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شكرا للزيارتكم

6 août 2014 3 06 /08 /août /2014 04:19
Taxonomie[modifier | modifier le code]
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Foyers de fièvre hémorragique Ebola de 1979 à 2008 illustrant la distribution géographique des différentes espèces virales3 :
    - virus Ebola en rouge ;
    - virus Soudan en vert ;
    - virus Forêt de Taï en orange ;
    - virus Bundibugyo en bleu.

Le virus Ebola appartient au genre Ebolavirus de la famille des filovirus, à laquelle appartient également le virus Marburg.

On connaît cinq virus distincts2,4, que l'ICTV rattache chacun à l'une des cinq espèces du genre Ebolavirus. Cependant, la taxinomie des filovirus est récente et continue d'évoluer au gré des avancées phylogénétiques, d'où une relative confusion entre les différentes dénominations retenues selon les auteurs5. Un usage bien ancré dans les laboratoires fait du virus Ebola une désignation synonyme du genre Ebolavirus décliné en cinq sous-types de virus6,7, tandis que la nomenclature adoptée par l'ICTV, faisant du virus Ebola le virus de l'espèce type du genre Ebolavirus, n'a pas encore été ratifiée.

Le nom des espèces virales validé par l'ICTV a sensiblement évolué depuis l'identification de ces virus8,9,10,11,12,13. On distingue :

  • le virus Ebola proprement dit (EBOV), de l'espèce ebolavirus Zaïre (autrefois ZEBOV), ou sous-type Ebola Zaïre, identifié pour la première fois en 1976 en République démocratique du Congo14, alors appelé Zaïre — c'est le plus virulent des cinq virus, à l'origine de l'épidémie de 2014 en Afrique de l'Ouest15 ;
  • le virus Soudan (SUDV), de l'espèce ebolavirus Soudan (autrefois SEBOV), ou sous-type Ebola Soudanendémiqueau Soudan du Sud et en Ouganda ;
  • le virus Reston (RESTV), de l'espèce ebolavirus Reston (autrefois REBOV), ou sous-type Ebola Reston, identifié en 1983 dans la région de Reston, aux États-Unis ;
  • le virus Forêt de Taï (TAFV), de l'espèce ebolavirus Forêt de Taï, autrefois ebolavirus Côte d'Ivoire (CIEBOV), ousous-type Ebola Forêt de Taï (ou encore Ebola Côte d'Ivoire), identifié en 1994 dans le parc national de Taï, en Côte d'Ivoire, aux confins de la Guinée et du Libéria ;
  • le virus Bundibugyo (BDBV), de l'espèce ebolavirus Bundibugyo (autrefois BEBOV), ou sous-type Ebola Bundibugyo, identifié en 2008 dans la région de Bundibugyo, en Ouganda.

La nature pathogène des différents filovirus, qu'il s'agisse du genre Ebolavirus ou du genre Marburgvirus, est très semblable dans la mesure où ces virus ont tous été associés à des flambées de fièvres hémorragiques chez l'homme et les autres primates avec des symptôme identiques. Ils diffèrent en revanche du point de vue génétique, avec uneséquence nucléotidique pouvant varier de 30 à 40 % d'une souche à l'autre, ce qui se traduit par une sévérité très différente entre les pathologies induites chez l'homme par ces différents virus — la létalité peut ainsi être nulle chez les humains pour le virus Reston, mais approcher 90 % pour le virus Ebola — bien que des facteurs environnementaux puissent également expliquer ces différences.

Le virus Reston a été isolé en 1989 chez des macaques crabiers aux Philippines. Présent également en Chine, il est moins pathogène chez les primates non humains et l'on pensait qu'il n'affectait pas les humains jusqu'à ce qu'on identifie une transmission du porc à l'homme en 2009.

Le virus Bundibugyo, découvert en 2008, s’apparente davantage au virus Forêt de Taï2, mais est plus virulent que ce dernier.

Structure et génome[modifier | modifier le code]

Les filovirus sont, comme leur nom l'indique, des particules virales d'apparence filaire. Ils appartiennent à l'ordre des Mononegavirales, comprenant les virus à ARNmonocaténaire non segmenté à polarité négative. Initialement classés parmi les rhabdovirus, les filovirus forment aujourd'hui une famille distincte et seraient en réalité plus proches des paramyxovirus16, parmi lesquels on trouve notamment les virus des oreillons et de la rougeole.

Le virus Ebola peut être linéaire ou ramifié, long de 0,8 à 1 μm mais pouvant atteindre 14 μm18 par concatémérisation (formation d'une particule longue par concaténation de particules plus courtes), avec un diamètre constant de 80 nm. Il possède une capsidenucléaire hélicoïdale de 20 à 30 nm de diamètre constituée de nucléoprotéines NP et VP30, elle-même enveloppée d'une matrice hélicoïdale de 40 à 50 nm de diamètre constituée de protéines VP24 et VP40 et comprenant des stries transversales de 5 nm19. Cet ensemble est à son tour enveloppé d'une membrane lipidique dans laquelle sont fichées des glycoprotéines GP.

Il possède un génome de 19 kilobases20 ayant une organisation caractéristique des filovirus21. Ce génome code neuf protéinesfonctionnelles sur sept gènes exprimés de la façon suivante22 :

Génome du virus Ebola du patient zéro au Zaïre, 197623,24
Gène Position sur
l'ARN viral
Région traduite Protéine exprimée acides aminés
Région 5'
non traduite
1 - 55
NP 56 - 3 026 470 - 2.689 Nucléoprotéine de la capside
du matériel génétique viral
739 résidus
VP35 3.032 - 4.407 3.129 - 4.151 Cofacteur de la polymérase virale,
antagoniste des interférons de type I
340 résidus
VP40 4.390 - 5.894 4.479 - 5.459 Protéine majeure de la matrice 326 résidus
GP 5.900 - 8.305 6.039 - 7.133 Glycoprotéine sécrétée (sGP) 364 résidus
6.039 - 6.923
insertion d'un A
6.923 - 8.068
Glycoprotéine transmembranaire
de l'enveloppe virale (GP)
676 résidus
6.039 - 6.923
insertion de deux A
6.923 - 6.933
Petite glycoprotéine sécrétée (ssGP) 298 résidus
VP30 8.288 - 9.740 8.509 - 9.375 Nucléoprotéine mineure,
complexée avec la polymérase
288 résidus
VP24 9.885 - 11.518 10.345 - 11.100 Protéine mineure de la matrice,
associée à l'enveloppe virale
251 résidus
L 11.501 - 18.282 11.581 - 18.219 ARN polymérase ARN-dépendante
caractéristique des mononégavirus
2.212 résidus
Région 3'
non traduite
18.283 - 18.959
Réplication[modifier | modifier le code]
220px-Ebola_virus_particles.jpg
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Microscopie électronique de virus Ebola en fausses couleurs25.

La fusion de l'enveloppe du virion avec la membrane plasmique de la cellule hôte a pour effet de libérer la capside nucléaire dans lecytoplasme de la cellule cible. L'ARN polymérase ARN-dépendante L dénude partiellement l'ARN viral et le transcrit en ARN messager à polarité positive qui sont ensuite traduits en protéines structurelles et non structurelles. L'ARN polymérase L du virus Ebola se lie à unpromoteur unique situé à l'extrémité 5' du génome viral. L'expression des gènes se déroule ensuite séquentiellement, avec une probabilité croissante de s'interrompre à mesure que la polymérase progresse le long du brin d'ARN à transcrire : le premier gène à partir du promoteur est ainsi davantage exprimé que le dernier gène à l'extrémité 3'. L'ordre des gènes sur le génome viral offre ainsi un moyen simple mais efficace de réguler leur transcription : la nucléoprotéine NP, codée par le premier gène, est ainsi produite en plus grande quantité que la polymérase L, codée par le dernier gène du virus. La concentration de cette nucléoprotéine dans le cytosol de l'hôte détermine le moment où la polymérase L bascule de la transcription — production d'ARN messager à partir de l'ARN nucléaire — vers laréplication virale — production d'antigénomes d'ARN nucléaire à polarité positive par réplication intégrale d'un ARN nucléaire original. Ces antigénomes sont à leur tour transcrits en génomes viraux d'ARN à polarité négative qui interagissent avec les protéines structurelles préalablement traduites à partir de l'ARN viral. Des particules virales s'auto-assemblent à partir des protéines et du matériel génétique nouvellement produits à proximité de la membrane cellulaire. Elles bourgeonnent hors de la cellule en se recouvrant d'une enveloppe virale issue de la membrane plasmique, où s'insèrent les glycoprotéines GP, ce qui libère de nouveaux virions prêts à infecter d'autres cellules26.

Expression de la glycoprotéine[modifier | modifier le code]

La glycoprotéine GP joue un rôle déterminant dans la virulence du virus. Elle est normalement exprimée sous forme soluble sGP de 364 résidus d'acides aminés formant unhomodimère de 110 kDa composé de deux chaînes polypeptidiques identiques parallèles maintenues ensemble par deux ponts disulfure au niveau des cystéines 53 et 30627. Le produit de la transcription du gène GP est en fait un peu plus long que la sGP fonctionnelle, laquelle résulte du clivage par une furine de la pré-sGP produite, en libérant une petite protéine non structurelle fortement O-glycosylée appelée Δ-peptide (ou peptide Δ).

Cependant, le gène GP des virus du genre Ebolavirus contient sept résidus d'adénine consécutifs formant vraisemblablement une structure en épingle à cheveux ou tige-boucleau niveau de laquelle la polymérase virale patine ou « bégaie » (on parle de polymerase stuttering) : dans environ un cas sur cinq, elle insère une adénine supplémentaire dans l'ARN messager, ce qui décale d'un nucléotide le cadre de lecture des codons par le ribosome. La protéine produite par cet ARNm modifié, la GP proprement dite, est donc différente de la sGP : ses 295 résidus N-terminaux sont identiques, mais les 312 résidus suivants, côté C-terminal, sont différents. Il s'ensuit une protéine plus longue, totalisant676 résidus (un de plus pour le virus Reston), clivée par une furine au niveau d'une région basique pour former deux sous-unités, GP1 et GP2, maintenues ensemble par un pont disulfure entre la Cys53 sur GP1 et la Cys609 sur GP2. C'est cet hétérodimère qui s'assemble en trimère de 450 kDa à la surface de la membrane lipidique des virions et permet leur pénétration dans les cellules de l'hôte à infecter.

Le patinage de la polymérase L sur l'épingle à cheveux produit également une troisième glycoprotéine, appelée ssGP, dont le rôle n'est pas connu et dont on pense qu'elle estmonomérique ; cela se produit par insertion de deux résidus d'adénine supplémentaires au niveau de la région en tige-boucle du gène GP du virus, ce qui décale cette fois dedeux nucléotides le cadre de lecture de l'ARNm par le ribosome et conduit à une protéine de 298 résidus d'acides aminés.

L'expression de plusieurs glycoprotéines par chevauchement de gènes est une caractéristique des filovirus.

Réservoirs[modifier | modifier le code]

Le réservoir naturel potentiel du virus Ebola pourrait être des chauves-souris, notamment l'espèce de la roussette d'Égypte28. Des anticorps d'ebolavirus Zaïre ont été détectés dans le sérum de trois espèces de chauves-souris frugivores tropicales : Hypsignathus monstrosus29Epomops franqueti30 et Myonycteris torquata31. Les résultats des recherches prouvent aussi la présence de séquences d’ARN viral dans le foie et la rate de ces mêmes petits mammifères volants. Le virus n'a cependant jamais été retrouvé chez ces animaux32. Cette présence démontre que ces chauves-souris sont porteuses du virus sans pour autant être malades, les désignant alors comme réservoir naturel potentiel du virus Ebola. Jusqu'à présent, on pensait que les chauves-souris contaminaient d'abord un autre animal avant que le virus n'atteigne les populations humaines. Elles peuvent cependant contaminer directement les humains. En effet, selon l'IRD, dans certaines circonstances, des chauves-souris pourraient directement transmettre Ebola à l’Homo sapiens33.

Les porcs domestiques sont sensibles aux virus Ebola (par infection des muqueuses)34. Ils développent alors une maladie respiratoire grave pouvant être confondue avec d'autres maladies respiratoires porcines, associée à une effusion de charge virale élevée dans l'environnement, exposant les porcs sains à l'infection34.

Écoépidémiologie[modifier | modifier le code]

Le cycle du virus dans la nature est encore mal connu. On sait qu'il affecte certains grands singes35 et les chauve-souris. L'hypothèse est la suivante :

  • Les chauves-souris sont porteuses saines.
  • Les chauves-souris contaminent les singes.
  • Les humains chassent en forêt, et se font contaminer, (par exemple en « mangeant de la viande de brousse contaminée »36, ou en rencontrant les singes, ou encore en mangeant des chauve-souris comme l'Hypsignathus monstrosus.

Pouvoir pathogène[modifier | modifier le code]

La période d’incubation varie de 2 à 21 jours (généralement de 5 à 12 jours). Une semaine après le début des symptômes, les virions envahissent le sang et les cellules de la personne infectée. Les cellules les plus concernées sont les monocytes, les macrophages, et les cellules dendritiques. La progression de la maladie entraîne généralement la désagrégation des organes vitaux, en particulier les reins et le foie. Ceci provoque des hémorragies internes importantes. La mort survient, peu de temps après, par choc cardio-respiratoire.

Ebola sature tous les organes et les tissus de particules virales à l’exception des os et des muscles moteurs. Il se forme d’abord de petits caillots de sang diffus dans l'ensemble des vaisseaux (coagulation intravasculaire disséminée) dont le mécanisme n'est pas clair37. Les caillots se collent ensuite aux parois des vaisseaux sanguins pour former un « pavage ». Plus l’infection progresse, plus les caillots sont nombreux, ce qui bloque les capillaires. Finalement, ils deviennent si nombreux qu’ils bloquent l’arrivée sanguine dans les divers organes du corps. Quelques parties du cerveau, du foie, des reins, des poumons, des testicules, de la peau et des intestins se nécrosent alors car elles souffrent d'un manque de sang oxygéné.

Une des particularités d’Ebola est la brutalité avec laquelle il s’attaque aux tissus conjonctifs. Il provoque aussi des taches rouges appelées pétéchies ; ce sont des hémorragies sous-cutanées. Il se multiplie dans le collagène de la structure de la peau. Les sous-couches de la peau meurent et se liquéfient ce qui provoque des bulles blanches et rouges dites maculopapulaires. À ce stade, le simple fait de toucher la peau la déchire tant elle est amollie.

Le virus provoque une réaction inflammatoire importante mais certaines protéines virales semblent inhiber l'interféron38.

Modes de transmission[modifier | modifier le code]

La transmission par contact direct avec les liquides organiques (sang, sperme, excrétions, salive) d’une personne infectée est la plus considérable de toutes. Les risques de propagation chez le personnel hospitalier sont très élevés, particulièrement si la stérilisation du matériel n’est pas assurée. Dans les zones endémiques, des manques en matière d'hygiène et de sécurité ont causé la mort de plusieurs médecins et infirmiers lors d'épidémies et favorisent les contaminations nosocomiales.

La transmission du virus peut aussi s’effectuer par contacts étroits du malade avec ses proches. On entend par contacts étroits des contacts directs avec les liquides organiques d’une personne infectée, qu’elle soit vivante ou décédée. Les rituels funéraires de certains peuples d'Afrique centrale, consistant à laver le corps, puis à se rincer les mains dans une bassine commune, ont souvent favorisé la propagation du virus à travers la famille et les amis du défunt. Des cas de transmission par le sperme se sont déjà produits jusqu’à sept semaines après la guérison clinique du malade. La transmission peut se produire chez des personnes ayant manipulé des primates infectés par le virus, morts ou vivants. Sous des conditions expérimentales, le virus arrive également à se propager par des gouttelettes ou des particules aérosol.

Lorsque les chauve-souris sont particulièrement abondantes, comme à Abidjan, et où elles sont un gibier très prisé, cet animal devient une source grave d'infection.

Symptômes[modifier | modifier le code]

La fièvre hémorragique Ebola se caractérise par une soudaine montée de fièvre accompagnée d’asthénie, de myalgie, de céphalées ainsi que de maux de gorge. Débutent ensuite les diarrhées, les vomissements, les éruptions cutanées et l’insuffisance rénale et hépatique. Des hémorragies internes et externes surviennent ensuite, suivies du décès par choc cardio-respiratoire dans 50 à 90 % des cas. Les signes hémorragiques peuvent être très frustes à type d’hémorragies conjonctivales. Elles peuvent aussi être profuses à type d’hématémèse et de melæna. La contagiosité des malades est donc très variable bien qu’il ne suffise que de 5 à 10 particules virales d'Ebola pour déclencher une amplification extrême du virus dans un nouvel hôte.

La durée d’incubation (le temps écoulé entre l’infection et l’apparition des symptômes) varie de 2 à 21 jours mais elle est dans la plupart des cas de 4 à 9 jours39.

Le décès survient dans un tableau de choc avec défaillance multi-viscérale, au bout de 6 à 16 jours32. Les cas non mortels peuvent entraîner des séquelles neurologiques, hépatiques ou oculaires. Le virus zaïrois semble plus dangereux que le virus soudanais, avec une mortalité atteignant de 60 à 90 % des cas32.

Traitement[modifier | modifier le code]

Il n'existe aucun traitement curatif et l'évolution est fatale dans 60 % à 90 % des cas40,41.

Un vaccin vivant atténué expérimental donne des résultats encourageants chez le singe42. Il a été administré en mars 2009 à une chercheuse travaillant sur le virus, après une possible contamination accidentelle. L'évolution en a été favorable43.

D'autres pistes sont en cours d'exploration chez l'animal : utilisation d'une protéine inhibitrice d'un facteur de la coagulation44 ou inhibition de l'ARN polymérase virale par des ARN interférents45.

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24 octobre 2013 4 24 /10 /octobre /2013 14:12

Aspects épidémiologiques

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Définitions

Historiquement,on considère que le saignement physiologique accompagnant un accouchement se situe entre 50 et 300 ml [11].

Ainsi, la définition communément admise de l’hémorragie du post-partum (HPP) est un saignement de plus de 500 ml dans les 24 heures suivant la naissance, même si cette définition reste discutée. En considérant cette définition, les hémorragies du post-partum concernent environ 5 % des grossesses [12, 13].

Actuellement, la définition la plus communément admise est clinique. Les obstétriciens font la distinction entre les HPP simples répondant aux mesures obstétricales initiales, les HPP sévères requérant la mise en route du sulprostone (Nalador®) et les HPP graves nécessitant le recours à une technique invasive d’hémostase [6].Si l’on considère les HPP engageant le pronostic vital, c’està- dire requérant un traitement radical immédiat (chirurgie ou embolisation d’hémostase), l’incidence est estimée à environ 1 pour 1 000 naissances [14].

Une étude rétrospective récente, réalisée dans trois régions françaises, montre que les soins prodigués en cas d’HPP grave (> 1 500 ml de saignement estimé) étaient inappropriés dans 38 % des cas [5]. Les facteurs associés à une surmortalitématernelle étaient :

• un nombre annuel d’accouchements dans le centre de soins inférieur à 500 par an ;

• l’absence de médecin anesthésiste-réanimateur de garde sur place.

 

Facteurs de risque d’hémorragie du post-partum

La majorité des HPP surviennent chez des patientes ne présentant aucun facteur de risque identifié [6].

 Actuellement, la valeur prédictive des facteurs de risque d’HPP évoqués dans la littérature ne permet pas de sélectionner les patientes devant faire l’objet de mesures préventives spécifiques avant la naissance.

Cependant, pour les patientes présentant un placenta recouvrant, une suspicion de placenta accreta ou des troubles sévères de l’hémostase,il est recommandé (accord professionnel) d’organiser la naissance dans un centre disposant d’un plateau médicotechnique adapté(soins intensifs maternels, produits sanguins labiles [PSL] disponibles sur place, gynécologueobstétricien et anesthésiste-réanimateur sur place 24 h/24) [6, 15].

 

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Étiologies

Il existe plusieurs étiologies d’HPP, relevant chacune d’une prise en charge obstétricale spécifique. Ces étiologies peuvent être associées, rendant capital un diagnostic précis et complet.

Elles sont classiquement réparties en : 
                    Pathologies de la délivrance,
                    Lésions de la filière génitale, 
                    Anomalies de l’insertion placentaire et 
                    Pathologies de l’hémostase [16].


·        Pathologies de la délivrance, atonie utérine

Le saignement peut débuter avant (hémorragie dite du 1er temps) ou après la délivrance complète ou partielle du placenta (hémorragie dite du 2e temps). Rappelons que trois conditions doivent être réunies pour interrompre le saignement physiologique lié à l’accouchement :

®     le décollement et l’évacuation complète du placenta ;

®     la vacuité utérine ;

®     la rétraction utérine.

Cette dernière est capitale pour clamper les vaisseaux utérins qui ont perdu, en fin de grossesse, leur capacité à se vasoconstricter.

