalies de l’hémostase, et certains troubles de mécanismes complexes en partie liés à la dysfonction endothéliale sont générateurs de phénomènes thromboemboliques. [50, 77] De façon schématique, on peut distinguer :

– la baisse de la synthèse hépatique des facteurs II, V, VII (baisse précoce dans l’évolution de la maladie) et X, responsable d’un allongement des tests de coagulation globaux (TP et international normalized ratio [INR] notamment) ;

– les anomalies de l’hémostase primaire, fréquentes et secondaires à la thrombopénie de l’hypersplénisme, à des anomalies des fonctions plaquettaires (toxicité de l’alcool) et à l’action de substances circulantes dans le plasma (surproduction de NO diminuant l’adhésion plaquettaire). [4] La concentration de facteur von Willebrand (vWF) est corrélée à la sévérité de la maladie hépatique et peut être utilisée comme index de dysfonction endothéliale ; [3]

– la fibrinolyse chronique correspond à un déséquilibre entre activateurs (tPA) et inhibiteurs (PAI) physiologiques de la fibrinolyse dont la sécrétion par l’endothélium est altérée par la cirrhose. On observe une stimulation des activateurs, associée à une diminution du taux des principaux inhibiteurs (PAI, alpha2-antiplasmine). Le temps de lyse des euglobulines est diminué, ainsi que le temps de thrombine et le fibrinogène ; les produits de dégradation de la fibrine (PDF) sont augmentés ; enfin le taux d’antithrombine III (ATIII) est abaissé. L’utilisation de l’aprotinine est à discuter chez le cirrhotique sévère lorsqu’il existe une hyperfibrinolyse. De plus, en diminuant la bradykinine, substance vasodilatatrice, elle limite l’instabilité hémodynamique après reperfusion lors des TH.


La surexpression du vWF, qui permet l’adhésion plaquettaire, est fréquente chez le cirrhotique. Un tiers des cirrhotiques aurait ainsi des taux élevés d’antigène de vWF. [50]


L’administration de concentrés de facteur VII recombinant (rVIIF) chez le cirrhotique a permis de corriger pendant plusieurs heures le TP et l’hémostase primaire, sans effet secondaire notable. [96]

 L’utilisation de ce facteur pourrait être un nouveau traitement prometteur en prévention de saignements lors de gestes invasifs. Ce traitement reste cependant à évaluer.


ÉVALUATION DU RISQUE CHEZ LE CIRRHOTIQUE

La cirrhose est un facteur de risque important de morbidité périopératoire en raison de son retentissement sur de nombreuses fonctions : – hémostase (défaut de synthèse des facteurs, coagulation intravasculaire disséminée [CIVD], altération des fonctions plaquettaires et de la fibrinolyse) ;

– fonction respiratoire (ascite créant un syndrome restrictif et des atélectasies, épanchement pleural transsudatif (« ascite pleurale »), dénutrition à l’origine de trouble de la fonction diaphragmatique) ;

– mauvaise adaptabilité cardiovasculaire (dysautonomie végétative).

La consultation d’anesthésie est donc une étape fondamentale pour ces malades, permettant de rechercher les pathologies pouvant poser problème (Tableau 5).


La mortalité après hépatectomies varie de 0 % à 20 % selon les séries. [49, 90] Cette variabilité est expliquée par des différences dans la gravité de la cirrhose, la taille de la tumeur, et le geste chirurgical, mais est parfois mal précisée dans les études rendant les comparaisons difficiles.