La rétraction utérine optimale n’est possible (en dehors du cas particulier du placenta accreta) que lorsque la vacuité utérine est acquise et complète.

L’atonie utérine est présente dans 70 à 80 % des cas d’HPP. Sa physiopathologie n’est pas totalement appréhendée. Une prédisposition pourrait exister, certaines patientes récidivant à chaque grossesse.

Un mécanisme d’épuisement utérin ou de désensibilisation des récepteurs à l’ocytocine est fréquemment évoqué,ce qui fait critiquer par certains l’utilisation importante d’ocytociques pendant le travail.

Les facteurs favorisants semblent être :

®     la surdistension utérine (grossesse multiple, hydramnios, macrosomie foetale) ;

®     un travail long ou au contraire trop rapide ;

®     une anomalie de la contractilité utérine (multiparité, fibrome utérin, endométriose utérine, chorioamniotite, malformation utérine) ;

®     et certains médicaments (salbutamol, dérivés nitrés, anticalciques, halogénés), bien que les valeurs prédictives soient très faibles [16].La rétention placentaire (même partielle ou ne concernant qu’une rétention de membranes) peut être la cause d’une atonie sévère, justifiant la réalisation systématique d’une révisionutérine en cas d’HPP débutante (cf. infra). Enfin, l’atonie peut entrer dans le cadre d’anomalies d’insertion placentaires que sont les placenta prævia et accreta [17].

En cas d’accouchement à domicile, en l’absence de saignement actif, la délivrance peut être différée à l’arrivée dans le centre périnatal le plus proche.

Cependant, une délivrance artificielle doit être effectuée dans les plus brefs délais en cas d’hémorragie précédant l’expulsion placentaire ; les équipes du Samu devraient être formées à la réalisation de ce geste simple et salvateur.


·         Lésions de la filière génitale

Elles sont constamment sous-estimées et très souvent présentes en cas d’hémorragie après naissance par manoeuvres instrumentales (forceps en particulier). Elles peuvent siéger à tous les niveaux, de l’utérus au périnée. Elles peuvent concerner tous les niveaux de la filière génitale depuis la rupture utérine jusqu’au simple thrombus vaginal en passant par les déchirures du col de l’utérus et les déchirures vaginales, vulvaires et périnéales.

La rupture utérine se voit surtout en cas d’accouchement par voie basse sur utérus cicatriciel, surtout lié à une précédente césarienne [18].

L’analgésie péridurale a longtemps été contreindiquée en cas d’utérus cicatriciel de peur de masquer les signes de rupture. Ce n’est plus le cas, l’utérus cicatriciel en étant même devenu une bonne indication, du fait du risque élevé de passage au bloc opératoire. L’hémorragie n’étant pas toujours extériorisée, même en post-partum, la rupture utérine doit être recherchée en cas d’instabilité hémodynamique non expliquée par les pertes objectivées.

®     Les déchirures du col de l’utérus peuvent survenir lors d’efforts expulsifs ou de forceps sur un col incomplètement dilaté.

®     Les déchirures vaginales, vulvaires et périnéales sont générées par les forceps ou la tête du bébé. Elles doivent être suturées rapidement [19].

®     Le thrombus vaginal, ou hématome paravaginal, est également d’origine traumatique. Souvent non extériorisé lorsque la muqueuse vaginale est intacte, il constitue une hémorragie interne pouvant être massive, fusant en rétropéritonéal un peu comme dans les traumatismes graves du bassin. Les signes révélateurs peuvent être une douleur intense à la levée de la péridurale (hématome sous tension), un hématome des grandes lèvres, une hypotension, voire un état d’agitation non expliqué.

 Photo1469

·        Anomalies de l’insertion placentaire : placenta prævia, placenta accreta

®     Le placenta prævia :

il s’agit d’une insertion anormalement basse du placenta sur le segment inférieur de l’utérus.Dans certains cas, il recouvre le col (placenta prævia recouvrant) et empêche tout accouchement par voie basse.Il peut être à l’origine d’un saignement prépartum, à l’occasion d’un décollement placentaire spontané ou associé à des contractions, mais aussi en post-partum où il peut être à l’origine d’une hémorragie par atonie utérine, le segment inférieur de l’utérus ayant de faibles capacités contractiles [20].

 

®     Le placenta accreta :

il se définit comme une adhérence anormale du placenta au myomètre.

 Il est la conséquence d’un défaut d’implantation et de décidualisation (transformation des cellules du stroma endométrial en cellules déciduales) de la caduque basale.

L’absence localisée ou diffuse de cette caduque basale s’interposant habituellement entre les villosités choriales et le myomètre caractérise le placenta accreta.

On distingue différents types selon les degrés d’infiltration du placenta dans le myomètre :

• placenta accreta : adhésion anormale des villosités choriales au myomètre sans l’envahir ;

• placenta increta : invasion profonde des villosités choriales dans le myomètre jusqu’à la séreuse sans la dépasser ;

• placenta percreta : invasion des villosités choriales dans tout le myomètre franchissant la séreuse et pouvant envahir des organes de voisinage tels que la vessie ou le tube digestif [17].

Toute tentative de clivage forcé entre placenta et myomètre en cas de placenta accreta provoque le plus souvent une hémorragie massive lors de la délivrance mettant en jeu le pronostic vital maternel.

L’incidence du placenta accreta ne cesse d’augmenter ces dernières années avec un taux variant de 1/500 à 1/2 500 selon les séries, augmentation apparemment corrélée à l’augmentation croissante du taux de césariennes.

Tous les phénomènes susceptibles d’endommager la muqueuse utérine sont considérés comme facteurs de risque de placenta accreta, en particulier les cicatrices secondaires à une chirurgie utérine (césarienne, myomectomie, traitement chirurgical d’une perforation ou d’une malformation utérine), les cicatrices secondaires à des gestes endo-utérins (curetage).

Le diagnostic de placenta accreta est évoqué le plus souvent au moment de la délivrance devant l’absence de plan de clivage du placenta lors d’une délivrance artificielle et/ou dans un contexte d’hémorragie de la délivrance. Il est confirmé par l’examen anatomopathologique du placenta et/ou de la pièce opératoire en cas de chirurgie.

Idéalement, le diagnostic est évoqué en anténatal grâce aux techniques d’imagerie que sont essentiellement l’échographie couplée au mode Doppler, voire à l’imagerie par résonance magnétique (IRM). Le diagnostic précoce permet alors d’orienter la patiente vers un centre expérimenté où une discussion pluridisciplinaire permet de définir la meilleure stratégie obstétricale.

Les modalités de prise en charge ne sont pas à ce jour clairement codifiées et opposent deux attitudes thérapeutiques :

• l’attitude extirpative : une tentative de délivrance forcée est effectuée. Cette attitude engendre dans la plupart des cas une hémorragie immédiate et massive, et le recours à l’hystérectomie d’hémostase est alors souvent la seule solution. Cette chirurgie peut être délabrante en cas de placenta percreta, pouvant nécessiter des résections digestives et/ou une cystectomie partielle secondaires à l’envahissement placentaire.

L’hystérectomie d’hémostase compromet par ailleurs définitivement la fertilité ultérieure chez la patiente.

La Figure 2 est une photographie de pièce anatomique d’hystérectomie montrant l’envahissement de la paroi de l’utérus par le placenta percreta ;

• l’attitude conservatrice :

la prise en charge conservatrice des placenta accreta consistant à laisser le placenta en place au moment de la délivrance a été décrite par l’équipe obstétricale de la maternité Port-Royal à Paris. Les résultats des études déjà réalisées semblent prometteurs. Sur une série de 30 patientes, l’équipe de la maternité de Port-Royal rapporte seulement quatre hystérectomies liées aux résidus placentaires.Dans tous les autres cas, le placenta a spontanément involué, sans que la physiopathologie de ce processus d’involution soit clairement comprise. Outre la préservation de l’utérus, cette prise en charge présente avant tout l’intérêt de diminuer les besoins transfusionnels [21, 22].

Photo1464

·        Troubles constitutionnels ou acquis de l’hémostase


®     Les troubles constitutionnels peuvent concerner

o   l’hémostase primaire (thrombopénie, thrombopathies, thrombasthénie, maladie de von Willebrand)

o   ou l’hémostase secondaire (déficits en facteurs) et indiquer des thérapeutiques spécifiques.

®     Les troubles acquis peuvent essentiellement être

o   médicamenteux (héparinothérapie préventive ou curative pendant la grossesse) 

o   ou liés à une pathologie obstétricale.

Certaines situations, comme la rétention de foetus mort, l’hématome rétroplacentaire, la prééclampsie, le syndrome HELLP (Haemolysis Elevated Liver enzyme Low Patelet count), l’embolie amniotique, peuvent générer de véritables fibrinolyses aiguës ou coagulations intravasculaires disséminées (CIVD) [23] (cf. infra).

 Enfin, toute hémorragie grave du post-partum peut se compliquer d’une coagulopathie secondaire, mélange de dilution et d’activation. Il faut se souvenir que les troubles de l’hémostase sont bien plus fréquemment la conséquence de la spoliation sanguine liée à l’hémorragie que l’étiologie du syndrome hémorragique. Ainsi lors d’une hémorragie obstétricale, la présence de troubles de l’hémostase doit plutôt être considérée comme un facteur de gravité associé et ne doit pas empêcher la recherche d’une autre étiologie primaire de cette hémorragie.

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Aspects épidémiologiques

 Définitions

 Facteurs de risque

Étiologies

 Pathologies de la délivrance,

 décollement et l’évacuation complète du placenta

la vacuité utérine ;

la rétraction utérine

Anomalies de l’insertion placentaire              

placenta prævia,

placenta accreta

Lésions de la filière génitale

Pathologies de l’hémostase 

 

 


Prévention : principes de sécurité à appliquer à toute femmeenceinte

 


Prise en charge initiale d’une hémorragie du post-partum

 


En cas d’aggravation de l’hémorragie du post-partum

 


Hémorragie résistante au sulprostone  

 

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6 décembre 2012 4 06 /12 /décembre /2012 10:32

Aspects épidémiologiques

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Définitions

Historiquement,on considère que le saignement physiologique accompagnant un accouchement se situe entre 50 et 300 ml [11].

Ainsi, la définition communément admise de l’hémorragie du post-partum (HPP) est un saignement de plus de 500 ml dans les 24 heures suivant la naissance, même si cette définition reste discutée. En considérant cette définition, les hémorragies du post-partum concernent environ 5 % des grossesses [12, 13].

Actuellement, la définition la plus communément admise est clinique. Les obstétriciens font la distinction entre les HPP simples répondant aux mesures obstétricales initiales, les HPP sévères requérant la mise en route du sulprostone (Nalador®) et les HPP graves nécessitant le recours à une technique invasive d’hémostase [6].Si l’on considère les HPP engageant le pronostic vital, c’està- dire requérant un traitement radical immédiat (chirurgie ou embolisation d’hémostase), l’incidence est estimée à environ 1 pour 1 000 naissances [14].

Une étude rétrospective récente, réalisée dans trois régions françaises, montre que les soins prodigués en cas d’HPP grave (> 1 500 ml de saignement estimé) étaient inappropriés dans 38 % des cas [5]. Les facteurs associés à une surmortalitématernelle étaient :

• un nombre annuel d’accouchements dans le centre de soins inférieur à 500 par an ;

• l’absence de médecin anesthésiste-réanimateur de garde sur place.

 

Facteurs de risque d’hémorragie du post-partum

La majorité des HPP surviennent chez des patientes ne présentant aucun facteur de risque identifié [6].

 Actuellement, la valeur prédictive des facteurs de risque d’HPP évoqués dans la littérature ne permet pas de sélectionner les patientes devant faire l’objet de mesures préventives spécifiques avant la naissance.

Cependant, pour les patientes présentant un placenta recouvrant, une suspicion de placenta accreta ou des troubles sévères de l’hémostase,il est recommandé (accord professionnel) d’organiser la naissance dans un centre disposant d’un plateau médicotechnique adapté(soins intensifs maternels, produits sanguins labiles [PSL] disponibles sur place, gynécologueobstétricien et anesthésiste-réanimateur sur place 24 h/24) [6, 15].

 

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Étiologies

Il existe plusieurs étiologies d’HPP, relevant chacune d’une prise en charge obstétricale spécifique. Ces étiologies peuvent être associées, rendant capital un diagnostic précis et complet.

Elles sont classiquement réparties en : 
                    Pathologies de la délivrance,
                    Lésions de la filière génitale, 
                    Anomalies de l’insertion placentaire et 
                    Pathologies de l’hémostase [16].


·        Pathologies de la délivrance, atonie utérine

Le saignement peut débuter avant (hémorragie dite du 1er temps) ou après la délivrance complète ou partielle du placenta (hémorragie dite du 2e temps). Rappelons que trois conditions doivent être réunies pour interrompre le saignement physiologique lié à l’accouchement :

®     le décollement et l’évacuation complète du placenta ;

®     la vacuité utérine ;

®     la rétraction utérine.

Cette dernière est capitale pour clamper les vaisseaux utérins qui ont perdu, en fin de grossesse, leur capacité à se vasoconstricter.

La rétraction utérine optimale n’est possible (en dehors du cas particulier du placenta accreta) que lorsque la vacuité utérine est acquise et complète.

L’atonie utérine est présente dans 70 à 80 % des cas d’HPP. Sa physiopathologie n’est pas totalement appréhendée. Une prédisposition pourrait exister, certaines patientes récidivant à chaque grossesse.

Un mécanisme d’épuisement utérin ou de désensibilisation des récepteurs à l’ocytocine est fréquemment évoqué,ce qui fait critiquer par certains l’utilisation importante d’ocytociques pendant le travail.

Les facteurs favorisants semblent être :

®     la surdistension utérine (grossesse multiple, hydramnios, macrosomie foetale) ;

®     un travail long ou au contraire trop rapide ;

®     une anomalie de la contractilité utérine (multiparité, fibrome utérin, endométriose utérine, chorioamniotite, malformation utérine) ;

®     et certains médicaments (salbutamol, dérivés nitrés, anticalciques, halogénés), bien que les valeurs prédictives soient très faibles [16].La rétention placentaire (même partielle ou ne concernant qu’une rétention de membranes) peut être la cause d’une atonie sévère, justifiant la réalisation systématique d’une révisionutérine en cas d’HPP débutante (cf. infra). Enfin, l’atonie peut entrer dans le cadre d’anomalies d’insertion placentaires que sont les placenta prævia et accreta [17].

En cas d’accouchement à domicile, en l’absence de saignement actif, la délivrance peut être différée à l’arrivée dans le centre périnatal le plus proche.

Cependant, une délivrance artificielle doit être effectuée dans les plus brefs délais en cas d’hémorragie précédant l’expulsion placentaire ; les équipes du Samu devraient être formées à la réalisation de ce geste simple et salvateur.


·         Lésions de la filière génitale

Elles sont constamment sous-estimées et très souvent présentes en cas d’hémorragie après naissance par manoeuvres instrumentales (forceps en particulier). Elles peuvent siéger à tous les niveaux, de l’utérus au périnée. Elles peuvent concerner tous les niveaux de la filière génitale depuis la rupture utérine jusqu’au simple thrombus vaginal en passant par les déchirures du col de l’utérus et les déchirures vaginales, vulvaires et périnéales.

La rupture utérine se voit surtout en cas d’accouchement par voie basse sur utérus cicatriciel, surtout lié à une précédente césarienne [18].

L’analgésie péridurale a longtemps été contreindiquée en cas d’utérus cicatriciel de peur de masquer les signes de rupture. Ce n’est plus le cas, l’utérus cicatriciel en étant même devenu une bonne indication, du fait du risque élevé de passage au bloc opératoire. L’hémorragie n’étant pas toujours extériorisée, même en post-partum, la rupture utérine doit être recherchée en cas d’instabilité hémodynamique non expliquée par les pertes objectivées.

®     Les déchirures du col de l’utérus peuvent survenir lors d’efforts expulsifs ou de forceps sur un col incomplètement dilaté.

®     Les déchirures vaginales, vulvaires et périnéales sont générées par les forceps ou la tête du bébé. Elles doivent être suturées rapidement [19].

®     Le thrombus vaginal, ou hématome paravaginal, est également d’origine traumatique. Souvent non extériorisé lorsque la muqueuse vaginale est intacte, il constitue une hémorragie interne pouvant être massive, fusant en rétropéritonéal un peu comme dans les traumatismes graves du bassin. Les signes révélateurs peuvent être une douleur intense à la levée de la péridurale (hématome sous tension), un hématome des grandes lèvres, une hypotension, voire un état d’agitation non expliqué.

 Photo1469

·        Anomalies de l’insertion placentaire : placenta prævia, placenta accreta

®     Le placenta prævia :

il s’agit d’une insertion anormalement basse du placenta sur le segment inférieur de l’utérus.Dans certains cas, il recouvre le col (placenta prævia recouvrant) et empêche tout accouchement par voie basse.Il peut être à l’origine d’un saignement prépartum, à l’occasion d’un décollement placentaire spontané ou associé à des contractions, mais aussi en post-partum où il peut être à l’origine d’une hémorragie par atonie utérine, le segment inférieur de l’utérus ayant de faibles capacités contractiles [20].

 

®     Le placenta accreta :

il se définit comme une adhérence anormale du placenta au myomètre.

 Il est la conséquence d’un défaut d’implantation et de décidualisation (transformation des cellules du stroma endométrial en cellules déciduales) de la caduque basale.

L’absence localisée ou diffuse de cette caduque basale s’interposant habituellement entre les villosités choriales et le myomètre caractérise le placenta accreta.

On distingue différents types selon les degrés d’infiltration du placenta dans le myomètre :

• placenta accreta : adhésion anormale des villosités choriales au myomètre sans l’envahir ;

• placenta increta : invasion profonde des villosités choriales dans le myomètre jusqu’à la séreuse sans la dépasser ;

• placenta percreta : invasion des villosités choriales dans tout le myomètre franchissant la séreuse et pouvant envahir des organes de voisinage tels que la vessie ou le tube digestif [17].

Toute tentative de clivage forcé entre placenta et myomètre en cas de placenta accreta provoque le plus souvent une hémorragie massive lors de la délivrance mettant en jeu le pronostic vital maternel.

L’incidence du placenta accreta ne cesse d’augmenter ces dernières années avec un taux variant de 1/500 à 1/2 500 selon les séries, augmentation apparemment corrélée à l’augmentation croissante du taux de césariennes.

Tous les phénomènes susceptibles d’endommager la muqueuse utérine sont considérés comme facteurs de risque de placenta accreta, en particulier les cicatrices secondaires à une chirurgie utérine (césarienne, myomectomie, traitement chirurgical d’une perforation ou d’une malformation utérine), les cicatrices secondaires à des gestes endo-utérins (curetage).

Le diagnostic de placenta accreta est évoqué le plus souvent au moment de la délivrance devant l’absence de plan de clivage du placenta lors d’une délivrance artificielle et/ou dans un contexte d’hémorragie de la délivrance. Il est confirmé par l’examen anatomopathologique du placenta et/ou de la pièce opératoire en cas de chirurgie.

Idéalement, le diagnostic est évoqué en anténatal grâce aux techniques d’imagerie que sont essentiellement l’échographie couplée au mode Doppler, voire à l’imagerie par résonance magnétique (IRM). Le diagnostic précoce permet alors d’orienter la patiente vers un centre expérimenté où une discussion pluridisciplinaire permet de définir la meilleure stratégie obstétricale.

Les modalités de prise en charge ne sont pas à ce jour clairement codifiées et opposent deux attitudes thérapeutiques :

• l’attitude extirpative : une tentative de délivrance forcée est effectuée. Cette attitude engendre dans la plupart des cas une hémorragie immédiate et massive, et le recours à l’hystérectomie d’hémostase est alors souvent la seule solution. Cette chirurgie peut être délabrante en cas de placenta percreta, pouvant nécessiter des résections digestives et/ou une cystectomie partielle secondaires à l’envahissement placentaire.

L’hystérectomie d’hémostase compromet par ailleurs définitivement la fertilité ultérieure chez la patiente.

La Figure 2 est une photographie de pièce anatomique d’hystérectomie montrant l’envahissement de la paroi de l’utérus par le placenta percreta ;

• l’attitude conservatrice :

la prise en charge conservatrice des placenta accreta consistant à laisser le placenta en place au moment de la délivrance a été décrite par l’équipe obstétricale de la maternité Port-Royal à Paris. Les résultats des études déjà réalisées semblent prometteurs. Sur une série de 30 patientes, l’équipe de la maternité de Port-Royal rapporte seulement quatre hystérectomies liées aux résidus placentaires.Dans tous les autres cas, le placenta a spontanément involué, sans que la physiopathologie de ce processus d’involution soit clairement comprise. Outre la préservation de l’utérus, cette prise en charge présente avant tout l’intérêt de diminuer les besoins transfusionnels [21, 22].