Les résections hépatiques majeures (plus de trois segments) sont pour beaucoup d’équipes contre-indiquées chez les cirrhoses Child C, et déconseillées chez les grades A et B. Or, ce sont les patients chez qui l’indication se discute fréquemment, car ils présentent un terrain à risque de survenue de carcinome. De nombreuses études ont cherché à identifier, au sein de cette population de cirrhotiques, les patients pouvant bénéficier d’une chirurgie avec un risque acceptable. La limite de foie résécable, habituellement fixée à 75 % pour le parenchyme sain, est réduite chez le cirrhotique. Si la résection est trop importante, il existe un risque d’insuffisance hépatocellulaire aiguë avec poussée d’ascite et/ou d’HTP aiguë avec rupture de VO ou gastrite par augmentation transitoire du bloc intrahépatique. Il faut noter que, après certaines chimiothérapies (par exemple pour métastases de cancer colique), la capacité fonctionnelle hépatique se rapproche de celle du foie cirrhotique. Il est donc important chez ces patients d’apprécier la qualité du parenchyme hépatique pour en déduire la masse maximale résécable. La mesure de la clairance du vert d’indocyanine, substance épurée par le foie, est utilisée par beaucoup d’auteurs pour apprécier les réserves fonctionnelles hépatiques (valeur normale : rétention < 10 % à 15 min). [18]


Le bénéfice sur la cytolyse postopératoire et la morbimortalité périopératoire du clampage intermittent est net chez le cirrhotique, puisque l’insuffisance hépatique aiguë postopératoire était de 10 % et la mortalité de 5 % lors d’un clampage continu, et nulle avec un clampage intermittent. [13]


Le temps de clampage total doit être réduit à 60 ou 90 minutes, car le risque d’entraîner des phénomènes d’ischémie-reperfusion symptomatiques ou une cytolyse hépatique postopératoire avec insuffisance hépatocellulaire est augmenté.


L’incidence des complications chez le cirrhotique est de 25 % à 70 % selon les études. Les complications les plus fréquentes sont l’insuffisance hépatocellulaire postopératoire avec ascite, les complications pulmonaires, l’insuffisance rénale et les hémorragies digestives hautes. Le risque de complications dépend du volume hépatique et de la sévérité de la cirrhose. [49, 90]


Le risque de complications peut être réduit par la correction de la dénutrition par nutrition entérale, débutée en préopératoire, et poursuivie en postopératoire. [48] En effet, il est prouvé que la dénutrition chez le cirrhotique augmente le taux de complications respiratoires, probablement en partie par son retentissement sur la fonction diaphragmatique. D’autre part, il est nécessaire de respecter les contre-indications formelles à l’hépatectomie, que sont l’ascite non contrôlée, l’infection du liquide d’ascite, l’encéphalopathie hépatique et la dénutrition avancée.


SCORES PRONOSTIQUES CHEZ LE CIRRHOTIQUE

Plusieurs outils ont été développés afin de prédire le risque d’une intervention chez le cirrhotique. Ainsi la classification de Child, largement utilisée pour évaluer la gravité globale de l’état d’un cirrhotique, est au départ un indice de prédiction du risque de dérivation portosystémique chirurgicale. Mais cette classification a fait ses preuves quant à la prédiction de la survie elle-même. De plus, sa simplicité de calcul, permettant sa détermination rapide au lit du malade, justifie que cet outil soit universellement utilisé pour classer le risque périopératoire.


Plus récemment a été développé le score model for end-stage liver disease (MELD), dont les composantes ont été identifiées par modélisation de la mortalité à 3 mois sur une cohorte de cirrhotiques. [72] Il prend en compte le logarithme népérien (ln) de la bilirubine et de la créatinine et l’INR, selon la formule suivante : MELD 3,8 × ln bili mg/dl+ 11,2 × ln INR+ 9,6 × ln créatinine mg/dl + 6,4 × étiologie où l’étiologie = 0 si origine cholestatique ou alcoolique et 1 dans les autres cas.