Photo1464

·        Troubles constitutionnels ou acquis de l’hémostase


®     Les troubles constitutionnels peuvent concerner

o   l’hémostase primaire (thrombopénie, thrombopathies, thrombasthénie, maladie de von Willebrand)

o   ou l’hémostase secondaire (déficits en facteurs) et indiquer des thérapeutiques spécifiques.

®     Les troubles acquis peuvent essentiellement être

o   médicamenteux (héparinothérapie préventive ou curative pendant la grossesse) 

o   ou liés à une pathologie obstétricale.

Certaines situations, comme la rétention de foetus mort, l’hématome rétroplacentaire, la prééclampsie, le syndrome HELLP (Haemolysis Elevated Liver enzyme Low Patelet count), l’embolie amniotique, peuvent générer de véritables fibrinolyses aiguës ou coagulations intravasculaires disséminées (CIVD) [23] (cf. infra).

 Enfin, toute hémorragie grave du post-partum peut se compliquer d’une coagulopathie secondaire, mélange de dilution et d’activation. Il faut se souvenir que les troubles de l’hémostase sont bien plus fréquemment la conséquence de la spoliation sanguine liée à l’hémorragie que l’étiologie du syndrome hémorragique. Ainsi lors d’une hémorragie obstétricale, la présence de troubles de l’hémostase doit plutôt être considérée comme un facteur de gravité associé et ne doit pas empêcher la recherche d’une autre étiologie primaire de cette hémorragie.

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Aspects épidémiologiques

 Définitions

 Facteurs de risque

Étiologies

 Pathologies de la délivrance,

 décollement et l’évacuation complète du placenta

la vacuité utérine ;

la rétraction utérine

Anomalies de l’insertion placentaire              

placenta prævia,

placenta accreta

Lésions de la filière génitale

Pathologies de l’hémostase 

 

 


Prévention : principes de sécurité à appliquer à toute femmeenceinte

 


Prise en charge initiale d’une hémorragie du post-partum

 


En cas d’aggravation de l’hémorragie du post-partum

 


Hémorragie résistante au sulprostone  

 

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4 juillet 2011 1 04 /07 /juillet /2011 11:30

 

 

Exposition professionnelle au protoxyde

d’azote et aux vapeurs anesthésiques.

Conséquences pour la santé

et l’environnement. Prévention

 

hops

 

J.-C. Colavolpe, N. François

Les études animales et les enquêtes épidémiologiques réalisées durant la période 1970-1985 ont surestimé les effets des gaz anesthésiques présents à l’état de traces dans l’atmosphère de travail sur la santé des personnels :atteinte de la fonction de reproduction (avortements spontanés, baisse de la fertilité, malformations congénitales), survenue de certains cancers, hépatotoxicité, neurotoxicité, altérations de l’hématopoïèse et du système immunitaire.

Le caractère contradictoire des études, la faiblesse méthodologique des premières enquêtes et surtout la réduction du niveau d’exposition dans les blocs opératoires modernes ont conduit les experts à relativiser les risques pour la santé. Dans le cadre de la protection des travailleurs, les autorités sanitaires européennes ont fixé des seuils d’exposition à ne pas dépasser. En France, durant l’entretien de l’anesthésie, une circulaire ministérielle de 1985 recommande le seuil de 25 ppm pour le protoxyde d’azote et de 2 ppm pour les halogénés. Le respect de ces valeurs nécessite de travailler dans des locaux dont le renouvellement de l’air est de l’ordre de 15-20 volumes h–1, de disposer de systèmes d’évacuation des gaz, d’utiliser un bas débit de gaz frais et de respecter des règles de bonne pratique. La mesure d’un gaz à l’état de traces dans l’atmosphère peut s’effectuer sur site par spectrophotométrie infrarouge ; en laboratoire par l’analyse de prélèvements ; par l’utilisation d’un badge dosimètre passif individuel. Les gaz anesthésiques rejetés dans l’atmosphère terrestre contribuent peu à la réduction de la couche d’ozone et à l’effet de serre.

Mots clés : Pollution ; Exposition professionnelle ; Protoxyde d’azote ; Halogéné ; Système d’évacuation des gaz anesthésiques

Introduction

L’utilisation médicale du protoxyde d’azote (N2O) et des halogénés a pour conséquence la contamination de l’air des blocs opératoires, des salles de surveillance postinterventionnelle (SSPI) et des sites où se pratique l’analgésie par inhalation d’un mélange équimolaire d’oxygène et de protoxyde d’azote (MEOPA).

Depuis le début des années 1970, de nombreuses études ont tenté d’évaluer les effets de l’exposition chronique aux gaz anesthésiques sur la santé des personnels soignants et son influence sur l’environnement.Dès 1977 aux États-Unis et plus tardivement en France, les autorités ont mené une politique de prévention en fixant des valeurs d’exposition à ne pas dépasser et en recommandant des mesures de réduction de la pollution par les gaz et vapeurs anesthésiques, et de surveillance du personnel exposé.

La concentration d’un gaz présent à l’état de traces dans l’air ambiant s’exprime en parties par million (ppm) ou volume du gaz considéré par volume d’air [vol/vol]. Pour mémoire : 1 ppm = 0,0001 %.

Conséquences pour la santé

Les effets sur la santé de l’exposition à de faibles concentrations de gaz anesthésiques sont évalués à partir de travaux menés chez l’animal, d’enquêtes épidémiologiques et d’études chez des volontaires sains.

Chez l’animal, les chercheurs ont essentiellement étudié les effets de l’halothane et du protoxyde d’azote, seuls ou en combinaison.Les animaux, généralement des souris ou des rats, sont soumis à des concentrations parfois très faibles, voisines de celles mesurées dans les salles d’opération, ou au contraire subanesthésiques sans rapport avec les niveaux d’exposition professionnelle.

Les durées d’exposition sont également variables, idéalement proches de celles du personnel, soit 4 à 8 heures par jour, 5 jours sur 7, pendant plusieurs semaines. En 1967, Vaisman est le premier à s’intéresser aux conditions de travail des personnels de santé et à noter chez un collectif de 110 anesthésistes russes la fréquence de manifestations non spécifiques (vertiges, céphalées...) mais également l’incidence des avortements spontanés et des malformations congénitales chez leurs enfants. Aux États-Unis, au début des années 1970, le National Institute for Occupational Safety and Health (NIOSH) en collaboration avec l’American Society of Anesthesiologists (ASA), réalise une vaste enquête nationale auprès de 73 000 « sujets exposés » aux gaz et vapeurs anesthésiques dont les résultats sont publiés en 1974 [1].Plus tardivement en France, de 1987 à 1989, Saurel-Cubizolles et al.

 conduisent une étude sur l’incidence des avortements spontanés et des manifestations neuropsychologiques parmi le personnel féminin des blocs opératoires de 17 hôpitaux parisiens [2, 3]. La plupart des enquêtes réalisées aux États-Unis et en Europe sont rétrospectives et utilisent, pour le recueil des données, des questionnaires postaux éventuellement complétés par des entretiens. Les groupes témoins sont issus de la population générale ou composés de professionnels de la santé non exposés aux gaz anesthésiques. La faiblesse méthodologique de certains travaux et le caractère contradictoire des résultats ont conduit plusieurs groupes d’experts, le plus souvent mandatés par des organismes institutionnels, à réaliser des analyses critiques de la littérature [4-12].

Effets sur la reproduction

Études animales

À de très faibles concentrations, l’halothane n’a pas d’effet significatif sur la fertilité, le taux des avortements et la fréquence des anomalies congénitales [7]. Seules des concentrations subanesthésiques semblent avoir un impact sur la fertilité et sur le poids à la naissance [13]. Après une exposition in utero, des modifications morphologiques du foie, des reins et du cerveau sont rapportées mais leur caractère pathologique est discuté [7, 14]. Un effet de l’halothane sur le développement neurologique de l’embryon est probable. L’exposition à de faibles concentrations (10-100 ppm), in utero mais aussi au cours des 60 jours qui suivent la naissance, perturbe la synaptogenèse, ce qui conduit à une réduction de la densité synaptique responsable de troubles durables du comportement et de l’apprentissage [15].

Aux faibles concentrations, l’enflurane (0,01 %) et l’isoflurane (0,1 %) n’ont pas d’effet sur la fonction de reproduction ni d’effet mutagène [16-18].

Les conséquences de l’exposition prolongée au N2O sur la fonction de reproduction sont diversement appréciées. Pour Vieira et al., aux concentrations inférieures à 500 ppm, ce gaz n’a pas d’effet chez la femelle ; une baisse de la fertilité et une réduction du poids ainsi que de la taille des embryons ne surviennent qu’aux doses subanesthésiques [19]. Pour le même auteur, l’exposition de souris mâles au protoxyde d’azote à la concentration de 0,5 % (5 000 ppm) pendant les 30 jours précédant l’accouplement entraîne une hypofertilité et une réduction de la portée [20]. Après exposition de rats des deux sexes à des concentrations croissantes de N2O (0,1 % ; 0,5 % ; 1,0 %), Holson et al. ne notent ni de réduction de la fertilité chez les femelles et les mâles exposés, ni de troubles du comportement ou d’altération des fonctions d’acquisition chez leur progéniture [21].

Les résultats de ces études, obtenus lors de conditions d’expériences variables en termes de niveaux et de durées d’exposition, doivent être considérés avec réserve et leur extrapolation éventuelle à l’homme s’avère délicate.

Parmi les halogénés, seul l’halothane paraît induire des troubles du développement foetal pour de faibles concentrations [15]. Pour le N2O, le seuil de 500 ppm identifié comme pouvant affecter la fertilité chez l’animal est à prendre en considération, des niveaux d’exposition dépassant cette valeur sont mesurés, en particulier dans les cabinets de dentistes utilisant le MEOPA.

Études épidémiologiques

Au cours de la période 1970-1985, plusieurs enquêtes épidémiologiques menées aux États-Unis et en Europe ont tout particulièrement étudié l’incidence des avortements spontanés et des malformations congénitales chez le personnel féminin travaillant au bloc opératoire, dans les cabinets de dentistes ou de vétérinaires. Certains auteurs ont inclus comme variables la mortinatalité, le faible poids de naissance, la prématurité ou le sex-ratio.

En 1977, Spence et al. publient une analyse des trois principales enquêtes conduites aux États-Unis et en Grande-Bretagne dans les années 1970 auprès du personnel médical exerçant au bloc opératoire [4].

Pour ces auteurs, il existe un risque majoré d’avortements spontanés chez les femmes exposées et une fréquence anormalement élevée de malformations congénitales chez les enfants des personnels des deux sexes. L’incidence des avortements spontanés chez les épouses des anesthésistes n’est pas significativement augmentée.

À la demande de l’ASA, Buring et al. réalisent une revue exhaustive de la littérature des années 1970 et concluent à un risque accru d’avortement spontané chez le personnel féminin avec cependant un risque relatif (RR) faible (RR 1,3 ; IC 95 % : 1,2-1,4) pouvant être attribué à des biais [5]. En revanche, l’augmentation des malformations congénitales n’est pas formellement établie (RR 1,4 ; IC à 95 % : 1,0-2,0) [5]. À la même époque, Tannenbaum et al. tirent de leur analyse des mêmes travaux des conclusions plus nuancées [6]. Pour ces auteurs, le caractère rétrospectif des enquêtes, le manque de rigueur dans la méthodologie, l’absence de mesure exacte des niveaux d’exposition, le faible taux de réponses aux questionnaires, ne permettent pas de conclure [6]. Les travaux des épidémiologistes scandinaves illustrent l’impact de certains biais sur les résultats de ces études cas-témoin [22]. La consultation systématique des registres nationaux de déclarations des naissances et des avortements leur a notamment permis de mettre en évidence une sous-déclaration involontaire par la population-témoin des avortements spontanés et des malformations congénitales [22].

Peu de publications concernent spécifiquement les effets des gaz anesthésiques sur la fertilité. Au début des années 1970, Knill-Jones et al. rapportent une incidence élevée d’infertilité chez les femmes anesthésistes (12 % versus 6 % chez les témoins) qu’ils ne retrouvent pas chez les épouses des anesthésistes mâles [23, 24]. En 1987, Rowland et al. réalisent une vaste enquête rétrospective auprès de 7 000 assistantes de dentistes en âge de procréer (18-39 ans) exposées au protoxyde d’azote [25, 26]. Après ajustement selon l’âge, les antécédents gynécologiques et la consommation de tabac, une baisse de la fertilité, évaluée par le nombre de cycles sans contraception nécessaire à l’obtention d’une grossesse, est observée chez les jeunes femmes lorsqu’elles sont exposées plus de 5 heures par semaine à des concentrations de protoxyde d’azote estimées élevées du fait de l’absence de dispositif d’extraction des gaz [25]. Les auteurs notent également une majoration du risque d’avortement spontané quand les assistantes travaillent plus de 3 heures par semaine en atmosphère polluée [26].Ces troubles de la fonction de reproduction ne s’observent pas lorsque les locaux sont munis d’extracteurs des gaz [25, 26].

De 1977 à 1984, une étude prospective, la seule réalisée à ce jour, est menée en Grande-Bretagne auprès du personnel médical féminin âgé de moins de 40 ans. La fertilité et le taux d’avortements spontanés chez les anesthésistes s’avèrent comparables à ceux de leurs consoeurs sans augmentation du risque de malformations congénitales, excepté pour les anomalies cardiaques [27].

En 1996, le Conseil d’évaluation des technologies de la santé du Québec publie un rapport très détaillé sur les risques de l’exposition professionnelle aux gaz anesthésiques pour la femme enceinte et le foetus [7, 8]. Après analyse de 19 études épidémiologiques, les experts canadiens concluent à l’existence d’un RR global de 1,51 (IC à 95 % : 1,42-1,61) correspondant à une augmentation de 51 % du risque d’avortement chez les femmes exposées aux gaz anesthésiques. En termes absolus, pour un risque de base de 15 % chez les femmes non exposées, le risque est de 22,5 % (+7,5 %) chez le personnel féminin exposé. En se limitant aux études les plus rigoureuses, le RR atteint 1,86 (IC 95 % : 1,69-2,04).

Les auteurs du rapport soulignent la difficulté dans l’évaluation épidémiologique du risque de malformations congénitales secondaires à l’exposition professionnelle aux gaz anesthésiques compte tenu de leur faible prévalence, de leur hétérogénicité, des biais de déclaration, et concluent à l’absence de relation cohérente [7].

En France, le groupe pluridisciplinaire « Anesthésie et qualité de l’air » a rédigé un guide pour la prévention des expositions professionnelles aux gaz et vapeurs anesthésiques édité en 1996 par la Caisse régionale d’assurance maladie d’Île-de-France CRAMIF) [9]. Les experts français, après avoir rappelé les difficultés à établir un éventuel lien de causalité entre expositions professionnelles et troubles de la reproduction, concluent à un effet nocif probable des gaz anesthésiques incitant à maîtriser les niveaux d’exposition.

 Parallèlement à la démarche institutionnelle canadienne et française, la « Caisse nationale suisse d’assurance en cas d’accidents » publie en 1998 un guide sur les conditions de travail lors de l’exposition aux gaz anesthésiques [10]. Pour les experts suisses, « les études les plus récentes conduites sur des collectifs exposés à des niveaux modérés de gaz anesthésiques indiquent que les risques pour la grossesse et les troubles de la fertilité sont nettement moins probables que ne le laissent supposer les études  des années septantes ».

Aux Pays-Bas, à la demande du ministère des Affaires Sociales, le Conseil de la Santé a été chargé, en application de la

Directive Européenne 93/21/EEC, de classer les substances selon leurs effets sur la reproduction. Il convient de souligner qu’en l’absence de données épidémiologiques fiables, les experts hollandais ont pris en compte les études animales pour établir leurs recommandations. Pour les effets sur la fertilité, ils recommandent de classer le protoxyde d’azote en catégorie 3 (substances préoccupantes pour la fertilité dans l’espèce humaine) avec l’apposition sur l’étiquetage de la mention R62 (risque possible d’altération de la fertilité). Pour les effets sur le développement foetal, ils recommandent son classement dans la catégorie 3 (substances préoccupantes pour l’homme eu égard à des effets toxiques possibles sur le développement) avec la mention R63 (risque possible pendant la grossesse d’effets néfastes pour l’enfant). Pour l’halothane, seuls les effets potentiels sur la maturation foetale sont retenus et le font classer dans la catégorie 3 des substances toxiques pour le développement.

Une démarche voisine de celle des Pays-Bas a été menée en Allemagne et en Suisse [10]. L’halothane est classé dans le groupe B des substances pour lesquelles on ne peut exclure un risque d’atteinte foetale même lorsque le seuil d’exposition a été respecté ; l’enflurane dans le groupe C dans lequel, si le seuil est respecté, il n’y a pas à craindre de lésions du foetus, et le N2O dans le groupe D des substances pour lesquelles, en l’absence de données fiables, une prise de position définitive est impossible.Bien que l’halothane puisse être présent à l’état de traces dans le lait maternel, l’allaitement est considéré comme dépourvu de risque pour le nourrisson par l’American Academy of Pediatrics compte tenu de sa faible absorption digestive [28]. Aucune donnée épidémiologique ou animale n’est en faveur d’un effet de l’isoflurane sur la fonction de reproduction.

En conclusion, les effets sur la fonction de reproduction des halogénés récents, isoflurane, sévoflurane, desflurane, sont improbables voire inexistants [29]. Sans que l’on puisse formellement établir un lien de causalité compte tenu des facteurs confondants que sont le tabac, l’âge, les conditions de travail, l’exposition aux radiations ionisantes, il est possible qu’une exposition chronique à des concentrations élevées d’halothane et/ou de protoxyde d’azote soit responsable d’une hypofertilité et d’une majoration du risque d’avortement spontané chez le personnel féminin. En revanche, la fréquence des malformations congénitales n’est pas majorée et l’augmentation du risque d’avortement spontané chez les épouses des anesthésistes n’est pas établie [7, 9, 10].

Effets neurologiques

Effets centraux

Psychomoteurs

Dans les années 1970, Bruce et al. observent une diminution significative des capacités de mémorisation, d’attention, de perception audiovisuelle et d’exécution motrice chez des volontaires sains exposés à des concentrations très faibles de N2O (50 ppm) et d’halothane (1 ppm) [30].

Aucune altération des performances aux tests n’est notée lorsque ces mêmes sujets inhalent un mélange de protoxyde d’azote (25 ppm) et d’halothane (0,5 ppm).Ces valeurs, au-delà desquelles l’altération des performances psychomotrices du personnel soignant sont de nature à porter atteinte à la sécurité des patients, ont été prises en compte pour fixer les premiers seuils d’exposition professionnelle aux États-Unis [31]. La plupart des travaux ultérieurs n’ont pas confirmé les résultats de cette étude dont la validité a été mise en doute par l’auteur lui-même [32]. Smith et al. ne notent aucune altération des performances aux tests audiovisuels et de mémorisation pour des concentrations nettement plus élevées d’halothane (100-150 ppm) et lors de l’exposition à un mélange de N2O (485-700 ppm) et d’halothane (10-16 ppm) [33]. Dans l’étude de Fagan et al., les tests psychomoteurs pratiqués chez des volontaires soumis à des concentrations croissantes de N2O (5 %, 10 %, 20 % et 40 %) ne sont altérés qu’à partir d’un taux d’exposition de 10 % [34].Une altération de la vigilance ne s’observe sous enflurane qu’à la concentration subanesthésique de 0,25 % [35]. Cependant, chez le personnel des blocs opératoires exposé à des concentrations relativement faibles de N2O et d’enflurane évaluées à partir de dosages urinaires, Lucchini et al. notent des altérations au test de temps de réaction simple (SRT) [36]. Le même auteur, en utilisant notamment le questionnaire EURO-QUEST, conçu pour les salariés exposés à des produits chimiques ayant des effets neurotoxiques, ne relève aucune dégradation des scores de réponses aux tests lorsque les niveaux d’exposition ne dépassent pas 25 ppm pour le N2O et 0,5 ppm pour l’isoflurane [37].Dans des conditions habituelles d’exposition, il paraît peu probable que ces effets centraux du N2O qui résultent de son action inhibitrice du récepteur N-méthyl-D-aspartate (NMDA) glutamatergique aient une influence significative sur les capacités de jugement du personnel soignant et donc sur la sécurité du patient. Il existerait même chez le personnel des blocs opératoires un phénomène de tolérance aux gaz anesthésiques semblable à celui observé avec l’alcool. Après exposition, des élèves infirmières travaillant en unités de soins obtiennent de moins bons résultats aux tests psychomoteurs que leurs consoeurs des blocs opératoires [38].

Manifestations neuropsychologiques

Le personnel des blocs opératoires se plaint fréquemment de ,nausées, de troubles de l’humeur, d’irritabilité, de fatigue, de céphalées. Ces symptômes non spécifiques sont identiques à ceux du Syndrome des bâtiments malsains ou sick building syndrome (SBS) des Anglo-Saxons. Certains auteurs les attribuent à l’exposition chronique aux gaz anesthésiques, d’autres les imputent aux conditions psychologiques de travail. Le syndrome neuropsychologique décrit en France par Saurel- Cubizolles, association d’au moins deux des trois symptômes suivants (céphalées, vertiges, ralentissement des réactions), s’observerait chez 22 % des personnels de bloc lorsque le taux de renouvellement de l’air est inférieur à 10 vol h–1 [3]. La surmortalité par suicide observée chez les anesthésistes mâles anglais par rapport aux hommes de condition sociale similaire est en fait identique à celle d’autres médecins [39].

Effets neurologiques périphériques

Des dysesthésies à type de fourmillements sont fréquemment rapportées par le personnel des blocs de chirurgie pédiatrique et des cabinets de dentistes soumis à des niveaux élevés d’exposition au N2O [3, 40].

Les atteintes neurologiques sévères à type de myélopathie sont exceptionnelles et résultent d’expositions répétées à des concentrations élevées de protoxyde d’azote. Elles s’observent généralement dans le cadre d’une toxicomanie et sont plus rarement la conséquence exclusive d’une exposition professionnelle [41]. Le tableau clinique est celui d’une sclérose combinée de la moelle par carence en vitamine B12, associant une dégénérescence des cordons postérieurs et latéraux. Les signes prédominants sont les paresthésies et l’ataxie. Les manifestations neurologiques peuvent précéder l’atteinte hématologique et la récupération tardive s’accompagne parfois de séquelles. À l’imagerie par résonance magnétique (IRM), l’atteinte médullaire se traduit par un hypersignal de siège cervical évocateur sur les séquences pondérées en T2 [41].

Une enquête récente, menée auprès des infirmières anesthésistes suédoises, fait état d’une incidence accrue de scléroses en plaques [42].

Cette étude comporte plusieurs biais, le niveau d’exposition n’est pas évalué, l’enquête par questionnaire est rétrospective et divers facteurs confondants (consommation de tabac, exposition aux radiations ionisantes...) ne sont pas pris en compte.

Mécanisme de la toxicité du protoxyde d’azote

La toxicité neurologique, mais également les effets sur la reproduction et les effets hématologiques du N2O résultent de son interaction avec la vitamine B12 (cobalamine) [43]. La forme réduite de la vitamine B12 est la coenzyme d’une enzyme cytosolique, la méthionine synthétase, qui catalyse la déméthylation du 5-méthyltétrahydrofolate en tétrahydrofolate (THF) et la reméthylation de l’homocystéine en méthionine. La S-adénosylméthionine, forme activée de la méthionine, est le principal donneur de groupements méthyles nécessaires à la synthèse de la myéline, des neurotransmetteurs et de l’acide désoxyribonucléique (ADN) des tissus à renouvellement rapide tel le tissu hématopoïétique (Fig. 1).

Le N2O qui ne subit aucune biotransformation dans l’organisme se comporte comme un agent oxydant qui inactive la vitamine B12 par oxydation irréversible de son atome de cobalt.

La toxicité du N2O est concentration- et temps-dépendante.

En pratique clinique, son administration aux concentrations anesthésiques s’accompagne d’une réduction précoce de l’activité de la méthionine synthétase corrélée au niveau et à la durée de l’exposition qui persiste 3-4 jours. Chez le rat, cet effet n’est significatif que pour des concentrations de N2O inhalées excédant 1 000 ppm [44]. Chez des anesthésistes exposés à des concentrations de 150 à 400 ppm, aucune réduction de l’activité de la méthionine synthétase n’est décelable [45]. Ceci rend improbable une toxicité neurologique du protoxyde d’azote dans le cadre d’une exposition professionnelle. Il convient de noter que chez le rat, la foetotoxicité du N2O ne s’exprime que pour un niveau d’exposition dépassant 500-1 000 ppm ce qui correspond au seuil d’inactivation de la méthionine synthétase [19].

Toxicité hépatique

La toxicité hépatique des agents anesthésiques par inhalation concerne exclusivement les halogénés [46]. Chez l’homme, la toxicité de l’halothane relève de deux mécanismes. Le premier, spécifique de la voie réductrice du métabolisme de l’halothane, est généralement infraclinique et se traduit par une discrèteélévation des enzymes hépatiques. Le second, rare (1/20 000 à 1/35 000), est responsable d’une hépatite aiguë grave. Parmi les facteurs de risque identifiés, on relève l’obésité, le sexe féminin, l’âge intermédiaire (l’atteinte hépatique est exceptionnelle chez l’enfant) et surtout la répétition des expositions sur une période courte. Son mécanisme est immunoallergique comme en témoigne la présence dans le sérum des sujets d’immunoglobulines (Ig) G dirigées contre des protéines microsomiales hépatiques modifiées [46].

Le métabolisme hépatique de l’halothane par le cytochrome P450 2EI conduit à la formation d’un métabolite intermédiaire, l’acide trifluoroacétique (TFA). Le TFA se comporte comme un haptène monovalent qui se fixe de manière covalente sur les protéines du réticulum des hépatocytes.

Ces molécules hybrides ou adduits peuvent constituer des néoantigènes et induire une réaction auto-immune avec synthèse d’anticorps antihépatocytes. Le risque d’hépatite est corrélé à la quantité de néoantigènes formés qui est elle-même proportionnelle au degré de métabolisation hépatique de l’halogéné : halothane (20 %), enflurane (3-5 %), isoflurane (0,2-0,5 %), desflurane (0,05 %). Ceci explique la faible toxicité hépatique de l’enflurane, de l’isoflurane et tout particulièrement du desflurane [47]. Les rares cas d’hépatites impliquant l’enflurane ou l’isoflurane concernent le plus souvent des sujets préalablement anesthésiés avec de l’halothane, ce qui est en faveur d’une sensibilisation croisée entre halogénés [48, 49]. De 1981 à 1984, 16 cas d’hépatites à l’isoflurane ont été déclarés à la Food and Drug Administration (FDA) sur environ 14 millions de patients anesthésiés avec cet halogéné. Un seul cas d’hépatite auto-immune au desflurane a été publié [50].

À la différence des autres halogénés, le sévoflurane n’a pas pour métabolite le TFA mais l’hexafluoro-isopropanol (HFIP).Le HFIP est rapidement éliminé dans les urines après glycuroconjugaison et n’est pas immunogène, ce qui écarte le risque d’hépatite auto-immune.

 Pour autant, une toxicité hépatique du sévoflurane ne peut être exclue ; d’exceptionnels cas d’hépatites postopératoires sont rapportés [51].

Plusieurs cas d’hépatites auto-immunes induites par l’halothane et confirmées par la présence d’anticorps sont rapportés après exposition chronique à cet halogéné [52]. En France, l’hépatite à l’halothane est reconnue comme une maladie professionnelle (tableau n° 89) par décret du 13 septembre 1989. Elle se définit comme une hépatite ayant récidivé après nouvelle exposition et confirmée par des tests biochimiques, après exclusion d’une autre étiologie. Son délai de prise en charge est de 15 jours. Dans son rapport au Bureau international du travail, l’inspection du Travail en France en mentionne sept cas pour la période 1990-2000.

Il est actuellement établi qu’une exposition professionnelle aux halogénés les plus récents ne comporte aucun risque hépatique [46].

Effets mutagènes et cancérigènes

L’article R. 231-51 du Code du travail définit un agent mutagène comme une substance ou préparation qui, par inhalation, ingestion ou pénétration cutanée, peut produire des défauts génétiques héréditaires ou en augmenter la fréquence.

Pour une substance donnée, il existe une relation entre son potentiel cancérigène et l’activité mutagène ou génotoxique établie à partir de tests in vitro et d’études chez l’animal.

Tests in vitro

Différents tests in vitro sont utilisés pour leur capacité à détecter des lésions du patrimoine génétique lors d’une exposition à des agents toxiques. Le test d’Ames, qui recourt à une salmonelle typhique déficiente en une enzyme nécessaire à la synthèse de l’histidine pour mettre en évidence un éventuel effet mutagène, est le plus utilisé. En cas de mutation, les bactéries mutées récupèrent cette possibilité de synthèse. La plupart des études utilisant ce test, notamment celles de Baden et al., n’ont pas permis de mettre en évidence d’effet mutagène des halogénés [18, 53].

Dans le cadre de la « biosurveillance » du personnel, les lymphocytes provenant du sang veineux de sujets exposés peuvent être mis en culture et leur division cellulaire stimulée afin d’en pratiquer l’analyse chromosomique. L’accroissement de la fréquence des aberrations chromosomiques, des échanges entre chromatides soeurs et du nombre de micronoyaux témoigne des dommages occasionnés à l’ADN par l’agent toxique. Les résultats des études réalisées chez les personnels exposés ne sont pas concordants, d’autant que les niveaux d’exposition ne sont pas toujours précisés [12]. L’augmentation des échanges de chromatides soeurs dans les lymphocytes du personnel exposé au protoxyde d’azote, à l’halothane et, à un degré moindre, aux halogénés les plus récents, n’est pas observée par l’ensemble des auteurs [54, 55]. Les effets génotoxiques secondaires à l’exposition chronique au N2O et à l’isoflurane seraient comparables à ceux résultant de la consommation de 11 à 20 cigarettes par jour [54].

Pour Wiesner et al., l’exposition à des concentrations élevées de N2O (170 ppm) et d’halogéné (4 ppm) augmente la formation de micronoyaux dans les lymphocytes [56]. Cet effet n’est pas observé lorsque le niveau d’exposition est faible (N2O : 12 ppm ; halogéné : 0,5 ppm).

Études animales

L’exposition prolongée de rats à de faibles concentrations d’halothane et de protoxyde d’azote (1 ppm et 50 ppm ou 10 ppm et 500 ppm) est responsable d’altérations chromosomiques intéressant les cellules médullaires et les spermatozoïdes, mais ne s’accompagne pas d’une augmentation des néoplasies [57]. Plus généralement, les données issues des études animales ne sont pas en faveur d’effets cancérigènes du protoxyde d’azote, de l’halothane et de l’isoflurane [18, 53]. Les effets cancérigènes du sévoflurane et du desflurane n’ont pas été testés chez l’animal.

Aux États-Unis, la FDA, organisme qui régule la mise sur le marché des médicaments, a considéré qu’en l’absence d’effet cancérigène démontré pour l’halothane, l’enflurane et l’isoflurane, il existait une sécurité de groupe applicable aux halogénés les plus récents.

Études épidémiologiques

Les premières enquêtes épidémiologiques rapportaient une incidence accrue de cancers, de leucémies et de lymphomes [1, 40]. Ces études, dont la méthodologie est critiquable, ne prennent pas toujours en compte les autres facteurs de risque que sont les expositions aux radiations ionisantes ou aux désinfectants, et elles surestiment vraisemblablement le potentiel cancérigène.

Les travaux les plus récents ne montrent aucune incidence particulière de cancers ou d’affections chroniques parmi le personnel exposé [58]. Aucune surmortalité par cancer n’est en particulier notée chez les 3 769 anesthésistes anglais mâles suivis de 1957 à 1983 [59].

Le risque de cancer secondaire à l’exposition aux gaz anesthésiques apparaît comme peu probable [8-10]. Le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) classe les agents chimiques, physiques et biologiques ainsi que les modes d’exposition à ces agents en quatre catégories : cancérogènes pour l’homme (groupe 1) ; probablement cancérogènes pour l’homme (groupe 2A) ; peut-être cancérogènes pour l’homme (groupe 2B) ; inclassables quant à leur cancérogénicité (groupe 3) et non cancérogènes pour l’homme (groupe 4). L’absence d’activité cancérogène observée chez l’animal, ainsi que l’absence de données épidémiologiques valides en faveur d’une augmentation du nombre de certains cancers ont conduit le CIRC en 1987 à classer l’halothane, l’enflurane et l’isoflurane dans le groupe 3. Aux États-Unis, l’American Conference of Governmental Industrial Hygienists (ACGIH) a conclu à l’absence d’effet cancérogène du N2O et de l’halothane en les classant dans le groupe A4 (substance not classifiable as a human carcinogen).

Système immunitaire

Les données expérimentales et cliniques établissant un lien de causalité entre l’exposition chronique aux gaz anesthésiques et le dérèglement du système immunitaire sont contradictoires [60, 61].

Les effets sur l’immunité paraissent dépendre de l’agent utilisé, du degré d’exposition, mais également de l’âge des sujets exposés. Pour Peric et al., l’exposition à des concentrations élevées d’halothane et de protoxyde d’azote a pour conséquence des modifications de la formule sanguine avec une disparition des basophiles, une diminution durable des lymphocytes B et des cellules tueuses naturelles (NK) associée à une augmentation relative des lymphocytes CD2 et CD4 [60]. En revanche, pour Bargellini et al., l’exposition chronique à de faibles concentrations de N2O et d’isoflurane détermine une diminution des lymphocytes T (CD3) et une majoration des cellules tueuses NK (CD16+ CD3– ) [61]. Une inhibition de l’apoptose neutrophile a également été mise en évidence chez des sujets exposés à de faibles concentrations de N2O, de sévoflurane et d’isoflurane [62]. Ces anomalies du système immunitaire, qui ne sont pas observées par tous les auteurs, sont a priori sans conséquence clinique notable.

Toxicité hématologique

La toxicité hématologique du protoxyde d’azote est connue depuis les années 1950 au cours desquelles plusieurs patients atteints de tétanos recevant une sédation comportant du N2O ont développé une aplasie médullaire. Lorsqu’on administre du N2O à la concentration de 70 %, des anomalies des lignées sanguines, mégaloblastose et hypersegmentation des neutrophiles, apparaissent dès la 24e heure [63]. Chez des dentistes soumis à des niveaux d’exposition dépassant 4 000 ppm, on peut observer des anomalies de la lignée granulocytaire avec un test de suppression à la désoxyuridine positif mais sans modification des taux sanguins de vitamine B12 et de folates [64]. Des niveaux d’exposition plus faibles sont sans conséquences ; même en l’absence de dispositif d’évacuation des gaz, Salo et al. ne relèvent aucune diminution de la concentration plasmatique en vitamine B12 et en folates, ni aucune anomalie des lignées sanguines chez des anesthésistes et des infirmières de bloc opératoire [65]. On peut en conclure que, dans le cadre d’une exposition professionnelle à de faibles concentrations de protoxyde d’azote, la survenue d’effets hématologiques est improbable. Les halogénés sont dépourvus de toxicité sanguine.

Toxicité rénale

Aucune toxicité rénale n’est imputable au protoxyde d’azote et aux halogénés récents dans le cadre d’une exposition professionnelle.

Toxicité pulmonaire

Un seul cas d’asthme grave survenu chez un anesthésiste, confirmé par un test de provocation positif à l’enflurane, a été publié [66].

Allergie cutanée

Des cas de dermite allergique de contact aux vapeurs d’halothane et d’isoflurane ont été rapportés [67].


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30 juin 2011 4 30 /06 /juin /2011 11:43

 

 

 

PRISE EN CHARGE DE L’EXPOSITION / INFECTION À LA RUBÉOLE CHEZ LES FEMMES ENCEINTES

 

 

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La prise en charge d’une femme enceinte exposée doit être personnalisée et s’effectuer en fonction de son état immunitaire et de l’âge gestationnel au moment de l’exposition. Il est souvent difficile de confirmer la présence d’une infection aiguë au virus de la rubéole chez les femmes enceintes. Le diagnostic clinique est peu fiable, en raison du grand nombre de cas subcliniques et du fait que les caractéristiques cliniques de la rubéole peuvent être très semblables à celles d’autres maladies. La Figure offre un guide pour la prise en charge des femmes enceintes exposées ou des femmes qui présentent des symptômes rappelant la rubéole au cours de la grossesse.

Lorsqu’une femme enceinte présente des symptômes d’une maladie rappelant la rubéole ou a récemment été exposée à la rubéole, son état immunitaire et l’âge gestationnel devraient être déterminés.

1. Présence établie d’une immunité 12e semaine de gestation.

a. Aucun autre dépistage n’est nécessaire. Aucun cas d’ER n’a été signalé à la suite d’une réinfection maternelle au-delà de la 12e semaine de gestation19 .

2. Présence établie d’une immunité 12e semaine de gestation.

a. Lorsque le titre d’anticorps de l’IgG de la rubéole connaît une hausse significative sans que l’on puisse détecter la présence d’anticorps de l’IgM chez ces femmes, elles devraient être avisées que la présence d’une réinfection est probable20

. Le risque fœtal d’infection congénitale à la suite d’une réinfection maternelle au cours du premier trimestre a été estimé à 8 % (IC à 95 % 2-22 %)19

. Des conseils appropriés devraient être offerts.

3. Non immunisée ou immunité inconnue.

a. Âge gestationnel 16 semaines.

i. Les titres d’anticorps de l’IgG et de l’IgM pendant la phase aiguë et pendant la convalescence devraient être obtenus. (Le diagnostic d’une infection récente au virus de la rubéole devrait comprendre un test sérologique visant tant les anticorps de l’IgG que ceux de l’IgM pendant la phase aiguë.) L’infection aiguë est diagnostiquée lorsque les résultats sont positifs en ce qui concerne les anticorps de l’IgM. Lorsque les résultats sont négatifs ou en l’absence de résultats en ce qui concerne les anticorps de l’IgM, une analyse d’échantillons de sérum appariés (en phase aiguë et pendant la convalescence) visant les anticorps de l’IgG devrait être effectuée. En présence d’une maladie rappelant la rubéole, l’échantillon en phase aiguë devrait être prélevé dès que possible; de deux à trois semaines plus tard, lorsque le premier échantillon s’est avéré négatif en ce qui concerne l’IgM, un échantillon devrait être prélevé pendant la convalescence.

Lorsque l’on soupçonne une exposition, un échantillon en phase aiguë devrait être prélevé immédiatement puis, de quatre à cinq semaines plus tard, un échantillon devrait être prélevé pendant la convalescence.

b. Âge gestationnel se situant entre la 16e et la 20e semaine de gestation.

i. Il est rare de constater une ER entre la 16e et la 20e semaine de gestation (< 1 %); le cas échéant, elle peut se manifester sous forme d’une surdité de perception (souvent grave) chez le nouveau-né.

Des conseils appropriés devraient être offerts aux femmes enceintes non immunisées.

c. Âge gestationnel > 20 semaines.

i. Une femme enceinte exposée à la rubéole ou présentant une maladie rappelant la rubéole après la 20e semaine de gestation devrait être rassurée, puisque aucune étude n’a signalé de cas d’ER après la 20e semaine de gestation9,13,14,18 .

d. Difficulté en matière de diagnostic : présentation tardive et état immunitaire inconnu.

i. Lorsqu’une femme enceinte se présente à l’hôpital cinq semaines ou plus à la suite d’une exposition à une maladie impliquant un rash, ou encore quatre semaines ou plus à la suite de l’apparition d’un rash, le personnel traitant fait face à un dilemme diagnostique. Lorsque les résultats sont négatifs en ce qui concerne les anticorps de l’IgG, la patiente est clairement sensible à la rubéole et ne présente aucun signe d’une infection récente.

Lorsque les résultats sont positifs en ce qui concerne les anticorps de l’IgG, on fait donc face à des signes d’une infection précédente. Il est alors difficile de déterminer la date de l’infection et le risque pour le fœtus, et ce, bien qu’un faible taux d’anticorps semble indiquer une infection remontant à plus longtemps. La tenue de tests visant les anticorps de l’IgM ou la répétition du test visant à évaluer les taux d’anticorps de l’IgG, en vue de déterminer la présence d’une hausse ou d’une baisse significative, peut être envisagée.

 

Recommandation

3. Chez les femmes enceintes qui sont exposées à la rubéole ou qui présentent des symptômes de rubéole, des tests sérologiques devraient être effectués afin de déterminer l’état immunitaire et le risque d’embryopathie rubéolique. (III-A)

TRAITEMENT

En présence d’une infection aiguë au virus de la rubéole, le recours à un traitement de soutien s’impose. Le pronostic est généralement excellent en ce qui concerne les femmes enceintes qui présentent une infection au virus de la rubéole.

Aucune donnée ne soutient le recours à l’immunoglobuline visant à diminuer la réaction fœtale à la maladie chez les femmes enceintes qui présentent une infection aiguë. Les

Centers for Disease Control recommandent d’en limiter l’utilisation aux femmes dont l’exposition à la rubéole a été déterminée et qui refusent l’interruption de grossesse26 .

LE VACCIN

Le premier vaccin à virus vivant atténué contre la rubéole a été lancé en 1969. Une dose unique de ce vaccin génère des taux mesurables d’anticorps chez près de 95 % des personnes sensibles. Ces taux d’anticorps persistent pendant au moins 18 ans chez plus de 90 % des personnes vaccinées5

. L’échec primaire du vaccin contre la rubéole survient dans le cadre de moins de 5 % des immunisations27

. Bien que la réinfection soit possible chez les femmes enceintes immunisées, ces réinfections n’ont entraîné qu’un risque d’ER de 8 % au cours du premier trimestre de la grossesse19 .