Ce score a l’avantage d’avoir été validé secondairement sur une importante cohorte de cirrhotiques européens, toutes causes confondues, et permet de prédire le risque de décès à 3 mois (Tableau 6). Malgré sa complexité, le rendant plus difficile à utiliser en pratique clinique quotidienne que le score de Child, il présente l’avantage de pouvoir être calculé précisément et de ne pas avoir de composante subjective, ou susceptible de varier selon les normes du laboratoire. Par ailleurs, ce score est valable quelle que soit la gravité de la cirrhose et il a été proposé qu’il soit utilisé comme outil d’attribution des greffons hépatiques, au lieu de la simple inscription sur la liste habituellement retenue comme critère principal. [33]


AUTRES INTERVENTIONS CHEZ LE CIRRHOTIQUE

Shunt portosystémique intrahépatique (TIPSS)

Les shunts portocaves chirurgicaux, réalisés pour réduire les complications hémorragiques de l’HTP, sont associés à un taux important d’encéphalopathie et d’insuffisance hépatique. Après une première expérience utilisant un abord percutané, une alternative consistant à établir une communication entre la veine porte et les veines sus-hépatiques par voie transjugulaire (TIPSS) non chirurgicale a été développée. [30, 103] Le shunt, réalisé dans le parenchyme hépatique et maintenu ouvert par un stent métallique, diminue l’HTP et les varices oesophagiennes et portosystémiques et fait régresser l’ascite.


Les principales indications sont les hémorragies digestives par rupture de VO, l’ascite réfractaire, le SHR et le syndrome de Budd-Chiari.


Il s’agit d’une technique dont la morbidité et la mortalité restent importantes. La mortalité est respectivement de 4, 11 et 25 % pour les patients classés Child A, B et C et est majorée en cas d’intervention en urgence. Les principales complications sont l’encéphalopathie (18-30 %), l’insuffisance hépatique (10-25 %) et l’occlusion du shunt (10 % par an). Au moment de la réalisation du geste, il existe un risque de ponction de la capsule ou de l’artère hépatique, responsable d’une hémorragie aiguë ou d’une lésion d’une voie biliaire.


Ce geste, réalisé en radiologie interventionnelle, peut être effectué sous anesthésie locale, mais la durée parfois prolongée de la procédure, le terrain (estomac plein, sensibilité aux morphiniques), la douleur lors de la dilatation intrahépatique et la possibilité de complications peropératoires rendent une anesthésie générale souvent nécessaire. La mise en place du TIPSS entraîne une augmentation du retour veineux avec majoration de 10 à 20 % du DC et expose à un risque d’oedème pulmonaire. Une surveillance par cathéter de Swan-Ganz peut être indiquée chez les patients ayant une dysfonction cardiaque sévère.


L’analgésie au décours de la procédure fait appel aux morphiniques.

Une surveillance prolongée en soins intensifs peut être recommandée durant 24 à 48 heures. Dans les suites, une surveillance radiologique régulière de la perméabilité du shunt s’impose.


Valve de Leveen

Il s’agit d’une dérivation péritonéojugulaire comportant une valve baroactive unidirectionnelle placée en sous-cutané, permettant le passage du liquide d’ascite dans le compartiment vasculaire. Elle est indiquée dans les ascites « réfractaires », sans insuffisance hépatocellulaire sévère et sans antécédent d’hémorragie variqueuse, mais la morbidité et la mortalité importantes qu’elle comporte limitent ses indications. Il est capital de s’assurer de l’absence d’infection du liquide d’ascite (taux de polynucléaires < 100/mm3).


Les complications peropératoires sont l’oedème pulmonaire, la CIVD (passage sanguin de substances procoagulantes contenues dans l’ascite), l’embolie gazeuse et le sepsis. L’évacuation de l’ascite et le remplacement par du sérum physiologique sont parfois utilisés pour diminuer le risque de coagulopathie. L’intervention peut être faite, selon l’état du patient, sous anesthésie locale ou générale.


L’anesthésie générale doit comporter une séquence d’induction rapide en raison de l’ascite abondante. En postopératoire immédiat, une surveillance des troubles cardiovasculaires et de l’hémostase en soins intensifs est nécessaire. À moyen terme, les mêmes risques d’infection, de dysfonction myocardique et de CIVD persistent, associés à un risque d’obstruction de la valve avec récidive de l’ascite, ou de thrombose cave. La mortalité est élevée, en rapport avec la gravité de la maladie sous-jacente.

 

 

 

 


 

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