Le vaccin contre la rubéole est habituellement bien toléré. Parmi les rares effets indésirables de la vaccination, on trouve l’arthrite, l’arthralgie, le rash, l’adénopathie et la fièvre27

. La fréquence réelle de l’arthralgie ou de l’arthrite aiguë attribuable à la vaccination chez les femmes non immunisées est de l’ordre de 5 % dans les deux cas.

Cependant, aucun résultat n’indique une quelconque hausse du risque d’une nouvelle apparition d’arthropathies chroniques ou de troubles neurologiques chez les femmes qui reçoivent le vaccin contre la rubéole RA27/3. Aucune donnée épidémiologique ne soutient l’association entre l’ER ou l’autisme et le vaccin ROR28 .

Parmi les contre-indications à la vaccination contre la rubéole, on trouve la présence d’une maladie fébrile, l’immunodéficience, les antécédents de réaction anaphylactique à la néomycine et la grossesse1

. Le virus que contient le vaccin contre la rubéole présente le potentiel de traverser le placenta et d’infecter le fœtus1

. Cependant, aucun cas d’ER n’a été signalé chez les enfants des femmes ayant été vaccinées par inadvertance au cours des premiers mois de la grossesse29,30

. Ainsi, l’interruption de grossesse n’est pas recommandée pour ces patientes31

. Compte tenu des risques potentiels pour le fœtus, les femmes sont avisées d’éviter la grossesse pendant une période de 28 jours à la suite de l’immunisation32

Le vaccin peut être administré en toute sûreté, pendant la période postpartum, aux femmes qui allaitent; il peut, de plus, être administré aux enfants de femmes enceintes, puisque l’infection ne peut être transmise par des personnes récemment immunisées. L’allaitement n’est PAS contreindiqué5

. Le vaccin peut être administré conjointement avec d’autres préparations d’immuno- globuline (comme l’immunoglobuline Rh)7 .

 Recommandations

4. L’immunisation contre la rubéole ne devrait pas être administrée au cours de la grossesse; elle peut toutefois l’être, en toute sûreté, pendant la période postpartum. (III-B)

5. Les femmes ayant été vaccinées par inadvertance au cours des premiers mois de la grossesse ou celles qui sont devenues enceintes immédiatement à la suite de la vaccination peuvent être rassurées, puisque aucun cas d’embryopathie rubéolique n’a été documenté dans de telles circonstances. (III-B)

PRÉVENTION

La prévention constitue la meilleure façon de contrer l’ER.

Toutes les filles devraient être vaccinées contre la rubéole avant d’être en âge de procréer.

Pour prévenir l’ER, les étapes suivantes sont recommandées :

1. Offrir un programme universel d’immunisation infantile en vue de restreindre la circulation du virus (mis en œuvre dans toutes les provinces en 1983).

2. Faire appel au vaccin contre la rougeole, les oreillons et la rubéole ou au vaccin contre la rougeole-rubéole à titre d’agent immunisant dans le cadre des campagnes de rattrapage, ainsi qu’à titre de deuxième dose dans le cadre du nouveau programme d’immunisation systématique à deux doses contre la rougeole (ce qui pourrait accélérer l’éradication de la rubéole).

3. S’assurer que les filles sont immunisées avant d’être en âge de procréer, ainsi que profiter de chacune des occasions d’évaluer l’immunité des femmes en âge de procréer et d’administrer une vaccination, au besoin (consultations préconceptionnelles et pour des raisons d’infertilité).

4. Procéder à un dépistage afin d’évaluer le taux d’anticorps de toutes les femmes enceintes, de façon à déterminer la sensibilité.

5. Offrir des programmes visant à assurer l’immunisation postpartum des femmes non immunisées avant qu’elles n’obtiennent leur congé de l’hôpital.

6. Procéder à un dépistage de l’immunité (et à une vaccination, au besoin) de tous les membres du personnel des soins de santé, y compris les étudiants en formation.

7. Procéder à l’immunisation de toutes les immigrantes et de toutes les réfugiées au moment de leur premier contact avec le système de soins de santé canadien, à moins que celles-ci ne disposent de documents attestant d’une immunité efficace (naturelle ou attribuable à la vaccination).

Recommandation

6. Les femmes souhaitant devenir enceintes devraient être conseillées et incitées à se soumettre à la vérification de leur état immunitaire et à une vaccination contre la rubéole, au besoin. (I-A)

CONCLUSION

L’infection au virus de la rubéole au cours de la grossesse peut exercer des effets dévastateurs sur le fœtus en développement. L’immunisation universelle de tous les enfants canadiens et l’identification et l’immunisation des immigrantes courant des risques constituent les piliers de la prévention. Le diagnostic de l’infection devrait être établi dès que possible. Le contact avec la rubéole devrait être évité au cours des deux premiers trimestres de la grossesse, et ce, même chez les femmes enceintes IgG-positives. Les femmes devraient être avisées des risques possibles de transmission verticale et se voir offrir une interruption de grossesse, particulièrement lorsqu’une infection primaire se manifeste avant la 16e semaine de gestation.

Malheureusement, il n’existe aucun traitement in utero pour les fœtus infectés. Ainsi, la prévention demeure la meilleure stratégie pour l’élimination de tous les cas d’ER.

 

 

 


 

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30 juin 2011 4 30 /06 /juin /2011 11:31

 

 

DIAGNOSTIC DE L’INFECTION AU VIRUS DE LA RUBÉOLE

 

 

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Diagnostic de l’infection maternelle

Il est impératif d’obtenir un diagnostic précis d’infection primaire aiguë au virus de la rubéole au cours de la grossesse (ce qui nécessite un dépistage sérologique), et ce, puisqu’un nombre important de cas sont subcliniques. La sérologie par ELISA visant à mesurer les taux d’IgG et d’IgM propres à la rubéole constitue une mesure pratique, sensible et précise. La présence d’une infection au virus de la rubéole est diagnostiquée par:

• un quadruplement du titre d’anticorps de l’IgG de la rubéole entre les échantillons sériques prélevés pendant la phase aiguë et ceux qui sont prélevés pendant la convalescence;

• un test sérologique positif en ce qui concerne les anticorps de l’IgM propre à la rubéole;

• Une mise en culture positive de la rubéole (isolement du virus de la rubéole dans un prélèvement clinique issu de la patiente)1 .

Les études sérologiques donnent des résultats optimaux lorsqu’elles sont menées dans les 7 à 10 jours suivant l’apparition du rash et devraient être menées à nouveau de deux à trois semaines plus tard.

Il est possible que les mises en culture virales à partir de sécrétions nasales, de sang, de sécrétions de la gorge, d’urine ou de liquide céphalorachidien soient positives lorsqu’elles sont menées pendant la période allant d’une semaine avant l’apparition du rash à deux semaines par la suite1,22 .

Recommandation

2. Le diagnostic d’infection primaire maternelle devrait être établi au moyen d’un test sérologique. (II-2A)

Diagnostic de l’infection fœtale

Certaines séries de cas de faible envergure signalent l’utilité de la PCR visant la rubéole à partir du PVC, en ce qui concerne le diagnostic prénatal d’une infection intra-utérine au virus de la rubéole23,24

. Dans le cadre d’une étude, cette technique s’est avérée supérieure à l’évaluation d’échantillons de liquide amniotique25

. Puisque le PVC est effectué entre la 10e et la 12e semaine de gestation, cette technique permet une détection plus hâtive que celle que permettent les autres types de prélèvements (comme le liquide amniotique prélevé entre la 14e et la 16e semaine de gestation ou  le sang foetal prélévé entre la 18e et la 20e semaine de gestation).

Il est extrêmement difficile d’établir un diagnostic d’ER au moyen de l’échographie. Bien que les données biométriques puissent faciliter le diagnostic du RCIU, elles ne sont pas aussi utiles en ce qui concerne celui de l’ER, compte tenu de la nature des malformations mises en cause. Tout fœtus présentant un RCIU devrait faire l’objet d’une évaluation visant des infections virales congénitales, y compris la rubéole9 .

 



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30 juin 2011 4 30 /06 /juin /2011 11:06

 

 

Rubéole au cours de la grossesse

 

 

 

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La présente directive clinique a été rédigée et analysée par le comité de pratique clinique-obstétrique, analysée par le comité sur les maladies infectieuses et approuvée par le comité exécutif et le Conseil de la Société des obstétriciens et gynécologues du Canada.

AUTEURS PRINCIPAUX

Lorraine Dontigny, MD, FRCSC, Montréal (Québec)

Marc-Yvon Arsenault, MD, MSc, FRCSC, Montréal (Québec)

Marie-Jocelyne Martel MD, FRCSC, Saskatoon (Sask.)

COMITÉ DE PRATIQUE CLINIQUE - OBSTÉTRIQUE

Anne Biringer, MD, CCFP, FCFP, Toronto (Ont.)

Johanne Cormier, inf. aut., Lasalle (Québec)

Martina Delaney, MD, FRCSC, St. John’s (T.-N.-L.)

Tom Gleason, MD, FRCSC, Edmonton (Alb.)

Dean Leduc, MD, CCFP, Orleans (Ont.)

Marie-Jocelyne Martel, MD, FRCSC, (présidente) Saskatoon (Sask.)

Debbie Penava, MD, FRCSC, London (Ont.)

Joshua Polsky, MD, FRCSC, Windsor (Ont.)

Anne Roggensack, MD, FRCSC, Toronto (Ont.)

Carol Rowntree, MD, CCFP, Sundre (Alb.)

Ann Kathleen Wilson, BHSc, sage-femme aut., Ilderton (Ont.)

 

Résumé

Objectif : Offrir une mise à jour sur la rubéole au cours de la grossesse, de façon à permettre aux professionnels de la santé de demeurer sensibles aux effets potentiellement dévastateurs de cette maladie sur le fœtus en développement.

Issues : La vaccination anti-rubéole a permis de pratiquement éliminer l’embryopathie rubéolique au Canada.

Résultats : Des recherches ont été menées dans Medline, PubMed et la base de données Cochrane en vue d’en tirer des articles publiés entre 1985 et 2007.

Valeurs : La qualité des résultats a été établie au moyen des critères décrits dans le rapport du Groupe d’étude canadien sur les soins de santé préventifs.

Commanditaire : La Société des obstétriciens et gynécologues du Canada.

J Obstet Gynaecol Can, vol. 30, n° 2, 2008, p. 159–166

Recommandations

1. Les effets de l’embryopathie rubéolique varient en fonction de l’âge gestationnel au moment de l’infection; ainsi, une attention particulière devrait être accordée à la précision de la datation gestationnelle puisque celle-ci s’avère d’une importance cruciale en matière de prise en charge. (II-3A)

2. Le diagnostic d’infection primaire maternelle devrait être établi au moyen d’un test sérologique. (II-2A)

3. Chez les femmes enceintes qui sont exposées à la rubéole ou qui présentent des symptômes de rubéole, des tests sérologiques devraient être effectués afin de déterminer l’état immunitaire et le risque d’embryopathie rubéolique. (III-A)

4. L’immunisation contre la rubéole ne devrait pas être administrée au cours de la grossesse; elle peut toutefois l’être, en toute sûreté, pendant la période postpartum. (III-B)

5. Les femmes ayant été vaccinées par inadvertance au cours des premiers mois de la grossesse ou celles qui sont devenues enceintes immédiatement à la suite de la vaccination peuvent être rassurées, puisque aucun cas d’embryopathie rubéolique n’a été documenté dans de telles circonstances. (III-B)

6. Les femmes souhaitant devenir enceintes devraient être conseillées et incitées à se soumettre à la vérification de leur état immunitaire et à une vaccination contre la rubéole, au besoin. (I-A)

INTRODUCTION

La rubéole, aussi connue sous le nom de roseola epidemica, est une maladie de l’enfance dont l’incidence a connu une baisse marquée en Amérique du Nord depuis la mise en œuvre de la vaccination systématique contre la rubéole au cours de l’enfance. En l’absence de grossesse, cette maladie se manifeste habituellement, sur le plan clinique, sous forme d’une légère infection spontanément résolutive1

. Au cours de la grossesse, cependant, le virus peut exercer des effets potentiellement dévastateurs sur le fœtus en développement. Ce virus s’est avéré directement responsable d’un nombre inestimable de cas de déperdition et de graves malformations congénitales1

. Le présent document examine certaines des implications de la rubéole au cours de la grossesse. Les recommandations sont évaluées au moyen des critères établis par le Groupe d’étude canadien sur les soins de santé préventifs (Tableau 1)2.

Les directives cliniques font état des percées récentes et des progrès cliniques et scientifiques à la date de publication de celles-ci et peuvent faire l’objet de modifications. Il ne faut pas interpréter l’information qui y figure comme l’imposition d’un mode de traitement exclusif à suivre. Un établissement hospitalier est libre de dicter des modifications à apporter à ces opinions. En l’occurrence, il faut qu’il y ait documentation à l’appui de cet établissement. Aucune partie de ce document ne peut être reproduite sans une permission écrite de la SOGC.

 

Tableau 1 Critères d’évaluation des résultats et de classification des recommandations, fondés sur ceux du Groupe d’étude canadien sur les soins de santé préventifs

Niveaux de résultats*

Catégories de recommandations†

I : Résultats obtenus dans le cadre d’au moins un essai comparatif convenablement randomisé.

II-1 : Résultats obtenus dans le cadre d’essais comparatifs non randomisés bien conçus.

II-2 : Résultats obtenus dans le cadre d’études de cohortes (prospectives ou rétrospectives) ou d’études analytiques cas-témoins bien conçues, réalisées de préférence dans plus d’un centre ou par plus d’un groupe de recherche.

II-3 : Résultats découlant de comparaisons entre différents moments ou différents lieux, ou selon qu’on a ou non recours à une intervention. Des résultats de première importance obtenus dans le cadre d’études non comparatives (par exemple, les résultats du traitement à la pénicilline, dans les années 1940) pourraient en outre figurer dans cette catégorie.

III : Opinions exprimées par des sommités dans le domaine, fondées sur l’expérience clinique, études descriptives ou rapports de comités d’experts.

A. On dispose de données suffisantes pour appuyer la mesure clinique de prévention.

B. On dispose de données acceptables pour appuyer la mesure clinique de prévention.

C. Les données existantes sont contradictoires et ne permettent pas de formuler une recommandation pour ou contre l’usage de la mesure clinique de prévention; cependant, d’autres facteurs peuvent influer sur la prise de décision.

D. On dispose de données acceptables pour déconseiller la mesure clinique de prévention.

E. On dispose de données suffisantes pour déconseiller la mesure clinique de prévention.

I. Les données sont insuffisantes (d’un point de vue qantitatif ou qualitatif) et ne permettent pas de formuler une recommandation; cependant, d’autres facteurs peuvent influer sur la prise de décision.

*La qualité des résultats signalés dans les présentes directives cliniques a été établie conformément aux critères d ’évaluation des résultats présentés dans le Rapport du Groupe d’étude canadien sur les soins de santé préventifs 

 † Les recommandations que comprennent les présentes directives cliniques ont été classées conformément à la méthode de classification décrite dans le Rapport du Groupe d’étude canadien sur les soins de santé préventifs .

 

ÉPIDÉMIOLOGIE

Le programme de vaccination anti-rubéole lancé en 1969 s’est avéré d’une grande efficacité3

. La rubéole et l’ER ont presque totalement été éradiquées au Canada4

. Cependant, nous continuons à constater des cas d’ER au Canada et dans d’autres régions du monde; ainsi, l’ER constitue toujours une préoccupation5 .

Au Canada, avant la mise en œuvre de la vaccination anti-rubéole en 1969, des épidémies de rubéole se manifestaient à intervalles irréguliers de trois à dix ans.

Après 1970, l’incidence de la rubéole a connu une baisse marquée et a été maintenue à un taux endémique moyen de 4/100 000 personnes par année. Ce qui représente une moyenne de 1 000 cas signalés/an, plage allant de 237 à 2 4505

. Le virus de la rubéole continue de circuler au sein de la communauté et ce ne sont pas toutes les femmes enceintes qui sont immunisées. En effet, certains segments de la population ne sont pas immunisés contre la rubéole parce qu’ils n’ont pas été repérés, qu’ils refusent l’immunisation ou qu’ils proviennent de pays où la vaccination anti-rubéole ne fait pas partie du programme d’immunisation systématique5 .

La Canada a connu d’importantes flambées de rubéole au cours des années 1990. Ces flambées constituaient le reflet des politiques d’immigration canadiennes des années 1970 et 1980, ainsi que celui des politiques actuelles en matière d’immunisation à l’échelle internationale5

. En 2005, 220 cas de rubéole ont été confirmés dans trois comtés en Ontario.

La plupart de ces cas affectaient des membres d’une communauté religieuse qui comptait de nombreux membres n’ayant pas été vaccinés ou n’ayant pas accepté la gamme complète de vaccins systématiquement recommandée6

. Voilà de quoi nous rappeler que la rubéole n’est pas seulement une maladie qui affecte les immigrants non immunisés. Le Canada peut encore connaître des épidémies et il est possible que les femmes enceintes nées au Canada courent des risques d’infection.

ABBRÉVIATIONS

ELISA Dosage immunoenzymatique

ER Embryopathie rubéolique

IC Intervalle de confiance

IgG Immunoglobuline G

IgM Immunoglobuline M

PCR Amplification en chaîne par polymérase

PVC Prélèvement de villosités choriales

RCIU Retard de croissance intra-utérin

ROR Rougeole, oreillons, rubéole

 

MANIFESTATIONS CLINIQUES

Chez les femmes n’étant pas enceintes, la rubéole consiste habituellement en une infection entraînant des effets mineurs qui est caractérisée par une maladie bénigne spontanément résolutive associée à un rash caractéristique1,6

. La période d’incubation de la rubéole s’étend de 12 à 23 jours. Sa période infectieuse débute au cours des 7 jours précédant l’apparition du rash et prend fin de 5 à 7 jours par la suite1

. Bien que la rubéole soit asymptomatique dans de 25 % à 50 % des cas, certaines personnes peuvent connaître de légers symptômes prodromiques, tels qu’une température subfébrile, une conjonctivite, un mal de gorge, un coryza, des maux de tête ou un malaise et une lymphadénopathie douloureuse. Ces symptômes prodromiques dureront habituellement d’un à cinq jours et seront suivis de l’apparition du rash scarlatiniforme, lequel peut s’avérer légèrement prurigineux4

. Ce rash apparaît d’abord typiquement sur le visage, pour ensuite s’étendre au tronc et aux membres. Il se résorbe habituellement dans un délai de trois jours, selon le même ordre dans lequel il est apparu (le visage d’abord et le corps par la suite)7 .

 La polyarthrite et la polyarthralgie font partie des séquelles possibles, apparaissant principalement chez les adolescentes et les femmes adultes (60 %–70 %) environ une semaine à la suite du rash8

. Habituellement, les mains, les genoux, les poignets et les chevilles sont affectés de façon symétrique, et la douleur est d’une durée d’environ une à quatre semaines. L’arthrite chronique n’apparaît que dans de rares cas. Parmi les autres manifestations possibles, mais rares, on trouve la ténosynovite, le syndrome du canal carpien, la thrombocytopénie, l’encéphalite postinfectieuse, la myocardite, l’hépatite, l’anémie hémolytique et le syndrome hémolytique et urémique9,10 .

EMBRYOPATHIE RUBÉOLIQUE

Par ER, on entend les manifestations néonatales de l’infection prénatale au virus de la rubéole. L’infection affecte bon nombre de systèmes fœtaux1,11,12

. Le risque d’anomalies ER varie en fonction de l’âge gestationnel au moment de l’infection maternelle7

. Ainsi, les conseils offerts en ce qui a trait au risque pour le fœtus et la prise en charge des femmes enceintes doivent être personnalisés.

L’infection verticale transplacentaire au virus de la rubéole peut exercer des effets catastrophiques sur le fœtus en développement, entraînant un avortement spontané, une infection fœtale, une mortinaissance ou un retard de croissance intra-utérin13

. Bon nombre des enfants nés en présentant une ER connaîtront des déficits neuromoteurs persistants plus tard au cours de leur vie. La pneumonite, le diabète sucré, les troubles thyroïdiens et la panencéphalite évolutive figurent au nombre des expressions tardives de l’ER14,15

.Les manifestations tardives et les anomalies congénitales les plus courantes apparaissent au Tableau 212,14,15.

TRANSMISSION VERTICALE ET RISQUE D’ER

L’infection fœtale est acquise par voie hématogène et le taux de transmission varie en fonction de l’âge gestationnel au moment de l’infection maternelle. Après avoir infecté le placenta, le virus de la rubéole se propage au sein du système vasculaire du fœtus en développement, exerçant des effets cytopathogènes sur les vaisseaux sanguins et causant une ischémie dans les organes en développement16.

Lorsque l’infection / exposition maternelle survient au cours du premier trimestre, les taux d’infection fœtale atteignent près de 80 %, chutent à 25 % à la fin du deuxième trimestre et, au cours du troisième trimestre, passent de 35 % entre la 27e et la 30e semaine de gestation à près de 100 % au-delà de la 36e semaine de gestation7

. On a signaléque le risque d’anomalies congénitales est de 90 % lorsque l’infection maternelle survient avant la 11e semaine de gestation; de 33 %, entre la 11e et la 12e semaine de gestation; de 11 %, entre la 13e et la 14e semaine de gestation; de 24 %, entre la 15eet la 16e semaine de gestation; et de 0 %, après la 16e semaine de gestation7

Ainsi, le risque d’anomalies congénitales à la suite d’une infection maternele  est essentiellement limité aux 16 premières semaines de gestation. Le risque d’ER n’est  q u e  peu  ou  pas  associé  à  l’infection  au - delà  de  la 20e semaine de gestation; de plus, le RCIU semble être la seule séquelle d’une infection au troisième trimestre7–17

L’infection maternelle périconceptionnelle ne semble pas accroître le risque d’ER18

L’immunité maternelle, qu’elle soit naturelle ou attribuable à la vaccination, offre généralement une protection contre l’infection intra-utérine à la rubéole19,20

. Cependant, certains cas d’ER ont été constatés à la suite d’une réinfection maternelle20

. Ainsi, la possibilité d’une ER devrait toujoursêtre envisagée chez un fœtus ou un nouveau-né qui présente un tableau clinique semblant indiquer la présence d’une infection congénitale19

. Nous nous devons de souligner qu’aucun cas d’ER n’a été signalé à la suite d’une réinfection maternelle après la 12e semaine de grossesse21.

Recommandation

1. Les effets de l’embryopathie rubéolique varient en fonction de l’âge gestationnel au moment de l’infection; ainsi, une attention particulière devrait être accordée à la précision de la datation gestationnelle puisque celle-ci s’avère d’une importance cruciale en matière de prise en charge. (II-3A)

 

Tableau 2 Anomalies congénitales et manifestations tardives de l’infection au virus de la rubéole

Présentes à la naissance

Manifestations tardive

Anomalies audiologiques (60 %-75 %)

Surdité de perception

Anomalies cardiaques (10 %-20 %)

Sténose pulmonaire

Persistance du canal artériel

Communication interventriculaire

Anomalies ophtalmiques (10 %-25 %)

Rétinopathie

Cataractes

Microphtalmie

Glaucome pigmentaire et congénital

Système nerveux central (10 %-25 %)

Déficience mentale

Microcéphalie

Méningo-encéphalite

Autres

Thrombocytopénie

Hépatosplénomégalie

Maladie radiotransparente des os

Purpura caractéristique (aspect de muffin aux bleuets)

Diabète sucré

Thyroïdite

Déficit en hormone de croissance

Trouble comportemental


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28 juin 2011 2 28 /06 /juin /2011 12:51

 

 

ÉPIDÉMIOLOGIE INTERVENTIONNELLE

 

 

 

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En permettant d'évaluer l'incidence et les causes des accidents anesthésiques, les enquêtes épidémiologiques ont abouti à la mise en place de mesures visant à prévenir la survenue des complications graves. Vu la fréquence et la gravité des accidents hypoxiques, les efforts se sont principalement focalisés sur leur prévention. Les premiers standards de surveillance proposés pour les patients anesthésiés l'ont été en 1986, aux États-Unis, par l'ASA, à la suite des travaux menés dans les hôpitaux Harvard de Boston [46]. L'usage de l'oxymètre de pouls et du capnomètre était conseillé dans la prévention des accidents hypoxiques graves. Par la suite, de nombreuses sociétés d'anesthésie ont proposé, dans leur pays respectifs, des standards de surveillance. Cependant une grande disparité existe entre ces diverses recommandations [119, 146]. En France, la Société française d'anesthésie et de réanimation édite régulièrement, depuis 1990, des recommandations concernant diverses pratiques de l'anesthésie. Par ailleurs, le gouvernement français s'est officiellement impliqué dans la sécurité anesthésique. Une circulaire ministérielle de 1989 statue sur le traitement de l'hyperthermie maligne. En 1974 puis en 1982 à la suite des résultats de l'enquête Inserm, deux circulaires relatives à la sécurité des malades anesthésiés ont été publiées. Plusieurs recommandations sur l'appareillage, le monitorage mais surtout le passage en salle postinterventionnelle ont été clairement définies. Malgré ce, le rapport du Haut comité de la santé publique sur la sécurité anesthésique, de 1994, relatait une mauvaise application de ces circulaires aboutissant à la publication le 5 décembre 1994 d'un décret de loi (no 94-1050) obligeant les établissements de santé à se soumettre aux recommandations. Les plus importantes concernent la nécessité d'une consultation anesthésique à distance de l'intervention, la surveillance et le monitorage peret postopératoire et l'organisation du programme opératoire.

Ces nombreuses mesures, plus ou moins coercitives selon les pays, sont-elles efficaces dans la prévention des accidents graves d'anesthésie ? Le réel intérêt du monitorage a été contesté par certains [70, 111]. Effectivement, la seule étude prospective randomisée sur l'utilisation de l'oxymètre de pouls n'a pas montré de différence dans l'incidence des accidents hypoxiques graves, selon la présence ou l'absence de ce monitorage [95, 96]. De même, depuis l'utilisation de l'oxymètre de pouls et du capnomètre, la baisse du taux des décès anesthésiques, relevée dans les hôpitaux Harvard, n'atteint pas le seuil de significativité [45]. Pour ce faire, il faudrait un collectif de plus de 7 millions de patients [52] ! Cependant, concernant les accidents hypoxiques graves relevés par l'ASA closed study, il avait été estimé que 72 % des accidents respiratoires graves et 57 % des décès auraient pu être évités par l'utilisation d'un oxymètre et d'un capnomètre [17, 21, 134]. En fait, comme le montre une étude ultérieure dont les résultats sont rapportés au tableau XXI, le monitorage évite la majorité des accidents graves. Les accidents survenus en dépit de la présence de ces moniteurs étaient dus, pour la plupart, à leur mauvaise utilisation et/ou interprétation. C'est sur ce facteur humain, à l'origine des accidents malgré le monitorage, que doivent porter les efforts de prévention. Plus que l'absence de connaissances, c'est l'absence d'application des connaissances qui semble être le facteur principal [14, 100], d'où l'intérêt des récents programmes d'entraînement par simulateurs virtuels de situations anesthésiques critiques [41].

CONCLUSION

L'épidémiologie des complications de l'anesthésie n'est pas d'une rigueur scientifique absolue. En effet, les difficultés de recueil des accidents et surtout de leur interprétation, l'absence de classification commune font qu'il est très difficile de comparer les études entre elles ou de cumuler leurs résultats. Les études portant sur un nombre considérable de cas se font rares. Déjà lors du symposium de Boston les participants avaient fait des réserves sur l'intérêt de renouveler ce type de travail. Ces dernières années ont vu apparaître des études ciblées, prospectives, randomisées, dont le but est de préciser le rôle joué par un facteur dans la morbidité et éventuellement la mortalité. C'est ce type d'étude qui abondera probablement dans les années à venir. Il serait pourtant nécessaire qu'une conférence internationale fasse le point, et définisse clairement une méthodologie applicable par tous, permettant à nouveau la réalisation de larges séries de cas dont les résultats ne pourraient pas prêter à discussion. S'il n'en est pas ainsi, le seul recours sera de suivre l'évolution de la mortalité et de la morbidité à partir de banques de données ou des déclarations aux compagnies d'assurances. En dépit de ces réserves, les principaux accidents anesthésiques ont pu être individualisés, leur incidence évaluée et leurs causes suspectées. Des règles de bonne pratique ont pu être édictées englobant la prise en charge pré-, per- et postopératoire des patients. Malgré ce, les complications anesthésiques n'ont pu être éradiquées car le maillon le plus fragile, dans la chaîne des incidents conduisant à l'accident, demeure l'anesthésiste lui-même. Ainsi, les progrès à venir dans la sécurité anesthésique passent par l'amélioration des conditions de travail de l'anesthésiste, l'édiction de normes par la structure ad hoc avec un contrôle de leur application, une formation obligatoire continue avec l'entraînement des médecins et des infirmiers face à des situations anesthésiques critiques.


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28 juin 2011 2 28 /06 /juin /2011 11:43

 

 

 

 

ACCIDENTS DES ANESTHÉSIES LOCORÉGIONALES

 

 

 

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Un caractère souvent passionnel s'attache aux accidents de l'ALR, et en particulier à ceux des anesthésies périmédullaires.

Il est lié aux cascades d'accidents d'ordre cardiocirculatoire ou neurologique survenues dans le temps et qui avaient amené en 1906, lors de la bataille du Jutland, l'amiral Sir Gordon Taylor à déclarer : Spinal anesthesia was the most effective form of euthanasia for the war injured. Par la suite, la survenue de complications nerveuses devait entraîner, en Angleterre, l'abandon de la rachianesthésie (RA) pendant presque trois décennies. La description des complications a évolué au fil des années, malheureusement avec un manque d'homogénéité dans les séries. Par ailleurs, même au cours des 20 dernières années, les résultats ont varié avec l'expérience du praticien, l'anesthésique local et le type de matériels utilisés.

Il faut souligner aussi la confusion entretenue sous le terme de complications entre les accidents dus à des effets secondaires attendus (méthémoglobinémie de la prilocaïne) ou inattendus (allergie), les réponses physiologiques prévisibles (hypotension artérielle dans les anesthésies périmédullaires) et les véritables complications en relation avec la maladresse ou la malchance. Ajoutons encore que les grandes études épidémiologiques sont anciennes et ne reflètent certainement plus la réalité d'aujourd'hui, et qu'il existe, par ailleurs, un très grand nombre de rapports d'une ou de séries de complications dont la description est riche d'intérêt mais difficilement utilisable au plan épidémiologique. Un bon exemple de la diversité des complications majeures survenant au cours de ces anesthésies est donné par les résultats de l'enquête menée par Solazzi et Ward en 1984 auprès des compagnies d'assurances de l'état de Washington (tableau XVI). L'enquête dénombre 57 complications d'ALR, la série anesthésie générale en comportant 135 [130]. La comparaison des complications de ces deux modes d'anesthésie vient récemment [82] d'être évoquée en France par Lienhart et Chigot qui, à propos du contentieux en rapport avec l'anesthésie à l'Assistance publique-hôpitaux de Paris, notent que le taux des plaintes concernant l'ALR est de 34,1 %, dont 2,3 % ont été indemnisées. Cette fréquence est particulièrement élevée compte tenu que, dans les hôpitaux de Paris, on ne retient sur l'ensemble des anesthésies pratiquées qu'un taux de 13,1 % de ce mode d'anesthésie [82]. Cette constatation se retrouve dans d'autres études [144]. On envisagera ici successivement les complications liées : aux effets indésirables des agents de l'ALR, aux anesthésies périmédullaires et aux blocs périphériques.

Effets indésirables des agents de l'anesthésie régionale

Deux classes d'agents doivent être envisagées : les anesthésiques locaux et les morphiniques.

Anesthésiques locaux (AL)

Ils sont à l'origine de complications toxiques systémiques et locales. Les complications systémiques sont en relation avec un passage intravasculaire de l'anesthésique par ponction directe d'un vaisseau, résorption locale ou lâchage du garrot dans le cas d'une ALR par voie veineuse. Compte tenu des doses administrées, le risque d'apparition de signes de toxicité est limité aux anesthésies extradurales, péridurales (APD) et caudales, et aux blocs plexiques ou nerveux multiples (intercostaux). Au cours des anesthésies extradurales et selon Dawkins [33], la fréquence des ponctions vasculaires serait de 0,6 % (caudales) et 2,8 % (APD) ; mais elles ne s'accompagnent que rarement d'une injection intravasculaire. Le risque d'effraction vasculaire est plus élevé chez la femme enceinte, en raison du développement du réseau veineux, pouvant atteindre un taux de 11,5 % avec l'utilisation des cathéters multiperforés [9]. Le potentiel toxique systémique des AL varie selon l'agent et concerne le système nerveux central et le coeur. Certains, trop toxiques, ont été supprimés (cocaïne, améthocaïne) ; d'autres ne sont plus employés à concentration élevée (bupivacaïne).

L'atteinte du système nerveux central est la première à se manifester. Une enquête portant sur 113 623 blocs périmédullaires dénombre 0,38 % de symptômes mineurs et 0,12 % de convulsions [97]. Concernant celles-ci, d'autres en rapportent 0,2 %, que ce soit après APD ou anesthésie caudale [33]. Une étude parue en 1995 et réalisée à la Mayo Clinic, a actualisé cette complication. Le (tableau XVII rapporte le résultat de ce travail qui porte sur 27 697 anesthésies régionales (AR). On peut noter que la fréquence des accidents était plus élevée lors d'anesthésie caudale que d'APD, et que parmi les blocs du plexus brachial (BPB) la voie axillaire offrait le moins de risque. Parmi les BPB, le taux le plus élevé était noté après utilisation de bupivacaïne (0,35 %) [13]. Concernant les registres des compagnies d'assurances, la série ASA comporte, sur l'ensemble des dossiers, 1 % de convulsions dont 15 % au cours d'APD en obstétrique [20]. Le taux élevé de progestérone chez les parturientes augmenterait la toxicité des AL. En France, Morizot, en 1991, a relevé auprès des compagnies d'assurances 15 dossiers de complications d'ALR, et parmi ceux-ci un accident toxique d'évolution fatale [102]. Parmi les 57 dossiers d'assurance recensés en 1984 dans l'état de Washington [130], on notait six cas (10,5 %) de convulsions avec un décès (tableau XVI).La toxicité cardiaque se traduit par des troubles de la conduction et un effet inotrope négatif, pouvant conduire au collapsus et à l'arrêt cardiaque. Elle survient habituellement après l'atteinte du système nerveux central ; mais avec certains agents comme la bupivacaïne, elle pourrait apparaître dans le même temps, voire avant les convulsions [4].

Mais si Moore a observé 137 cas de convulsions avec cet agent sur plus de 110 000 cas, aucun arrêt cardiaque n'est survenu, grâce, selon l'auteur, à la thérapeutique fondamentale qu'il préconise : l'oxygénation du malade qui convulse, l'anoxie et l'acidose étant responsables des accidents cardiaques [97]. Le fait que les données de la littérature ne permettent pas d'attribuer une fréquence à ce type de complication permet de penser que le risque de toxicité cardiovasculaire des AL est actuellement minime. De fait, l'étude de 1995 de la Mayo Clinic ne rapporte aucun collapsus sur 27 697 ALR [13].

La toxicité locale des AL se prête mal à une évaluation de fréquence [90]. En effet, elle se manifeste dans les suites de l'anesthésie sous la forme de neuropathies de gravité variable, difficiles à distinguer des neuropathies d'origine traumatique qui seront envisagées (cf infra). Le rapport de séries de cas a cependant permis, dans le passé, d'incriminer la présence de stabilisant dans certaines préparations, et plus récemment la toxicité neuronale directe de la chlorprocaïne, de la tétracaïne à 0,5 % et de la lidocaïne à 5 %. Au cours de la RA ces accidents sont favorisés par la position (lithotomie, par exemple), et surtout l'administration continue par microcathéter, à l'origine de maldistribution de l'AL (surtout en solution hyperbare) responsable de concentrations excessives au contact des racines nerveuses de la queue de cheval. Des règles de sécurité ont été dégagées à partir de la description de ces accidents [123, 126]. Des neuropathies d'origine toxique ont également été décrites (0,5 %) avec l'administration prolongée d'AL par cathéter au cours des BPB [125].

Parmi les effets indésirables des AL, citons encore un risque d'accident allergique qui représenterait moins de 1 % des réactions adverses des AL. Parmi ceux-ci les aminoesters (non utilisés en France) seraient plus allergisants que les aminoamides [122].

Morphiniques

La morphine et ses dérivés administrés au cours des ALR sont également mis en cause du fait de leur diffusion par voie sanguine ou dans le liquide céphalo-rachidien (LCR). Le tableau XVIII identifie ces complications et leur fréquence. La plus redoutable est la survenue d'une dépression respiratoire qui peut apparaître tardivement après la dernière dose injectée (6 à 8 heures, et même au-delà avec la morphine) ; la fréquence augmente avec la dose de morphine : 0,25 à 0,4 % pour 2 à 4 mg [63], 4 % pour 5 mg [145]. L'âge, le grade ASA, l'association d'AL avec la morphine, son administration au décours d'une anesthésie générale sont des facteurs favorisants [101, 121]. Le risque de prurit et de rétention urinaire est plus élevé avec la RA qu'avec l'APD (tableau XVIII) ; le prurit surviendrait plus fréquemment après l'utilisation de fentanyl.

Complications des anesthésies périmédullaires

Avec Lienhart, on peut classer ces complications en immédiates, c'est-à-dire peranesthésiques, et à distance [81].

Accidents immédiats

Ce sont les plus fréquents. Mineurs, ils sont essentiellement représentés par l'hypotension artérielle (33 % sous RA, 15 % sous APD), la bradycardie (13 % sous RA, 2,3 % sous APD), les nausées, les vomissements et les arythmies (18,7 et 2 % respectivement sous RA) [19, 30]. Les accidents majeurs ont été relevés dans l'enquête Inserm avec une fréquence de 0,4 % (avec une mortalité de 1/3), l'âge moyen étant de 76 ans et la classe ASA de grade 3. Trois grandes complications sont décrites : l'insuffisance respiratoire aiguë, l'arrêt cardiaque et la RA totale.

L'insuffisance respiratoire aiguë, selon une enquête de type rétrospectif, très critiquable au plan méthodologique, réalisée en France en 1994 auprès de 6 000 anesthésistes (1 000 réponses) et portant sur approximativement 730 000 RA, se rencontrerait dans 0,03 % des cas (tableau XIX). Dans deux tiers des cas, cet accident était survenu précocement chez un sujet jeune ayant fréquemment un bloc sensitif haut situé (C2-D3). Dans l'autre tiers des cas l'accident était apparu plus tard au cours de l'anesthésie et avait concerné des patients plus âgés, insuffisants respiratoires chroniques, avec un bloc plus bas situé (D3-D12) [8].

L'arrêt cardiaque, précédé souvent d'un collapsus, a été mentionné en 1988 avec une incidence de 0,02 % lors de RA [110]. Dans l'enquête française de 1994 un arrêt cardiaque a été observé dans 0,012 % des RA (tableau XIX). Il avait été fatal dans 24 % de ces cas intéressant des sujets âgés de classe ASA élevée, et avait eu une issue favorable dans les autres cas relatifs à des sujets jeunes ayant un bloc haut situé [6]. Cette description complète les résultats de l'enquête ASA qui avait relevé sur 900 dossiers de RA, 14 arrêts cardiaques (1,55 %) survenus chez des patients en bonne santé ; six d'entre eux devaient décéder. Une hypoxie en relation avec une sédation trop importante et une insuffisance de contrôle du bloc sympathique expliqueraient selon les auteurs, la survenue de ces accidents [18]. Ceux-ci seraient aussi favorisés par une hypertonie vagale [104]. En France, une étude portant sur des dossiers d'assurances a sélectionné 28 complications d'ALR comportant 15 arrêts cardiaques au cours de RA avec une évolution vers le décès ou des séquelles cérébrales irréversibles [102]. Sous APD, les arrêts cardiaques sont estimés à 0,05 % [107]. En dehors de l'étude ASA, il est très difficile, parmi ces rapports d'accidents circulatoires majeurs, d'apprécier la part jouée dans leur genèse par une dépression respiratoire préalable, l'hypovolémie relative non traitée et la cardiotoxicité des AL. Les travaux à venir devront s'attacher à éclairer ce point.La rachianesthésie totale se rencontre le plus fréquemment au cours des anesthésies extradurales s'accompagnant d'une effraction de la dure-mère : 2,5 % dans les APD et 1,2 % dans les anesthésies caudales (tableau XX). La fréquence de la RA totale a été évaluée à 0,2 % lors d'APD et 0,1 % dans les anesthésies caudales [33]. Les signes cliniques (collapsus brutal avec perte de connaissance et apnée) apparaissent rapidement après l'injection de l'AL à travers la brèche dure-mérienne.

Cet accident est à distinguer de celui engendré par l'injection sous-durale de l'AL qui interviendrait dans 0,8 % des APD, et qui se caractérise par une installation retardée (jusqu'à 1 heure) mais extensive et exagérée du bloc [114]. Citons encore la présence de corps étrangers extraduraux (cathéter ou aiguille sectionnés) révélée en fin d'anesthésie et citée au taux de 3,5 % parmi les 1 501 dossiers de la MDU [138]. Ils sont en général bien tolérés et il faut les laisser en place. Leur prévalence avec l'amélioration du matériel est certainement réduite de nos jours, mais certains ont conseillé de ne pas utiliser de cathéters radio-opaques afin qu'une radiographie anormale n'inquiète pas un patient asymptomatique.

Accidents retardés

Ils comprennent des complications mineures temporaires, céphalées et lombalgies, et des complications majeures, les neuropathies qui peuvent être temporaires ou définitives.

Les céphalées sont conditionnées par la rapidité et la durée de la fuite du LCR à travers la brèche dure-mérienne [40]. Leur fréquence varie de 1,2 à 46 % en fonction de différents facteurs bien étudiés ailleurs dans ce traité [48]. Elles apparaissent dans les 48 premières heures après l'anesthésie et peuvent, dans 4 % des cas, être accompagnées de troubles auditifs ou visuels (diplopie, scotome) [139]. L'audiogramme a confirmé un déficit de l'audition le plus souvent unilatéral et intéressant les fréquences basses chez 42 % des sujets après RA [113]. Dans l'étude française de 1994, hypoacousie et diplopie étaient associées aux céphalées dans 50 % des cas (tableau XIX) [7].

Les lombalgies apparaissent avec une fréquence de 2 à 30 % ; elles seraient liées à l'étirement ligamentaire provoqué par la ponction, et seraient plus fréquentes après APD qu'après RA [47].

Les neuropathies comprennent des troubles sensitifs et moteurs.

Après APD, Kane regroupant, en 1981, sept études réalisées de 1957 à 1979, totalisant 45 355 APD [69] a relevé 40 neuropathies (0,09 %) dont quatre troubles moteurs (0,009 %), 33 troubles sensitifs (0,07 %) et trois incontinences urinaires (0,007 %). Les valeurs rapportées par d'autres sont plus sévères : 0,1 % pour les paralysies transitoires et 0,02 % pour les paralysies permanentes [33]. En obstétrique, un taux plus important (0,3 %) a été observé [127]. Les valeurs paraissent inférieures après anesthésie caudale : 0,005 % de séquelles [33]. Après RA le taux de neuropathies paraît assez homogène, 0,06 % [73], 0,03 % [7] et une étude plus récente [32] dénombre 0,05 % de lésions temporaires et 0,04 % de lésions définitives. Dans la série française de 1994, 60 % des neuropathies relevaient soit d'un diagnostic mettant hors de cause la RA, soit d'un facteur étiologique gênant l'interprétation de la cause de la complication [7]. Une relation a été fréquemment trouvée entre ces complications et l'existence de paresthésies lors de la ponction ou de douleurs fulgurantes lors de l'injection : 90 % des cas dans l'étude française de 1994 [7] et 100 % dans une autre étude [148]. L'existence d'un hématome sous-dural ou extradural peut également expliquer une neuropathie par compression directe ou ischémie. Selon une étude de synthèse, ce risque serait de 0,0007 % pour l'APD et de 0,0005 % pour la RA [140] ; mais ces valeurs sont considérées comme sous-estimées. Sur 61 hématomes périmédullaires survenus au décours de l'anesthésie et identifiables au registre de Medicine's Medline de 1906 à 1994, 42 étaient en relation directe avec l'administration d'un anticoagulant ou des troubles spontanés de la coagulation [140]. Le mécanisme de la neuropathie n'est pas toujours facile à élucider ; dans l'ASA's closed claims study - où la fréquence des dossiers concernant les atteintes des nerfs issus de la colonne lombaire et sacrée est de 2,5 % sur l'ensemble du collectif (2,6 % des déclarations au GAMM en France en 1995) -, dans bien des cas, il n'a pas été possible malgré une analyse très poussée des dossiers, de mettre en évidence le mécanisme de la lésion et donc de mettre en cause la responsabilité de l'anesthésiste. De ce fait, le taux d'indemnisation n'a été que de 56 000 dollars pour ce type de lésions alors que le taux moyen a été de 250 000 dollars dans le collectif [76]. De l'ensemble de ces données, on retiendra qu'au cours de ces 25 dernières années le taux des neuropathies après anesthésie périmédullaire est resté stable, invitant les anesthésistes à maintenir une grande vigilance. Un signe favorable a cependant été donné en 1996, à partir d'une étude prospective polycentrique conduite sur 15 000 anesthésies périmédullaires chez l'enfant qui n'a retenu aucune complication séquellaire [55]. Les anesthésistes pédiatriques sont-ils mieux entraînés, plus vigilants, ou l'enfant est-il plus tolérant ?

Complications des blocs plexulaires et nerveux

Décrites après la plupart des blocs nerveux périphériques, leur faible fréquence n'en permet pas une étude épidémiologique et le lecteur est renvoyé à un travail paru récemment sur cette question [2]. Deux types de blocs retiendront cependant notre attention : le bloc rétrobulbaire et le bloc du plexus brachial.

Le bloc rétrobulbaire se complique dans 1 à 2 % des cas de la survenue d'un hématome intraorbitaire et dans 1,3 % des cas du " syndrome d'apnée rétrobulbaire " [106] dont le mécanisme le plus vraisemblable serait la diffusion de l'AL dans la gaine du nerf optique avec cheminement possible jusqu'aux centres respiratoires [99]. En France, en 1995, le GAMM mentionnait trois déclarations de perforations oculaires au cours d'anesthésies péribulbaires (tableau XIII).

Avec le bloc du plexus brachial, deux types de complications sont à redouter. Les complications respiratoires relèvent soit de la création d'un pneumothorax, 0,6 à 6 % des blocs supraclaviculaires [2], soit d'une réduction de la ventilation dans 25 % des blocs interscaléniques, en relation avec une paralysie du diaphragme démontrée par ultrasonographie dans 100 % des cas [137]. Le deuxième type de complications concerne l'apparition, en postanesthésie, de neuropathies qui peuvent se limiter à des paresthésies transitoires ou entraîner des séquelles sensitivomotrices définitives. Leur fréquence n'est pas négligeable, puisque les dossiers d'assurance de l'état de Washington font référence à 11 lésions nerveuses après ce mode d'anesthésie sur 57 complications d'ALR (tableau XVI). Elle a cependant diminué avec le temps : 5 % en 1959, 1,9 % en 1979 avec recherche des paresthésies [128], 0,5 % en 1982 (injection prolongée avec cathéter) [125], 0,4 % en 1985 sans recherche de paresthésie [145]. Dans ce dernier cas il n'y avait pas eu de déficit moteur ou sensitif prolongé. Les mécanismes possibles de ces complications sont : une lésion directe par le biseau de l'aiguille (surtout s'il est acéré), l'injection intraneurale de l'AL, une compression ischémique par hématome, la toxicité de l'AL. Pour la majorité des auteurs c'est la ponction du nerf, au cours de la recherche des paresthésies, qui est le plus souvent à l'origine de ces complications. L'apport de la stimulation électrique en a diminué la fréquence sans cependant les éradiquer totalement [128].

 


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27 juin 2011 1 27 /06 /juin /2011 12:25

 

 

 

ÉPIDÉMIOLOGIE DESCRIPTIVE ET ANALYTIQUE DE LA MORBIDITÉ EN ANESTHÉSIE

 

 

 

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Contrairement à la mortalité liée à l'anesthésie qui, nous venons de le voir, est bien quantifiée, les documents à notre disposition concernant la morbidité sont moins abondants et moins précis en dépit de quelques belles études dont l'enquête française Inserm [64, 112, 135]. La première partie de ce paragraphe sera consacrée à l'estimation de la morbidité. Dans la deuxième partie, les grands types de complications seront envisagés en fonction de leurs facteurs.

Estimation de la morbidité

Trois sources d'informations sont à notre disposition :

quelques études épidémiologiques, l'analyse de banques de dossiers, et l'étude des registres des compagnies d'assurances. Seules les études épidémiologiques peuvent donner des indications sur la fréquence des complications observées, les deux autres sources ne permettant qu'un classement des accidents déclarés.

Études épidémiologiques

Ne seront retenus ici que les résultats de quatre études prospectives publiées au cours de ces 10 dernières années :

Cohen et al, 1986 [26] : 198 000 anesthésies réalisées dans un hôpital universitaire avec observation des patients sur toute la durée de l'hospitalisation, recueil de toutes les complications ; Tiret et al [135] (enquête Inserm) : 198 103 anesthésies réalisées dans des structures privées et publiques, avec observation des patients durant l'anesthésie et les premières 24 heures de l'hospitalisation, recueil des complications majeures qui sont classées en fonction de leur dépendance avec l'anesthésie ; Cohen et al, 1992 [25] : 27 184 anesthésies réalisées dans un hôpital universitaire avec observation des patients durant toute la durée de l'hospitalisation, recueil des complications majeures et mineures avec distinction de celles qui sont liées à l'anesthésie ; Moller et al, 1993 [95] : 20 800 anesthésies réalisées dans différentes structures avec observation durant toute l'hospitalisation et recueil des complications mineures et majeures liées à l'anesthésie.

Études de banques de données

Ce type d'étude n'apporte pas d'information précise au plan épidémiologique, car dépourvu de dénominateur (nombre d'anesthésies réalisées) et doté d'un numérateur (complications) souvent inférieur à la réalité. Il permet cependant d'identifier les complications prépondérantes, de favoriser, de par l'accumulation des dossiers, l'approche de facteurs responsables et de définir les règles de sécurité. C'est ainsi qu'à travers trois études rassemblant 3 200 dossiers de complications et conduites soit aux États-Unis [29], soit en Suède [141], soit en Australie [143], on peut faire les remarques suivantes : dans 80 % des cas, l'accident aurait pu être évité [143] ; une grande majorité des complications est due à l'erreur humaine (et en particulier à un défaut de surveillance), et seulement dans 4 % des cas à un défaut de l'appareillage [29] ; l'altération préalable du l'état général aggrave fortement les conséquences de la complication [29] ; les complications identifiées sont toujours les mêmes depuis des décennies [29, 141].

On peut aussi par sélection de dossiers essayer de répondre à des interrogations. C'est ainsi que sur 96 complications comportant, au cours de l'anesthésie, un changement de praticien, il a pu être démontré que si dans 11 % des cas le remplacement était responsable de l'accident, dans 31 % des cas, il avait permis de détecter rapidement la complication en cours. Cette étude a pu rendre licite le remplacement d'un praticien fatigué sous réserve du respect de règles très strictes qui ont fait l'objet, aux États-Unis d'une codification [28].

Litiges enregistrés par les compagnies d'assurances décès ou lésions cérébrales irréversibles (50 %) et 751 autres complications dont la responsabilité incombait à l'anesthésie [138].

Dans une étude plus récente portant sur 150 dossiers de complications considérées comme sérieuses survenues de 1989 à 1990 en Angleterre, Aitkenhead dénombre 40,8 % de lésions cérébrales et médullaires et de décès per- et postopératoires, 12,2 % d'éveils peropératoires, 7,5 % de douleurs au cours des anesthésies régionales (AR), 4,1 % d'atteintes nerveuses périphériques et 23,9 % de complications diverses [3]. Aux États-Unis, 23 compagnies d'assurances ont accepté de communiquer à un groupe d'experts de l'American society of anesthesiology, 2.046 dossiers de complications anesthésiques enregistrés de 1974 à 1987 et analysés sous la dénomination d'ASA closed claims study (série ASA). Le tableau XII rapporte les données générales du matériel étudié en présentant les complications, d'une part, en fonction de leur expression clinique et, d'autre part, en fonction de leur mécanisme d'apparition, c'està- dire de leur cause. Cette façon de procéder est heureuse car, jusqu'à cette date, les deux présentations étaient habituellement mélangées. Les traumatismes dentaires ont été exclus de l'étude. Les décès et les encéphalopathies anoxiques constituaient 47 % des cas, suivis par les lésions nerveuses.

Au plan du mécanisme d'apparition, les accidents d'origine respiratoire avaient représenté plus d'un tiers des cas et les accidents d'origine circulatoire 6 % [21]. De cette enquête sont également issues plusieurs études focalisées sur différentes familles de complications [17, 18, 20, 21, 56, 76]. Elles seront évoquées ailleurs dans ce texte. En France, le groupe des assurances mutuelles médicales (GAMM) a, en 1995, enregistré 191 déclarations mettant en cause la responsabilité de l'anesthésie. Le tableau XIII donne la répartition de ces complications.

Comme dans bien d'autres études, ont été mélangés la définition de la complication, son mécanisme et son cadre (anesthésie générale ou régionale). Les traumatismes dentaires étaient les plus fréquents (46 %). La mortalité était de 15 % et le taux des séquelles graves de 22 %. Il ne paraît pas possible de faire une synthèse ou d'établir des comparaisons à partir, ou entre, ces études dont les présentations sont différentes. On retiendra cependant la haute fréquence des plaintes pour traumatisme dentaire (de l'ordre de 50 %), et lésions nerveuses périphériques (de l'ordre de 4 % en Europe et de 5 % aux États-Unis). Le nombre des déclarations de décès ou de lésions cérébrales irréversibles s'étend de 50 % au Royaume-Uni à 47 % aux États-Unis (hors prise en compte des traumatismes dentaires) ; en France (horsencéphalopathies irréversibles), il est de 15 %.

Épidémiologie analytique

Après avoir estimé la fréquence des complications, il convient d'estimer le mécanisme qui est à l'origine de la complication, afin d'en dégager les facteurs. Cet exercice est périlleux en raison du mélange fait, dans la plupart des études, entre complication (symptôme) et mécanisme, la seule étude ayant nettement distingué symptôme et mécanisme étant l'étude ASA. On insistera en particulier sur les complications respiratoires et circulatoires qui constituent les causes principales de mortalité et de morbidité.

Complications respiratoires

La fréquence des complications respiratoires en salle d'opérations et durant le réveil estcomprise entre 0,04 % dans l'enquête Inserm (mais il ne s'agit ici que de complications majeures) et 15,2 % dans l'étude de Moller et al (tableau X), mais sont prises en compte ici les hypoxémies détectées dans la moitié de l'effectif par la mesure de la SpO2 [99]. Dans leur étude de 1992, Cohen et al en retiennent 4 % (tableau IX) [25]. En postopératoire, les valeurs rapportées sont de 2,3 % [25] et 3,5 % [95]. Dans la majorité des études, un accident d'ordre respiratoire ou un mécanisme d'ordre respiratoire était à l'origine des complications observées : 34 % des cas dans la série ASA et 32 % des cas dans la série Inserm. Ces complications ou ces mécanismes étaient responsables de plus de 85 % des décès et atteintes cérébrales irréversibles observés : dans la plupart des cas, l'accident aurait pu être évité [36]. Le tableau XII rapporte les six principaux mécanismes respiratoires à l'origine des complications retenues dans la série ASA [21].

Les hypoventilations représentent, dans ces deux dernières études, la première cause des complications respiratoires, 28 et 31 % respectivement. Dans la série Inserm, il s'agissait de dépressions respiratoires observées dans 70 % des cas dans les premières heures postopératoires. Dans la série ASA, il s'agissait d'un mécanisme de complication mis en cause, dans la plupart des cas, au cours de l'anesthésie et à l'origine d'hypoxémie et d'hypercapnie, en relation avec des volumes courants ou des fréquences respiratoires inadaptés. Les auteurs américains font référence à des prestations anesthésiques réalisées parfois par un personnel non qualifié. Les auteurs français notent, qu'à l'époque où les accidents ont été relevés, de nombreux centres n'étaient pas encore équipés de salle postinterventionnelle. On peut ajouter aussi que la préférence allait aux anesthésies dites analgésiques réalisées avec de hautes doses de morphiniques. En peranesthésique et en salle postinterventionnelle, Moller et al (tableau X) relèvent un taux d'hypoventilations de 2,1 %. En postopératoire, les hypoventilations peuvent également survenir lors de perfusions intraveineuses mal contrôlées de morphiniques, ou avec leur administration en péridurale ou rachianesthésie [100, 108] (cf infra).

Les inhalations de liquide gastrique sont rapportées avec une fréquence de 0,06 % [25], 0,1 % [95], 1,1 % dans l'enquête Inserm dont 22 % à l'induction. Elles représentent, dans cette étude, 30 % des complications respiratoires totalement liées à l'anesthésie. Dans les collectifs de complications, les valeurs sont : 7 % dans la série ASA [21], 14 % dans la série MDU [138] et 4,4 % dans la série australienne [143]. Dans la série ASA, l'inhalation (5 % des mécanismes respiratoires) survenait dans 34 % des cas au cours de l'induction, avant l'intubation trachéale, dans 41 % des cas au cours d'une anesthésie avec masque facial, et dans 18 % des cas au cours du réveil [21]. À l'induction, ces accidents se rencontraient principalement au cours des séquences d'induction rapide. Les difficultés liées au maintien de la liberté des voies aériennes (changement de sonde d'intubation, par exemple) exposent également aux inhalations [110]. Dans la série ASA, 50 % des patients ayant inhalé sont décédés, ou ont eu des lésions cérébrales irréversibles, contre 22 % dans la série française.

Les difficultés liées à l'intubation trachéale se rencontrent dans 0,9 % [25] et 1,5 % [95] des cas. Dans l'étude ASA, hors intubation oesophagienne, les difficultés de l'intubation représentent 17 % des mécanismes des complications respiratoires, et 6 % du total des mécanismes retenus (tableau XII). Ces difficultés étaient responsables de traumatisme des voies aériennes, et de décès ou de lésions cérébrales irréversibles (56 % des cas).

Dans 36 % des cas seulement, un meilleur monitorage aurait diminué les conséquences de l'acte contre 90 % pour l'intubation oesophagienne et la ventilation inadéquate [17].

Les intubations oesophagiennes sont notées, chez Moller et al, à la fréquence de 0,33 % (tableau X). Dans l'étude ASA, elles représentent 15 % des mécanismes des complications respiratoires (tableau XII).

Dans 48 % des cas, un contrôle par l'auscultation avait permis de conclure à une bonne mise en place de la sonde dans la trachée.Dans 60 % des cas, des troubles cardiocirculatoires, et dans 34 % des cas, une cyanose avaient précédé le diagnostic. Des décès ou lésions cérébrales irréversibles étaient apparus dans plus de 90 % de ces cas [21].

Les obstructions des voies aériennes ont été relevées dans 0,7 % des anesthésies [95] et représentent 7 % des mécanismes respiratoires des complications dans la série ASA. Dans cette série, 70 % des obstructions avaient une localisation haute : spasme laryngé (28 %), polype, oedème, hématome laryngé ou présence de corps étranger (7 %), la cause n'ayant pas pu être identifiée dans 35 % des cas. Dans 30 % des cas, l'obstruction avait une localisation basse : obstacle interne ou compression de la trachée ou des bronches (21 %), obstruction du tube endotrachéal (9 %). Ces accidents ont expliqué 64 % des décès et 23 % des lésions cérébrales de cette série. Dans l'enquête Inserm, l'item obstruction des voies aériennes n'apparaît pas. Trois laryngospasmes étaient survenus au cours de l'entretien de l'anesthésie sans occasionner de décès.

Les bronchospasmes ont été décrits avec une fréquence de 0,004 % [21], 0,5 % [26] et 0,9 % [95].

Ils représentaient, dans la série ASA, 5 % des mécanismes des complications d'origine respiratoire [21]. Ils étaient rencontrés à tous les temps de l'anesthésie mais dans 80 % des cas au cours de l'induction [96]. Dans 50 % des cas ce type d'accident était apparu chez un patient asthmatique ou insuffisant respiratoire de type obstructif à l'occasion de l'intubation trachéale [21]. Le risque de bronchospasme est particulièrement important en obstétrique (20 % des cas de la série ASA) ; la réduction des doses pour sécuriser le foetus en est probablement responsable dans la plupart des cas. On ne relève, dans la série Inserm, aucun décès ou lésions cérébrales en relation avec un bronchospasme alors que, dans la série ASA, 28 des cas de bronchospasmes (77 %) sont décédés. Ces divergences sont dues à la différence de méthodologie des études. Le traumatisme des voies aériennes est une complication séquellaire (et non un mécanisme) d'un événement survenu au cours de l'anesthésie. Dans la plupart des études, cette complication est classée sous différentes rubriques. Elle représente 5 % des complications totales retenues dans l'étude ASA (tableau XII). Les lésions intéressaient principalement le larynx, le pharnyx et l'oesophage (avec médiastinite) mais aussi le nez, l'articulation temporomaxillaire, la bouche, les lèvres, les gencives, la trachée. Les plus fréquentes étaient une paralysie des cordes vocales, une dislocation aryténoïdienne ou l'apparition d'un granulome. Dans 42 % des cas, elles étaient consécutives à une intubation difficile, dans les 58 % restants, on notait, entre autre, l'insertion d'une sonde gastrique, d'un tube nasopharyngé ou d'une canule buccale. Aucun facteur de prédisposition lié aux patients n'a été mis en évidence. Dans 12 % des cas, ce type de complication a conduit au décès [21]. Dans l'étude Inserm, le terme " traumatisme des voies aériennes " n'est pas avancé, mais on relève 10 % de complications de l'intubation  trachéale avec 12 % de décès ou de lésions cérébrales irréversibles (tableau VIII).

Les pneumothorax sont recensés à la fréquence de 0,1 % dans l'enquête Inserm (2,2 % des complications respiratoires). Dans les collectifs de dossiers, on en relève 0,85 % [143], 1,3 % [134], et 3 % [21]. Dans la série ASA, le pneumothorax est considéré comme une complication et non une cause de complication. Dans 40 % des cas, cet accident était en relation avec la réalisation d'un bloc au cours d'une anesthésie régionale (cf infra), dans 19 % avec un incident de technique respiratoire (laryngoscopie, mise en place de la sonde trachéale, bronchoscopie), dans 16 % avec un barotraumatisme lié au blocage de la valve expiratoire du circuit ou à un volume courant trop important, dans 7 % à la mise en place d'une voie veineuse centrale et dans 9 % avec diverses causes (bronchospasme, embolie gazeuse). Dans les incidents de manipulation respiratoire et les barotraumatismes, la mortalité et les lésions cérébrales irréversibles ont été de 67 %, alors qu'il n'y a eu aucune issue sévère après la réalisation d'un bloc ou la mise en place d'un cathéter central. Les soins apportés aux patients avaient été jugés comme corrects dans 56 % des pneumothorax liés aux blocs ou à la mise en place des cathéters centraux, et seulement dans 8 % des cas où le pneumothorax était lié aux manoeuvres respiratoires. En effet, le pneumothorax est un risque reconnu des blocs nerveux ou de la mise en place des cathéters centraux alors qu'il n'en est pas de même dans les autres éventualités.

Les incidents liés à une défaillance de l'équipement ont été notés dans 0,002 % [135] et 0,3 % des anesthésies [25]. Ils représentent 5 % des accidents respiratoires dans l'enquête Inserm. Dans la série ASA, où ils sont considérés comme un mécanisme responsable de complications, ils apparaissent au taux de 9 %. On les rencontre de préférence au cours de l'anesthésie et en particulier lors de l'induction. Bien étudiés par Cooper et al [29], ils sont en relation principalement avec le débranchement d'un tuyau, une fuite importante de gaz, un dysfonctionnement de la mécanique de l'appareil ou des débitmètres (en particulier des rotamètres). L'inversion des admissions d'oxygène et de protoxyde d'azote a été également signalée. Ces accidents, qui étaient responsables en France en 1986 de 15 à 20 décès par an [35], sont prévenus par la mise en place de dispositifs de sécurité (O2-N2O), et par la vérification du matériel avant l'anesthésie devenue également obligatoire en France (arrêté du 30 octobre 1995). Le monitorage de la SpO2 est particulièrement performant dans la détection de ce type d'accident.

Parmi les autres complications, la survenue d'atélectasies en postopératoire (0,7 %) est reconnue comme dépendante de l'anesthésie [95]. Les pneumopathies ont un taux de 1,6 % [95]. Dans les complications mineures, les maux de gorge tiennent une place importante puisque 14 % des patients interrogés à la sortie d'un hôpital se plaignaient de cette complication [43].

Une large place a été faite ici à l'étude des complications respiratoires parce qu'elles sont responsables de la très grande majorité des issues fatales. La plupart des auteurs considèrent qu'une grande partie de ces accidents est due à des fautes. Dans la série ASA, on admet que 72 % de ces accidents, ou plutôt de leurs conséquences, auraient été prévenus par un meilleur monitorage, alors que seulement 11 % des complications ne relevant pas d'un mécanisme respiratoire auraient pu être évités par un meilleur monitorage. Ces valeurs sont peut-être excessives, dans la mesure où un biais important réside dans l'évaluation de la qualité des soins administrés lors de l'accident en relation avec la connaissance qu'ont les experts, des conséquences de l'accident [37].

Complications cardiovasculaires

L'enquête Inserm faisait état de 0,08 % de complications cardiovasculaires sévères au cours de l'anesthésie et des premières heures postopératoires. Plus récemment, et en périopératoire, on en a relevé 12,6 % [95] et 6,3 % [115]. Mais la définition de ce risque prête à discussion car interfèrent de nombreux incidents, symptômes d'un événement ou la complication cardiovasculaire comme augmentant la mortalité, entraînant des séquelles, prolongeant la durée de l'hospitalisation ou produisant un surcoût dans la prise en charge du patient, certaines rubriques classiques dans l'étude de ces complications n'apparaîtraient pas. Il en est ainsi des perturbations de la pression artérielle ou de la fréquence cardiaque, et des troubles du rythme. Pourtant, ces anomalies peuvent être à l'origine d'authentiques complications, et il paraît utile, dans le cadre de la recherche de stratégies, de pouvoir apprécier leur prévalence. Le tableau XIV rapporte les principales données épidémiologiques, recueillies sur des populations non sélectionnées, se rapportant à ces complications.L'infarctus du myocarde (IDM) est cité dans la plupart des séries avec une fréquence inférieure à 1 %. Il est le plus souvent diagnostiqué en postopératoire, particulièrement au cours du premier mois. Sa prévalence est de l'ordre de 5 à 8 % s'il existe un antécédent de nécrose [91]. L'incidence est plus élevée si la nécrose est récente : 37 % avant 3 mois, de 16 à 30 % entre 3 et 6 mois, 3 % au-delà de 6 mois. Un antécédent de chirurgie vasculaire élève le risque de 1 à 15 % [91, 132]. Outre l'existence d'un IDM antérieur, les facteurs de risque d'IDM périopératoire (dont la mortalité oscille, selon les études, de 36 à 70 %) [91] sont : l'existence d'une altération de la circulation coronaire, d'une insuffisance ventriculaire gauche, d'une hypotension artérielle peropératoire [93]. Chez les patients ayant eu un IDM depuis moins de 6 mois le risque a pu être abaissé à 5 % au prix d'un monitorage invasif associé à un traitement agressif des anomalies hémodynamiques périopératoires jusqu'au cinquième jour [120].

L'administration d'un bêtabloquant en préet postopératoire a, dans une étude de 1996, réduit l'incidence de l'IDM d'une population à risque coronarien, hors chirurgie cardiaque, à 0 % (versus 8 %) au cours du premier mois, 3 % (versus 14 %) à la fin de la première année, et 10 % (versus 21 %) au bout de 2 ans [92].L'ischémie myocardique, expression de la maladie coronaire, peut entraîner par sa répétition un trouble de la compliance du ventricule gauche, une altération de l'éjection cardiaque et des troubles du rythme ventriculaire. Elle traduit soit une insuffisance d'apport, soit une augmentation de la demande en O2 du myocarde liée à une tachycardie, une hypertension, une anémie, un stress, l'administration d'un sympathomimétique ou l'arrêt d'un traitement bêtabloquant. Sa prévalence est faible dans les grandes séries (tableau XIV) en raison de la difficulté de son diagnostic. Selon Mangano, son incidence est de 24 % en préopératoire, de 18 à 74 % en peropératoire et de 27 à 38 % en postopératoire [91]. L'insuffisance ventriculaire gauche est la conséquence d'une ischémie, d'un IDM ou de la décompensation d'une cardiopathie ischémique. Elle n'apparaît pas dans le tableau XIV car faiblement documentée dans les grandes séries. Pedersen et al [115] en relèvent, cependant en 1990, en periopératoire 1,8 % (choc cardiogénique et oedème aigu pulmonaire) et Forest et al 0,4 % [51].

L'insuffisance cardiaque congestive, bien que rarement citée, apparaît dans les études récentes au taux de 0,3 % dans une série non sélectionnée [115] et de 3,6 % chez une population de plus de 40 ans [58]. Il s'agissait, dans la plupart des cas, de la décompensation d'une insuffisance cardiaque congestive connue ou méconnue provoquée par l'effet inotrope négatif des agents anesthésiques, une hypovolémie, des troubles du rythme, la perte de la systole auriculaire, l'augmentation de la postcharge, ou une augmentation brutale de la Vo2 (frisson). Elle se traduisait soit par un collapsus (voire, un arrêt circulatoire), reflet d'un bas débit cardiaque, soit par un oedème pulmonaire secondaire à la majoration de la congestion en amont du ventricule gauche, souvent favorisée par un remplissage excessif. Les troubles du rythme sont mentionnés dans de nombreuses études. Le tableau XIV objective la dispersion des valeurs observées (0,9à4,8 %). Forest et al avaient relevé, en 1990, pour la période périopératoire : arythmies atriales (0,2 %), ventriculaires (0,6 %) et nodales (0,1 %) ; ces deux derniers modes étaient favorisés par l'halothane [50]. Il s'agit en général d'un événement banal, plus fréquent quand il existe une pathologie cardiaque préexistante. Il peut cependant devenir grave s'il s'accompagne de tachycardie, ou s'il évolue vers une fibrillation ventriculaire.

Les modifications de la fréquence cardiaque, symptômes et non complications, sont bien documentées. On notera, sur le tableau XIV que la fréquence des bradycardies varie avec les études. Pour une valeur inférieure à 40 b·min-1, son taux est de 0,4 % en peropératoire, en relation avec des effets pharmacodynamiques [50]. Il en est de même pour les tachycardies qui, pour une fréquence supérieure à 140 b·min-1, sont inférieures à 1 % [50]. Signe accompagnateur de l'hypovolémie et de l'ischémie myocardique, souvent associées à l'hypotension, la tachycardie est un bon signal d'alarme.

L'hypotension artérielle a une fréquence qui varie avec le seuil retenu (tableau XIV). À l'induction elle peut être révélatrice d'un accident allergique ou d'un surdosage. Au cours de l'entretien elle témoigne d'une hypovolémie ou d'une souffrance myocardique.

L'hypertendu artériel est particulièrement exposé à ce type de complication ; chez celui-ci, si la pression artérielle baisse de plus de 50 % par rapport aux données basales, ou de plus de 33 % pendant plus de 10 minutes, il existe une augmentation significative du risque opératoire [57].

L'hypertension artérielle (accès hypertensifs) répond aux mêmes critères de non homogénéité. Sévère, elle n'excède pas 1 % dans la période périopératoire [50].

 Complication de l'anesthésie de l'hypertendu, elle expose au déclenchement d'une ischémie myocardique, chez les insuffisants coronariens, et/ou à la décompensation d'une insuffisance ventriculaire gauche. Son incidence dépend de la qualité du traitement préopératoire et du type de l'acte chirurgical [57].

Complications neurologiques

Très invalidant, ce type de complications donne fréquemment lieu à des recours médicolégaux.

On distingue des complications centrales, médullaires et périphériques.

On peut y associer les complications psychologiques (souvent appelées de stress), essentiellement liées à la mémorisation d'éveils peropératoires. Les complications dites médullaires seront examinées ultérieurement.

Complications centrales

Elles comprennent les troubles de la conscience et les accidents vasculaires cérébraux. Les troubles de la conscience, pour la plupart d'origine hypoxémique, ont pour expression majeure les comas dont la fréquence est comprise entre 0,6 % [95] (tableau X) et 0,008 % dont 0,005 % totalement dépendant de l'anesthésie [135] (tableau VII). En ce qui concerne les banques de données et les compagnies d'assurances, leur fréquence est de l'ordre de 11 % [138] et 12 % [21] (tableau XIII). La complication est révélée en postopératoire, mais l'accident qui en est à l'origine peut se produire soit durant l'anesthésie, soit au cours du réveil ; il est lié à une diminution de la concentration d'oxygène inspiré (cause respiratoire) ou à une mauvaise distribution tissulaire de l'oxygène (cause circulatoire). Les causes respiratoires sont les plus nombreuses et ont été commentées (cf supra). Dans l'enquête Inserm, sur les dix comas observés, totalement dépendants de l'anesthésie, cinq d'entre eux étaient en relation avec une dépression respiratoire postanesthésique. Une mauvaise distribution d'oxygène aux tissus et donc au cerveau relève, au cours ou au décours de l'anesthésie, d'une diminution du débit cardiaque, due fréquemment à l'effet inotrope négatif d'un grand nombre d'agents anesthésiques, dont les anesthésiques locaux, de troubles du rythme ou de la fréquence cardiaque, d'un arrêt cardiaque, d'une hypotension artérielle pathologique ou thérapeutique, d'une grave anémie, d'une embolie gazeuse. Les complications peuvent se limiter à des somnolences prolongées (0,6 %) en salle postinterventionnelle [95] ou des confusions en postopératoire 0,6 % [25] (tableaux IX et X). Les séquelles peuvent aller de simples troubles psychologiques à l'état végétatif.

Les accidents vasculaires cérébraux ont été diagnostiqués en postopératoire à la fréquence de 0,6 % [25] et 0,006 % [135]. La série ASA en retient 3 % [21]. Ces complications se rencontrent chez des patients âgés, et la responsabilité de l'anesthésie dans leur survenue est discutable. Mais ils paraissent favorisés par des variations tensionnelles peropératoires importantes ou des troubles du rythme [64].

Complications périphériques

Elles sont essentiellement le résultat de la compression ou de l'étirement d'un nerf entraînant des paresthésies et/ou une paralysie, accidents bien étudiés ailleurs dans ce traité [38]. Exceptionnellement, la lésion nerveuse peut être en relation avec un traumatisme direct par une aiguille ou l'extravasation d'un médicament. Ce type d'accident est très documenté dans les différentes études, avec cependant quelques difficultés compagnies d'assurances, on relève des taux de 4,3 % [138] et 6 % (GAMM 1995) (tableau XIII). Dans la série ASA, la fréquence était de 15 % dont 39 % liés à une ALR. Dans cette étude, une lésion du nerf cubital était identifiée dans 34 % des accidents neurologiques, une atteinte du plexus brachial dans 23 % et des racines lombosacrées dans 16 % [76]. Dans certains cas, le mécanisme de la lésion n'était pas évident. Souvent le patient accusait déjà avant l'anesthésie, dans certaines positions, des douleurs dans le territoire incriminé. De plus, en particulier dans les atteintes du nerf cubital, il est arrivé qu'on découvre, lors d'examens électrophysiologiques, des anomalies sur le nerf controlatéral. Les neuropathies préexistantes constituent également un facteur de risque.

La responsabilité de ces accidents met en cause fréquemment chirurgien et anesthésiste.

Les lésions sont de type démyélinisation localisée au point de compression. Dans la plupart des cas, la remyélinisation intervient en 6 à 8 semaines ; mais elle peut être plus tardive et, dans de rares cas, la lésion est définitive.

Complications psychologiques

Elles sont de l'ordre de 1,5 % [25] et incluent le plus souvent les mémorisations des périodes d'éveil (awareness), survenues en peropératoire qui sont, elles, fréquemment citées. Elles traduisent le stress lié à l'opération et à l'anesthésie. Une étude de 1996 fait le point sur ces mémorisations, dont la fréquence est très variable en raison des critères diagnostiques adoptés pour les définir, en particulier si l'on tient compte des rêves dont fait part le patient à son réveil, surtout si c'est un psychologue qui les recherche [65]. Les incontestables mémorisations de périodes d'éveil durant la phase opératoire ont une fréquence de l'ordre de 0,20 % [26, 83]. Mais celles-ci sont plus importantes en anesthésie obstétricale : 0,6 % [88] et en chirurgie cardiaque où, dans certaines études, on en recense de 1 à 23 % [60, 117]. Dans les dossiers de banques de données et de compagnies d'assurances, on note un taux de 23,2 % sur les 69 complications totalement dépendantes de l'anesthésie dans la série australienne [143], de 3,7 % sur les 1 501 dossiers de la MDU [143] et de 3 % sur 1960 dossiers de la série ASA [21].

Cet accident résulte d'une concentration insuffisante d'agent hypnotique ou anesthésique chez un patient curarisé qui, conscient, a la perception de son environnement, souffre (et ce d'autant plus qu'il a été sous-dosé en analgésique), alors qu'il est paralysé et ne peut donc pas manifester. Il a été démontré que les patients ayant subi cette situation de stress développent, pour 66 % d'entre eux, des troubles psychologiques graves. La prise de conscience de cette complication (classée dans les majeures), et les conséquences médico-légales à l'encontre des anesthésistes responsables, en ont probablement réduit la fréquence. Elle était cependant encore signalée en 1991 avec une fréquence de 0,9 % en anesthésie non obstétricale [83] et de 3,3 % en 1995 en chirurgie cardiaque [98]. Cette complication est peu connue en France ; elle n'apparaissait pas dans l'étude Inserm mais deux déclarations en ont été faites auprès du GAMM en 1995 (tableau XIII).

Complications diverses

Complications anaphylactiques et anaphylactoïdes

Faisant l'objet d'une mise au point dans ce traité [78], on se limitera ici à souligner leur actualité en relation avec l'augmentation du nombre des agents de l'anesthésie qui ont pour la plupart, à des degrés divers, un risque potentiel histaminolibérateur ou allergisant à symptomatologie cardiocirculatoire ou respiratoire. Ce risque a été évalué par l'enquête Inserm à un choc grave pour 4 600 anesthésies, avec 6 % de mortalité [135]. Il a été estimé 0,02 % en Australie en 1984 [50] et en France en 1993 [79]. Dans l'Australian incident monitoring study, 57 des 2 000 accidents rapportés étaient en relation avec des réactions de type anaphylactique ; parmi celles-ci 33 réactions étaient classées comme modérées et 17 comme sévères [31].

Hyperthermie maligne

Elle est presque absente des grandes études épidémiologiques, en raison de sa rareté et de sa localisation géographique variable. Cependant Cohen et al, en rapportent deux cas paraît pas engagée que les dossiers d'assurances n'en font pas état. Les estimations situent sa fréquence entre 1/14 000 et 1/40 000 anesthésies, mais la forme fulminante ne se rencontrerait que dans 1/250 000 anesthésies. Pour plus de détails sur cet accident redoutable, le lecteur est invité à se reporter à l'étude qui en est faite dans ce traité [75].

Hépatite aiguë

Elle ne concerne au plan épidémiologique que l'halothane. Sa fréquence est évaluée de 1/10 000 à 1/30 000 anesthésies [131, 44]. Cohen et al signalent, en 1986, 0,01 % de complications hépatiques [26]. Sur une série de 62 cas sélectionnés par le Comitee of safety of medecine, aux États-Unis, 41 patients avaient reçu de l'halothane plus d'une fois, d'où le rôle retenu de la répétition de l'administration [3]. Les autres anesthésiques par inhalation, de métabolisme hépatique moins important que l'halothane, semblent présenter une toxicité hépatique moindre.

Traumatisme dentaires

Ils représentent 1,2 % des plaintes des patients interrogés en fin d'hospitalisation [44]. Les enquêtes épidémiologiques en relèvent 0,095 % [26] et 0,17 % [25]. Une étude centrée sur ce sujet en retenait en 1986, 0,1 % [87]. Cet accident est donc rare. Mais dans les dossiers des banques de données ou des compagnies d'assurances, cette complication arrive largement en tête : 20,6 % [143], 52 % [138] et 46 % dans les déclarations en France auprès du GAMM en 1995 (tableau XIII). Une intubation difficile ou en urgence est responsable de la moitié des traumatismes, dont 25 % se produisent à l'extubation ou en salle postinterventionnelle. C'est l'incisive supérieure gauche qui est le plus souvent lésée [84]. Dans 62 % des cas, le traumatisme intéresse une ou des dents antérieurement traitées ou siège d'une périostite alvéolodentaire [15]. Une étude de 1989 a montré que 55 % des traumatismes dentaires étaient en relation avec la mise en place d'une canule buccale et non avec la laryngoscopie [24].

Nausées et vomissements postopératoires

Ils ont considérablement diminué avec le temps et en fonction du mode d'anesthésie utilisé. On notera sur le tableau XV que l'incidence de cette complication, notée avec les différents anesthésiques halogénés, est homogène et qu'elle est nettement plus marquée avec l'utilisation du fentanyl. D'autres facteurs peuvent en modifier la fréquence. C'est ainsi que l'utilisation de néostigmine comme antidote des curares élève le taux de nausées et de vomissements postopératoires de 11 à 47 % [73]. Parmi les anesthésies veineuses c'est avec la neuroleptanalgésie et l'anesthésie au propofol [103] que l'incidence de cette complication est la plus basse. Les anesthésies rachidiennes sont également génératrices de nausées et vomissements en relation avec l'hypotension artérielle. Ces complications sont classées parmi les mineures, bien que quelques cas prennent place en raison de leur intensité parmi les majeures [50]. Elles restent cependant un problème fondamental en anesthésie ambulatoire.

Lésions oculaires

Elles ont été signalées dans 0,06 % des anesthésies [26]. À la sortie de l'hôpital 0,6 % des patients interrogés se plaignaient des yeux [43]. Dans les collectifs de données, cette complication est citée avec une fréquence de 3 à 4 % [3]. Dans la série ASA, une ulcération cornéenne était intervenue dans 3 % des litiges. Elle résultait, entre autres, du contact de la cornée avec un agent irritant, ou d'un traumatisme à partir d'un masque facial, d'un laryngoscope ou d'un champ chirurgical ; dans 16 % de ces cas, la lésion avait entraîné une cécité. Dans 30 % des cas, elle était en relation avec un mouvement intempestif survenu lors d'une chirurgie ophtalmologique et s'était également accompagnée de cécité. Les experts ont considéré que, dans 81 % des cas, l'accident aurait pu être évité [57].

 

 


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